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Assurance pour compte : application de l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances

Assurance pour compte : application de l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances

La Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires a pour rôle de garantir la représentation des fonds gérés par chacun de ces professionnels du droit inscrits sur les listes nationales. À cet effet, elle est tenue de souscrire les assurances nécessaires (C. com., art. L. 814-3 ; mod. par ord. n° 2019-964, 18 sept. 2019) – dites aussi de non-représentation des fonds (NRF) – prenant la forme d’assurances pour le compte de qui il appartiendra ou de procéder, aux termes d’un dispositif légal de solidarité interne, à des appels de fonds auprès de ces auxiliaires de justice qui abonderont pour régler la défaillance de leur confrère (H. Slim, « Les garanties d’indemnisation », in La responsabilité liée aux activités juridiques, Bruylant, 2016, p. 191 s., spéc. n° 23). Articulé avec l’article L. 814-4 du code de commerce, il revient encore à la Caisse de garantie de souscrire un contrat d’assurance collective responsabilité civile – à adhésion obligatoire – pour couvrir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que tous ces professionnels qui y cotisent encourent dans l’exercice de leurs mandats (H. Slim, La responsabilité professionnelle des administrateurs et liquidateurs judiciaires, LexisNexis, 2002, p. 3 s.) avec, selon l’article R. 814-23 du même code, « une garantie minimale de 800 000 € par sinistre et par an pour chaque personne assurée ».

S’il est vrai qu’en pratique, les différentes lignes d’assurances procurent aux assurés et aux justiciables des garanties très supérieures au minimum légal (R. Bigot, « L’assurance des professions du chiffre et du droit », in R. Bigot et A. Cayol [dir.], Le droit des assurances en tableaux, 1re éd., préf. D. Noguéro, Ellipses, 2020, p. 350 s., spéc. p. 361 ; L’indemnisation par l’assurance de responsabilité civile professionnelle. L’exemple des professions du droit et du chiffre, avant-propos H. Slim, préf. D. Noguéro, Defrénois, coll. « Doctorat & Notariat », t. 53, 2014, nos 143 s.), ce jeu des différentes lignes souscrites, fréquemment auprès de sociétés d’assurances différentes, n’est pas sans soulever d’importantes difficultés en cas de procès et peut se révéler facteur de conflits d’intérêts pour les assureurs notamment. En effet, « l’assureur est un tiers dans un procès en responsabilité intenté contre l’assuré – responsable, mais il est un tiers singulièrement intéressé au résultat de l’action, car c’est lui qui, par son obligation de garantie, née du contrat, devra supporter le poids définitif de l’indemnisation » (Y. Lambert-Faivre et L. Leveneur, Droit des assurances, 14e éd., Dalloz, 2017, n° 732). Une parfaite illustration de ces divergences d’intérêts ressort d’un arrêt récent de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 17 décembre 2020, opposant notamment la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires à son assureur NRF de seconde ligne, mais dont les principales victimes sont les justiciables, puisque le tiers lésé, par l’intervention de l’auxiliaire de justice ayant notamment détourné des fonds de son entreprise, a été mis en règlement judiciaire en 1974 et est décédé en 2008. Seules ses héritières connaissent une issue à cet « enfer procédural » de plusieurs dizaines d’années.

À ce titre, un auteur a mis en lumière de manière magistrale que « l’assureur et l’assuré sont placés dans une situation particulière. Ils sont à la fois des alliés objectifs en ce qu’ils ont tous deux intérêt à ce que la thèse de l’assuré, qu’il soit responsable ou victime l’emporte, et des adversaires potentiels, en ce qu’un conflit d’intérêts peut aisément surgir. En effet, la prise en charge du sinistre est rarement totale soit parce qu’il y a une franchise qui en laisse une partie à la charge de l’assuré, soit parce qu’un plafond de garantie a vocation à s’appliquer. Ces mécanismes s’opposent à ce que l’assuré s’efface totalement derrière l’assureur qui serait seul concerné par la défense des droits et obligations de l’assuré qui lui seraient entièrement transmis ou dont il supporterait seul la charge. La situation de l’assureur et de l’assuré fait ainsi penser à certaines théories des jeux qui envisagent la situation des deux parties dont le sort est lié, mais qui conservent chacune un intérêt propre. Elle fait aussi penser à ce fameux aphorisme politique suivant lequel l’union est un combat » (J. de Salve de Bruneton, « Le procès, facteur de conflits d’intérêts pour l’assureur », in actes du colloque L’assureur et le procès, Université du Maine, 27 nov. 2009, thème 2. « L’intégration du procès par l’assureur », présidence : G. Durry, RGDA 2010, n° 3, p. 887 s., spéc. p. 887).

