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Quel moyen d’accès – direct ou pas – aux produits de première nécessité dans les centres commerciaux pour les personnes ne possédant pas de passe sanitaire ? La question qui divise les tribunaux (v. Dalloz actualité, 6 sept. 2021) a fini par remonter au Palais-Royal. La solution du juge des référés ne va cependant pas faciliter le travail des préfets.

Des particuliers avaient saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nice pour qu’il suspende l’obligation préfectorale imposant le passe sanitaire à l’entrée de six centres commerciaux des Alpes-Maritimes. Ils ont fait appel devant le Conseil d’État de l’ordonnance rejetant leur demande. Le gouvernement ayant revu sa position sur le passe sanitaire, celui-ci n’est plus requis dans les centres commerciaux des départements où le taux d’incidence est inférieur à 200/100 000 et en décroissance continue depuis au moins sept jours. De nombreux recours sont devenus sans objet, pas en l’espèce.

Un public mixte

Le juge des référés s’est interrogé sur la « garantie d’accès » des personnes aux biens et services de première nécessité ainsi que, le cas échéant, aux moyens de transport, figurant au point II, 7°, de l’article 47-1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 modifié.

Face à un public mixte, composé de ceux qui possèdent un passe sanitaire et ceux qui n’en possèdent pas, ces dipositions, précise le Conseil d’État, « n’imposent pas d’assurer cette garantie au regard de ceux se trouvant dans l’enceinte des grands magasins et centres commerciaux dans lesquels est exigé le passe sanitaire ». Pour autant, les préfets devront s’assurer que les personnes des centres commerciaux concernés ont la possibilité d’accéder à des biens et services de première nécessité, en particulier alimentaires et de santé, « dans des magasins ou établissements situés à une distance raisonnable de ces centres, appréciée au regard de la densité urbaine et des moyens de transport disponibles ». La difficulté se corse pour les préfets puisqu’il leur appartient, de permettre à toutes les personnes, y compris celles non détentrices d’un passe sanitaire, « l’accès aux lieux de soins situés dans l’enceinte de ces centres commerciaux, le cas échéant, lorsqu’un accès différencié à ces lieux ne peut être aménagé, sur présentation d’un justificatif de rendez-vous. » Et lorsqu’il existe un accès direct à des moyens de transport depuis un centre commercial dans lequel est exigé le passe sanitaire, les préfets devront s’assurer « que les personnes non détentrices de ce passe peuvent accéder à ces mêmes moyens de transport par des accès pour lesquels le passe n’est pas requis, situés à proximité immédiate de ce centre ».

Pas de méconnaissance du principe d’égalité

Le juge des référés considère que la méconnaissance du principe d’égalité ne révèle pas une atteinte à une liberté fondamentale. En tout état de cause, l’obligation de présentation d’un passe sanitaire pour accéder à certains lieux, dès lors que ce dernier n’est pas limité au seul certificat de vaccination, « ne crée aucune discrimination entre les personnes vaccinées et non vaccinées qui serait contraire au principe d’égalité et au règlement (UE) 2021/953 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2021 relatif à un cadre pour la délivrance et l’acceptation de certificats covid-19 interopérables de vaccination, de test et de rétablissement afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de covid-19. »

Précisons qu’une première audience s’est tenue au Conseil d’Etat la semaine dernière s’agissant du passe sanitaire dans les centres commerciaux lyonnais. A l’issue de celle-ci, les différentes sociétés requérantes se sont purement et simplement désistées (CE ord., 10 sept. 2021, n° 456263, Société Centre Commercial Lyon La Part-Dieu et autres ; CE ord., 10 sept. 2021, n° 456213, Société Dolulle et autres).

Auteur d'origine: pastor

par Wolfgang Fraissele 14 septembre 2021

Soc., avis, 7 juill. 2021, FS-B, n° 21-70.011

La présente décision est l’occasion de rappeler la double obligation qui incombe à l’employeur au sujet de la visite médicale de reprise ainsi que de l’entretien professionnel de la salariée à son retour de congé de maternité.

