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Le droit d’asile résiste aux impératifs de sécurité intérieure et sanitaire

Le droit d’asile résiste aux impératifs de sécurité intérieure et sanitaire

Dans un arrêt du 2 avril, la Cour de justice de l’Union a d’une part accueilli les recours en manquement introduits par la Commission contre trois États membres visant à faire constater un accueil insuffisant de demandeurs d’asile sur leur territoire en violation des obligations du droit de l’Union en matière de relocalisation, et alors même que ces États invoquaient la sauvegarde de la sécurité intérieure et de l’ordre public (Commission/Pologne, Hongrie et République tchèque, aff. jtes C-715/17, C-718/17 et C-719/17). D’autre part, la Commission européenne a publié le 17 avril des orientations relatives aux procédures d’asile et de retour et à la réinstallation dans le contexte du Covid-19 en rappelant que le traitement de demandes d’asile pouvait être adapté, mais restait une obligation des États membres (Comm. 2020/C 126/02).

Un encadrement strict de la possibilité de refuser la relocalisation sur le fondement de l’ordre public et la sauvegarde de la sécurité intérieure (CJUE, Commission/Pologne, Hongrie et République tchèque, aff. jtes C-715/17, C-718/17 et C-719/17, 2 avr. 2020)

En septembre 2015, compte tenu de la situation d’urgence liée à l’arrivée des ressortissants de pays tiers en Grèce et en Italie, le Conseil de l’Union européenne a adopté les « décisions de relocalisation » (Décis. (UE) 2015/1601 du Conseil, du 22 septembre 2015, instituant des mesures provisoires en matière de protection internationale au profit de l’Italie et de la Grèce, JO UE 2015, L 248, p. 80 et Décis. (UE) 2015/1523 du Conseil, du 14 septembre 2015, instituant des mesures provisoires en matière de protection internationale au profit de l’Italie et de la Grèce, JO UE 2015, L 239, p. 146) destinées à équilibrer la charge de la gestion des demandeurs d’asile entre les États membres (v. « La relocalisation des migrants sur le territoire d’autres États membres », RFDA 2017.906 ; Doutriaux, « La crise des migrants ou la crise de l’accueil des migrants dans l’Union ? », Rev. UE 2020.4 ; Azoulay, « Le droit européen de l’immigration, une analyse existentielle », RTD Eur. 2018.519). Ces décisions obligent les États membres à indiquer à intervalles réguliers un nombre approprié de demandeurs de protection internationale pouvant faire rapidement l’objet d’une relocalisation sur leur territoire respectif, puis à procéder à leur relocalisation. En particulier, la première décision du Conseil fixait à 120 000 le nombre de demandeurs de protection internationale à relocaliser à partir de la Grèce et de l’Italie vers les autres États membres de l’Union et la seconde établissait un objectif de 40 000 demandeurs de protection internationale vers les autres États membres de l’Union (seule la Hongrie n’était pas liée par les mesures de relocalisation prévues par cette dernière décision).

En application de ces décisions, en décembre 2015, la Pologne avait indiqué que 100 personnes pouvaient faire rapidement l’objet d’une relocalisation sur son territoire. Elle n’avait cependant pas procédé à ces relocalisations et n’avait pris aucun engagement ultérieur de relocalisation. La Hongrie, qui avait déjà contesté sans succès la décision du Conseil par le biais d’un recours en annulation (v. CJUE, 6 sept. 2017, aff. C-643/15, obs.  Parrot, « Relocaliser les demandeurs d’asile pour « venir en aide » à la Grèce et l’Italie », D. 2017. 2088), n’a quant à elle pas indiqué un nombre de personnes pouvant faire l’objet ni n’a procédé à aucune relocalisation. La République Tchèque a de son côté, en février et en mai 2016, indiqué un nombre de 50 personnes pouvant être relocalisées sur son territoire sans prendre aucun engagement ultérieur de relocalisation. Sur ces ponts, la Cour constate sans surprise l’existence de manquements aux décisions du Conseil. 