Dans ce combat, l’assureur de seconde ligne de la Caisse de garantie a fait montre d’une résistance à toute épreuve, se retranchant derrière le bouclier de la fameuse prescription biennale, ce que l’assureur de première ligne s’était abstenu d’opposer. Il n’est pas nouveau que tous les moyens puissent être bons pour certains assureurs n’entendant pas régler un sinistre, en particulier en soulevant une prescription, une exclusion (R. Bigot, Quand tous les moyens sont bons – prescription ou exclusion – pour éviter de garantir, ss Civ. 2e, 6 févr. 2020, n° 18-17.868, Dalloz actualité, 25 févr. 2020), voire le moyen selon lequel le risque n’est plus assurable après avoir perçu les primes correspondantes (R. Bigot, Le caractère inassurable du risque pandémique : une « allégation fantaisiste » d’AXA, ss T. com. Paris, 12 mai 2020, n° 2020017022, Dalloz actualité, 28 mai 2020).

Le délai de cette prescription extinctive étant très bref, il est des plus avantageux pour les assureurs. À l’instar du délai du droit commun de la prescription porté à cinq ans par la réforme de 2008, pour l’identité avec ce dernier un délai quinquennal serait nettement préférable en assurance (D. Noguéro, Provocation à la réforme de la prescription biennale au sujet de l’article R. 112-1 du code des assurances. Au-delà d’un nouvel arrêt de la Cour de cassation, RRJ 2016-2, XLI-162, p. 725 s., spéc. p. 753). En l’attente, ce court délai invite les assurés à une attention de tous les instants.

Le point de départ du délai est tout aussi fondamental que le délai lui-même (J. Bigot, Traité de droit des assurances. Tome 3. Le contrat d’assurance, 2e éd., LGDJ, 2014, p. 1229, n° 2460). En effet, « une fois la durée du délai de prescription déterminée, il importe d’identifier le dies a quo, c’est-à-dire le jour à partir duquel le délai commence à courir » (G. Guerlin, « La prescription », in R. Bigot et A. Cayol [dir.], op. cit., p. 204). C’est sur ce point de droit que s’est fixée la présente décision qui s’ajoute ainsi au « contentieux pléthorique qu’engendre une prescription conçue à dessein de le limiter », lequel « est la suffisante démonstration de son actuelle inadaptation » (B. Beignier et S. Ben Hadj Yahia, Droit des assurances, 3e éd., LGDJ, 2018, n° 630, p. 623 ; comp. P. Sargos, La doctrine jurisprudentielle de la Cour de cassation relative à la prescription en droit des assurances, RGDA 1996. 545). Seuls quelques assurés tirent leur épingle du jeu, au prix de longs et coûteux procès, par le biais de l’inopposabilité du délai spécial de prescription par suite de l’inobservation par l’assureur des mentions y relatives dans la police (R. Bigot, La charge de la preuve de la mention relative à la prescription biennale dans la police d’assurance, ss Civ. 2e, 18 avr. 2019, n° 18-13.938, Dalloz actualité, 3 mai 2019).

En somme, si l’article L. 114-1 du code des assurances prévoit, par principe, que les actions dérivant du contrat d’assurance se prescrivent par deux ans « à compter de l’événement qui y donne naissance », ce principe est assorti de plusieurs exceptions (G. Guerlin, art. préc., p. 204). En d’autres termes, « les points de départ de la prescription résultent : tout d’abord de la loi : - un point de départ général, l’événement qui donne naissance à l’action, - et d’autres qui sont plus précisément définis : en cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, le jour où l’assureur en a eu connaissance ; pour les actions contre l’assureur, en cas de sinistre, le jour où les intéressés en ont eu connaissance, s’ils prouvent qu’ils l’ont ignoré jusque-là ; en cas de recours d’un tiers contre l’assuré, l’action en justice du premier contre le second ou l’indemnisation par celui-ci ; ensuite, de la jurisprudence : dans les assurances des emprunteurs, la demande de paiement émise par l’établissement de crédit ou le refus de garantie opposé par l’assureur » (Bull. act. Lamy assurances, 2020, n° 1136, in fine).