En premier lieu, la salariée doit bénéficier d’un examen de reprise à son retour de congé de maternité, quelle qu’en soit la durée (C. trav., art. R. 4624-31). C’est ainsi que l’employeur doit prendre attache avec les services de santé au travail pour organiser cette visite de reprise qui a pour objet d’apprécier l’aptitude de la salariée à reprendre son ancien emploi. Le médecin du travail peut décider de la nécessité de mesures d’adaptation du poste ou de réadaptation de la salariée (C. trav., art. R. 4624-23, al. 1er). En effet, cet examen de reprise a pour objet : 1° De délivrer l’avis d’aptitude médicale du salarié à reprendre son poste ; 2° De préconiser l’aménagement, l’adaptation du poste ou le reclassement du salarié ; 3° D’examiner les propositions d’aménagement, d’adaptation du poste ou de reclassement faites par l’employeur à la suite des préconisations émises par le médecin du travail lors de la visite de pré-reprise. C’est pourquoi la visite doit être organisée dans les meilleurs délais, c’est-à-dire lors de la reprise du travail ou au plus tard dans un délai de huit jours à compter de la date de la reprise (C. trav., art. R. 4624-23, al. 2). Toutefois, l’absence de visite de reprise après le congé maternité n’a pas pour conséquence d’étendre la période de protection légale de la salariée. En effet, à l’inverse d’un accident du...

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Auteur d'origine: Fraisse

L’article L. 1221-19 du code du travail, issu de la loi de modernisation du marché du travail, restreint la liberté contractuelle dont disposaient les parties au contrat de travail, en limitant, en fonction de la classification professionnelle reconnue au salarié, la durée initiale de la période d’essai qu’elles envisagent de stipuler dans ce contrat. Cette durée ne doit pas excéder deux mois pour les ouvriers et les employés, trois mois pour les techniciens et les agents de maîtrise et quatre mois pour les cadres. Au-delà de ces durées maximales légales, la période d’essai a expiré, dès lors le contrat de travail du salarié concerné est devenu définitif, de sorte que si ce contrat se trouve rompu par l’employeur, la rupture doit s’analyser en un licenciement qui, en l’absence de motif légitime, doit être considérée comme étant sans cause réelle et sérieuse (rappr. Soc. 17 oct. 2007, n° 06-43.243, RJS 2/2008, n° 133). Les textes conventionnels peuvent prévoir des dispositions différentes. Le salarié devra bénéficier de la...

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Auteur d'origine: Fraisse
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En juillet 2019, le Conseil d’État avait enjoint au ministre de l’Intérieur de prendre toutes mesures nécessaires pour que soient respectés les délais d’enregistrement des demandes d’asile, fixés à l’article L. 741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CE 28 déc. 2018, n° 410347, Association La Cimade, Lebon ; AJDA 2019. 9 ; ibid. 590 , concl. G. Odinet ; RTD eur. 2019. 538, obs. D. Ritleng ). Constatant toujours des dysfonctionnements, la Cimade a saisi le Conseil d’État d’une demande pour assurer l’exécution de la décision de...

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Auteur d'origine: pastor

La Cour de justice a été saisie de deux affaires concernant la loi applicable au contrat de travail.

Dans la première affaire (aff. C-152/20), deux chauffeurs routiers roumains ont conclu, en Roumanie, un contrat de travail avec une société italienne. Ils ont par la suite assigné l’employeur devant un tribunal roumain en demandant le paiement d’un complément de salaire calculé par référence au salaire minimal prévu par la loi italienne et en particulier par la convention collective italienne du secteur des transports, qui aurait été, selon eux, applicables car ils auraient exercé habituellement leurs fonctions en Italie.