La Cour rejette par ailleurs les arguments en défense des parties. La Pologne et la Hongrie soutenaient en effet qu’elles étaient en droit de laisser inappliquées les décisions de relocalisation en vertu de l’article 72 TFUE, selon lequel les dispositions du traité relatives à l’espace de liberté, de sécurité et de justice, dont fait notamment partie la politique d’asile, ne portent pas atteinte à l’exercice des responsabilités qui incombent aux États membres pour le maintien de l’ordre public et la sauvegarde de la sécurité intérieure. Pour rejeter une telle justification, la Cour a considéré que, dans la mesure où l’article 72 TFUE constitue une disposition dérogatoire aux règles générales du droit de l’Union, il doit faire l’objet d’une interprétation stricte et ne saurait dès lors conférer aux États membres le pouvoir de déroger à des dispositions du droit de l’Union par la seule invocation des intérêts liés au maintien de l’ordre public et à la sauvegarde de la sécurité intérieure. La Cour ajoute que si une large marge d’appréciation doit être reconnue aux autorités compétentes des États membres de relocalisation lorsque celles-ci déterminent s’il existe des motifs raisonnables de considérer un ressortissant de pays tiers appelé à être relocalisé comme constituant un danger pour la sécurité nationale ou l’ordre public sur leur territoire, elle a cependant précisé que les autorités des États membres doivent alors s’appuyer, au terme d’un examen au cas par cas, sur des éléments concordants, objectifs et précis, permettant de soupçonner que le demandeur en cause représente un danger actuel ou potentiel. Par conséquent, elle a jugé que le dispositif prévu par ces dispositions s’opposait à ce que, dans le cadre de la procédure de relocalisation, un État membre invoque de manière péremptoire, aux seules fins de prévention générale et sans établir de rapport direct avec un cas individuel, l’article 72 TFUE pour justifier une suspension, voire un arrêt, de la mise en œuvre des obligations lui incombant en vertu des décisions de relocalisation.

Le juge européen rejette en outre l’argument soulevé par la République tchèque relatif au dysfonctionnement du mécanisme de relocalisation. Selon la Cour, admettre qu’un État membre puisse se fonder sur son appréciation unilatérale du manque allégué d’efficacité, voire du prétendu dysfonctionnement du mécanisme de relocalisation reviendrait en effet à autoriser une atteinte à l’objectif de solidarité inhérent aux décisions de relocalisation ainsi qu’au caractère obligatoire de ces actes.

Covid-19 : les orientations de la Commission relatives à la mise en œuvre des dispositions pertinentes de l’UE régissant les procédures d’asile et de retour et à la réinstallation

Les conséquences de la pandémie du Covid-19, et en particulier les mesures de confinement de fermeture des frontières, touchent également les demandeurs d’asile. En France, la situation des centres de rétention et le (non) traitement des demandes d’asile d’ailleurs soulevé de vives critiques dont certaines ont donné lieu à des recours devant le juge administratif (v. TA Paris, ord., 15 avr. 2020, n° 20062879, Dalloz actualité, 22 avr. 2020, obs. J.-M. Pastor). ; TA Paris, ord., 21 avr. 2020, n° 2006359, Dalloz actualité, 24 avr. 2020, obs. C. Castielle). Le Comité européen pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe a par ailleurs adopté dès le début de l’épidémie une déclaration de principes relative au traitement des personnes privées de liberté dans le contexte du coronavirus (v. Dalloz actualité, 27 mars 2020, obs. C. Collin).

Précisons d’emblée que si la Commission a adopté une communication au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil, appelant dès le 16 mars à une restriction temporaire des déplacements non essentiels vers l’UE en raison de la pandémie de COVID-19 (COM(2020) 115 final), des dérogations à ces restrictions temporaires s’appliquent aux personnes qui ont besoin d’une protection internationale ou qui doivent être admises sur le territoire des États membres pour d’autres raisons humanitaires.

Les lignes directrices publiées par la Commission entendent fournir des orientations aux États dans leur traitement des demandes d’asile et servent par ailleurs de rappel aux obligations des États membres en la matière. S’il ne sera pas ici possible de dresser une liste exhaustive de ces mesures, il est possible de donner quelques exemples topiques des orientations émises par la Commission. Celle-ci rappelle ainsi que « même s’il y a du retard, les ressortissants de pays tiers qui demandent une protection internationale doivent faire enregistrer leur demande par les autorités, et ils doivent pouvoir introduire une telle demande. Il convient d’accorder une attention particulière à la situation des personnes vulnérables, des familles et des mineurs (y compris les mineurs non accompagnés); en outre, tous les demandeurs d’une protection internationale doivent être traités avec dignité et, à tout le moins, être en mesure de s’informer sur leurs droits fondamentaux et de les exercer ». La Commission suggère en outre, en ce qui concerne les procédures d’asile, d’appliquer des règles dérogatoires telles que celles prévues par la directive en cas d’affluence de demandes simultanées de la directive 2013/32/UE. De plus, la Commission rappelle que le règlement (UE) n° 603/2013 («règlement Eurodac») prévoit la possibilité d’ajourner la collecte d’empreintes digitales en cas d’adoption de mesures de santé publique. Le règlement de Dublin prévoit en outre une certaine marge de manœuvre en ce qui concerne, notamment, les entretiens individuels, les procédures de regroupement familial pour les mineurs non accompagnés et l’application des clauses discrétionnaires. Enfin, en ce qui concerne les conditions d’accueil, les États membres peuvent faire usage de la possibilité prévue par la directive 2013/33/UE («directive relative aux conditions d’accueil») afin d’établir, à titre exceptionnel, dans des cas dûment justifiés et pour une durée raisonnable qui devrait être la plus courte possible, des modalités relatives aux conditions matérielles d’accueil différentes de celles qui sont normalement requises.  

Auteur d'origine: ccollin
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Invité
samedi 20 avril 2024

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