L’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances permet ainsi « d’éviter qu’un assuré, responsable d’un dommage, agisse précocement contre son assureur, à un moment où le principe de la garantie est trop incertain, la victime n’ayant pas encore agi elle-même contre l’assuré » (G. Guerlin, art. préc., p. 204). En outre, le recours d’un tiers, mentionné par ce troisième alinéa, a été étendu par la jurisprudence à toutes les assurances (Civ. 1re, 21 nov. 2000, n° 98-12.481, D. 2001. 3325 image, obs. H. Groutel image ; RGDA 2000. 1058, note J. Kullmann ; Bull. act. Lamy assurances, 2020, n° 1136), bien que fussent seules envisagées les assurances de responsabilité lors de la rédaction de la loi du 13 juillet 1930 (v. M. Picard et A. Besson, Traité général des assurances terrestres, t. I, LGDJ, 1938, n° 262, p. 523 ; v. la jur. antérieure, Civ. 1re, 17 nov. 1953, RGAT 1954. 208, note A. Besson ; 10 mai 1988, n° 86-14.201, RGAT 1988. 532, note J.-L. Aubert ; 11 déc. 1990, n° 88-14.058, RGAT 1991. 134, note J. Kullmann). La doctrine a pu relever qu’« à cet égard, les assurances pour compte ne sont pas concernées par cette extension du domaine d’application. Certes, il existe bien un recours du tiers (assuré pour compte) contre le souscripteur lorsque le volet assurance de responsabilité joue. Mais il ne s’agit là que de l’application traditionnelle de l’article L. 114-1, alinéa 3 » (B. Beignier et J.-M. Do Carmo Silva [dir.], Code des assurances, 13e éd., LexisNexis, 2019, note ss art. 114-1, p. 182).

En l’espèce, un dirigeant d’entreprise a été mis en règlement judiciaire sur déclaration de cessation des paiements faite le 7 mai 1974. Cette procédure de règlement judiciaire a ensuite été étendue à trois sociétés dans lesquelles il était associé. Vingt ans plus tard, le 19 juillet 1994 précisément, un concordat avec abandon d’actif a été homologué. Rappelons que le concordat constituait la solution normale des problèmes d’insolvabilité – et la liquidation la solution subsidiaire – en s’appuyant sur un plan de financement ainsi qu’un programme mettant en évidence la viabilité de l’entreprise. Un commissaire à l’exécution de cette mesure a été désigné, mais il a été suspendu peu de temps après à la suite de poursuites pénales pour détournement de fonds. Un administrateur provisoire de son étude a donc été nommé le 20 octobre 1998. Par lettre du 5 novembre 1998, l’administrateur provisoire a déclaré à la Caisse de garantie des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires un sinistre pour non-représentation de fonds concernant l’étude de l’ancien commissaire à l’exécution du concordat, estimé alors provisoirement à la somme de 20 215 996 F (3 081 908,72 €).

Le 25 avril 2002, le dirigeant d’entreprises floué a assigné entre autres l’ancien commissaire à l’exécution du concordat et la Caisse de garantie en paiement de diverses sommes au titre de la responsabilité civile du premier et des détournements de fonds. Le 31 octobre 2002, la Caisse de garantie, qui avait souscrit, au titre de la non-représentation des fonds, une police de seconde ligne auprès d’une société d’assurance, a appelé cette dernière en garantie.

Le dirigeant étant décédé le 26 octobre 2008, ses ayants droit ont repris l’instance. Après une première décision de la Cour de cassation rendue en 2015 (Com. 13 oct. 2015, nos 14-23.683, 14-14.649 et 14-14.743), la cour d’appel de Montpellier, statuant sur renvoi après cassation, a déclaré recevable l’action en garantie formée par la Caisse de garantie contre l’assureur et l’a condamné à garantir la Caisse de garantie à concurrence de 765 265,17 € dans la limite de la franchise et du plafond de garantie contractuels et sous réserve de la déduction des provisions (Montpellier, 2e ch., 14 mai 2019).