Dans la seconde affaire (aff. C-218/20), un chauffeur roumain et une société allemande avaient conclu un contrat de travail. Un syndicat roumain, dont ce chauffeur était membre, a ensuite saisi une juridiction roumaine afin que l’employeur soit condamné à payer le salaire minimal prévu par le droit allemand ainsi que les treizième et quatorzième mois dus en application de ce droit.

La résolution de ces affaires impliquait le recours au règlement Rome I n° 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles et en particulier à son article 8, qui est rédigé dans les termes suivants : « 1. Le contrat individuel de travail est régi par la loi choisie par les parties conformément à l’article 3. Ce choix ne peut toutefois avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi qui, à défaut de choix, aurait été applicable selon les paragraphes 2, 3 et 4 du présent article.
2. À défaut de choix exercé par les parties, le contrat individuel de travail est régi par la loi du pays dans lequel ou, à défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail. Le pays dans lequel le travail est...

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Auteur d'origine: fmelin
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Dans le cadre de l’adoption de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail (Dalloz actualité, 6 sept. 2021, obs. C. Dechristé), l’Assemblée nationale a adopté un amendement visant à aligner la définition du harcèlement sexuel au travail avec la définition de l’article 222-33 du code pénal, issue de la loi n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. L’article L. 1153-1 du code du travail complète la définition du harcèlement en retenant les propos et comportements à connotation sexuelle mais aussi « sexiste ». Le même texte est complétée par trois alinéas disposant que « le harcèlement sexuel est également constitué : a) Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ; b) Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition ».

Propos ou comportements condamnés

Sur les propos ou comportements condamnés, la nature sexuelle n’englobe pas, en principe, le sexisme. La sexualité renvoie à des agissements liés à la satisfaction des besoins érotiques et à l’amour physique (pratiques sexuelles ou rapports sexuels). La « drague », qui relève de l’ordre du sentimental, n’est pas ainsi de nature sexuelle (Soc. 8 juill. 2020, n° 18-24.320, D. 2020. 1467 ; ibid. 2312, obs. S. Vernac et Y. Ferkane ; RDT 2020. 687, obs. G. Pignarre ; Soc. 23 sept. 2015, n° 14-17143). Le sexisme est un comportement discriminatoire qui, répété, était condamné comme une forme de harcèlement moral « discriminatoire » (Crim. 11 juill. 2017, n° 16-85.214, s’agissant de l’affaire de l’« humour Potache » au sein d’une gendarmerie relatif à « l’infériorité constitutionnelle » de la femme). Lors de l’adoption de la loi du 3 août 2018, a été retenu un amendement destiné à « aligner, hors la répétition, la définition du harcèlement sexuel telle qu’elle figure à l’article 222-33 du code pénal et la définition de l’outrage sexiste » (Rapport Ass. nat., n° 778, 10 mai 2018, A. Louis, p. 18 s.). La loi du 2 août 2021 poursuit l’alignement dans le code du travail des articles L. 1153-1 et L. 1142-2-1 relatif à la condamnation des agissements sexistes, issu de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015. Déjà, l’article L. 1153-5-1 du code du travail, adopté par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018, dispose que, « dans toute entreprise employant au moins deux cent cinquante salariés est désigné un référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes » (nous soulignons).

D’un point de vue axiologique, le législateur considère que les agissements imposés à connotation sexuelle et le sexisme sont des comportements illicites de même nature. La portée de la nouvelle définition apparaît limitée dès lors que les harcèlements sexuel et moral ont un régime identique. Néanmoins, certaines dispositions propres au harcèlement sexuel s’appliquent désormais au sexisme. En droit pénal, si les délits de harcèlement moral et sexuel sont punis de deux ans de prison et de 30 000 € d’amende, la répression est portée, en cas de harcèlement sexuel, à trois ans et à 45 000 € d’amende pour certaines circonstances aggravantes. En droit du travail, la prévention du harcèlement sexuel intègre une obligation d’information spécifique au profit des salariés, des personnes en formation ou stage et des candidats dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche, portant sur le texte de l’article 222-33 du code pénal ainsi que des actions contentieuses civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel et des coordonnées des autorités et services compétents (C. trav., art. L. 1153-5, al. 2). De même, la procédure de médiation prévue à l’article L. 1152-6 du code du travail ne s’applique qu’en matière de harcèlement moral ; le sexisme ne peut donc plus faire l’objet d’une médiation.