L’assureur a formé un pourvoi en cassation. Par un arrêt du 17 décembre 2020, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rejeté ce pourvoi et, par un motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, a rappelé un important principe : « Selon l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances, quand l’action de l’assuré a pour cause le recours d’un tiers, le délai de prescription biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l’assuré ou a été indemnisé par ce dernier » (arrêt, pt 10). Sur la forme, la Cour de cassation n’a pas reproduit pas trois mots du texte, l’action de l’assuré « contre l’assureur ».

La haute juridiction a ensuite relevé qu’il résulte des constatations de l’arrêt que l’entrepreneur décédé a assigné la Caisse de garantie en avril 2002. Elle en a conclu que l’action en garantie exercée par l’assurée contre son assureur, le 31 octobre 2002, n’était pas prescrite (pt 11). Ce faisant, on pourrait en déduire que la Cour de cassation a encore étendu le jeu de l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances, au cas présent aux assurances pour compte. Leur souscripteur, ici une Caisse de garantie, bénéficie ainsi du report du point de départ de la prescription biennale au moment où il a été assigné.

On savait déjà que, lorsque l’action en garantie formée par l’assuré à l’encontre de l’assureur a pour cause le recours d’un tiers, le délai ne court pas depuis la date de la désignation de l’expert amiable par l’assureur (Civ. 3e, 13 févr. 2013, n° 11-28.810, RGDA 2013. 607, note M. Asselain). Dans une telle situation, la Cour de cassation a précisé en 2005 que ce délai courait depuis la date de l’assignation, devant être la seule prise en compte (Civ. 1re, 30 nov. 1976, n° 75-10.641 ; 18 janv. 1989, n° 87-12.186, D. 1991. 74 image, obs. H. Groutel image ; RCA 1989, n° 123, obs. H. Groutel ; 12 déc. 1995, RCA 1996, n° 103 ; Civ. 2e, 17 mars 2005, RGDA 2005. 629, note M. Bruschi ; Civ. 2e, 13 juill. 2005, L’Argus 2005, n° 6940, p. 30). Rappelons que le recours ou l’action en justice peut s’exercer par la constitution nominative de partie civile (Civ. 1re, 4 mars 1958, D. 1958. 431) ou par voie reconventionnelle sous forme de dépôt de conclusions (Civ. 1re, 10 déc. 1985, n° 84-14.851).

À l’instar d’un référé-provision (Civ. 1re, 20 mars 1990, RGAT 1990. 370, note R. Bout), une assignation en référé en vue de la nomination d’un expert constitue une action en justice, à ce titre elle fait courir la prescription contre l’assuré (Civ. 1re, 18 juin 1996, n° 94-14.985, D. 1998. 45 image, obs. H. Groutel image ; RCA 1996, n° 338, note H. Groutel ; RGDA 1996. 624, note Maurice ; Civ. 3e, 2 oct. 1996, n° 94-20.740, D. 1996. 229 image ; RCA 1996, n° 410, note H. Groutel ; Civ. 1re, 22 oct. 1996, RGDA 1996. 884, note L. Mayaux ; 26 nov. 1996, n° 94-16.841, D. 1998. 45 image, obs. H. Groutel image ; 10 mai 2000, n° 97-22.651, D. 2001. 3326 image, obs. H. Groutel image ; RDI 2000. 366, obs. G. Durry image ; RGDA 2000. 517, note J. Kullmann ; 31 mai 2007, n° 06-15.699, D. 2007. 1726 image ; Gaz. Pal. 2008. 1816, note M. Périer). Le principe demeure que le point de départ de la prescription biennale est l’assignation – notamment en référé – par le tiers contre l’assuré (Civ. 2e, 3 sept. 2009, n° 08-13.094, D. 2009. 2165, obs. S. Lavric image ; ibid. 2010. 1740, obs. H. Groutel image ; RDI 2009. 652, obs. D. Noguéro image ; RGDA 2009. 1158, note A. Astegiano-La Rizza).

Cette solution est régulièrement rappelée, tantôt par la chambre commerciale pour les assurances maritimes au visa des articles L. 172-31 et R. 172-6, § 4, du code des assurances (Com. 2 mars 2010, n° 09-10.505, Dalloz actualité, 17 mars 2010, obs. X. Delpech), tantôt par la deuxième chambre civile en matière d’assurances terrestres, au visa de l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances (à propos, à nouveau, d’une assignation en référé en vue de la nomination d’un expert, v. Civ. 2e, 1er juill. 2010, n° 09-10.590, D. 2010. 1869 image ; ibid. 2102, chron. J.-M. Sommer, L. Leroy-Gissinger, H. Adida-Canac et S. Grignon Dumoulin image ; ibid. 2011. 1926, obs. H. Groutel image ; RCA 2010. 266, obs. H. Groutel). La formule – « Selon l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances, quand l’action de l’assuré a pour cause le recours d’un tiers, le délai de prescription biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l’assuré ou a été indemnisé par ce dernier » – a été énoncée à nouveau par la Cour de cassation à deux reprises en 2019 (Civ. 2e, 7 févr. 2019, n° 18-11.939, RGDA avr. 2019, p. 16, note A. Pélissier ; RCA 2019, n° 148, note H. Groutel ; 23 mai 2019, n° 18-16.528, bjda.fr 2019, n° 64, note P. Casson ; RCA 2019, n° 233) puis en 2020 dans l’affaire sous commentaire (arrêt, pt 10), à dessein élargi.

La règle semble justifiée car on est bien en présence d’un tiers victime, mais un léger embarras ressurgit car la solution est appliquée, à l’appui d’un raisonnement de la haute juridiction qui paraît propre à la responsabilité civile, à une figure d’assurance très particulière, qualifiée tantôt d’assurance pour compte (S. Cabrillac, Les garanties financières professionnelles, préf. P. Pétel, Litec, 2000, nos 411 s.), tantôt de garantie indemnitaire (I. Riassetto, Réflexions sur la nature juridique des garanties professionnelles, LPA, 16 déc. 1996, p. 4 s.), tantôt de cautionnement (P. Dupichot, Le pouvoir des volontés individuelles en droit des sûretés, préf. M. Grimaldi, thèse Paris II, éd. Panthéon Assas, 2005, p. 190, n° 225). La mise en œuvre de ces garanties financières découle généralement de la seule justification de la non-restitution des biens confiés, là où le droit commun du contrat d’assurance de responsabilité n’a plus vocation à concourir (A. Favre-Rochex et G. Courtieu, Le droit des assurances obligatoires, préf. G. Durry, LGDJ, 2000, nos 4-129 s.).

Reste que la référence au tiers dans l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances, et telle que reprise par la Cour de cassation, sans plus de précisions, peut être source de confusion en présence d’une assurance pour compte. Il existe, d’un côté, le tiers victime, à l’instar du dirigeant d’entreprise lésé par l’intervention de l’auxiliaire de justice dans l’affaire commentée et, d’un autre côté, le tiers assuré pour compte, au cas présent tout membre de cette profession du droit. Strictement, la Caisse de garantie, qui est « dotée de la personnalité civile et gérée par les cotisants » (C. com., art. L. 814-3), n’est pas l’assurée proprement dite, mais le souscripteur de l’assurance collective pour le compte de qui il appartiendra, autrement dit de toute victime potentielle d’un des membres de la profession. Il est vrai que, dans ces contrats d’assurance collective, la liste des assurés est longue et la Caisse de garantie peut aussi avoir cette qualité d’assuré, qui se cumule avec celle de souscripteur. Par ailleurs, chaque administrateur judiciaire et chaque mandataire judiciaire est assuré pour compte – ou tiers assuré pour compte – mais relève de la compétence de la Caisse de garantie, puisqu’il y cotise obligatoirement. S’il est une sorte d’adhérent imposé, il demeure tiers par rapport à la souscription du contrat d’assurance. Il a ainsi davantage la qualité de tiers hybride (A. Astegiano-La Rizza, L’assurance et les tiers. Variations sur le thème de la complexité des relations contractuelles, préf. L. Mayaux, Défrénois, coll. « Doctorat & Notariat », t. 6, 2004, nos 580 s.). La qualification précise des acteurs lèverait certains doutes sur l’adéquation de l’opération assurantielle en cause avec les dispositions de l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances. On peut, enfin, éventuellement s’interroger quant à l’opportunité de l’extension du champ d’application du texte ici réalisée à l’assurance pour compte, au regard du système de solidarité interne de la profession intervenant à titre subsidiaire de tout défaut d’assurance pour indemniser les victimes.

Auteur d'origine: rbigot
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Invité
samedi 20 avril 2024

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