Identification des auteurs de faits de harcèlement sexuel

S’agissant de l’identification des auteurs de faits de harcèlement sexuel, le texte reprend les règles posées à l’article 222-33 du code pénal. La pluralité d’acteurs a été aussi reconnue, en droit pénal, pour le délit de harcèlement moral dans les conditions de vie (C. pén., art. L. 222-33-2-2, al. 3 et 4). Il est regrettable de ne pas avoir étendue cette définition au harcèlement moral dans les conditions de travail. L’objectif du législateur, en 2018, a été d’encadrer les « nouvelles formes de harcèlement qui ne remplissent pas toujours les critères juridiques des infractions […], en l’absence notamment de propos répétés par le même auteur », en particulier le « harcèlement de meute » ou le « raid numérique » (Rapport Ass. nat., n° 778, préc.). Sont réprimées trois situations : i) les faits venant de plusieurs personnes de manière concertée, même si chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ; ii) les faits commis par plusieurs personnes à l’instigation d’une d’entre elles ; iii) même en l’absence de concertation, les faits commis successivement par plusieurs personnes en sachant que les propos ou comportement caractérisent une répétition. La concertation, l’instigation et la succession volontaire supposent une indivisibilité subjective, donc intentionnelle. Certes, l’intention n’est exigée qu’en droit pénal ; mais les critères posés y renvoient implicitement même en droit du travail. A contrario, si un salarié subit par deux salariés des propos humiliants à connotation sexuelle ou sexiste dans des circonstances différentes et pour des raisons distinctes, cela constitue des faits de violences autonomes qui ne sauraient aboutir à la qualification de harcèlement sexuel.

On peut se poser la question de l’utilité des règles adoptées en matière de pluralité d’auteurs. Les définitions principales du harcèlement moral ou sexuel n’identifient pas l’auteur du harcèlement si bien que les faits peuvent provenir d’une pluralité d’auteurs, complices ou coauteurs. A l’alinéa 7 du III de l’article L. 222-33 du code pénal, il a été, de longue date, prévu comme circonstance aggravante le fait de harceler sexuellement « par plusieurs personnelles agissant en qualité d’auteur ou de complice ». La chambre sociale de la Cour de cassation a déjà jugé que des faits de harcèlements sont établis « par les photographies portant des annotations de mauvais goût et blessantes pour [un salarié], sans que le ou leurs auteurs aient pu être identifiés, et par des attestations, ainsi que par l’absence de réaction de la responsable hiérarchique qui aurait dû ne pas participer aux faits et faire procéder plus rapidement au retrait de ces photographies et rechercher les auteurs des annotations » (Soc. 15 févr. 2012, n° 10-21.948). Citons un arrêt du 5 juin 2018 de la chambre criminelle qui a reconnu la complicité de harcèlement moral, sur le fondement de l’article 121-7 du code pénal, à l’endroit de deux directeurs de service, les prévenus ayant, par aide et assistance, facilité la préparation et la consommation des délits reprochés à la société et à trois de ses dirigeants, peu important que certains d’entre eux n’eussent pas relevé de la direction dont ils avaient alors la charge ou, s’agissant de l’un d’entre eux, que le dommage invoqué se fût produit après qu’il eut quitté ses fonctions. En effet, indépendamment du rôle spécifique de direction d’un service que chacun des prévenus exerçait, les intéressés avaient activement contribué à l’efficacité, pour l’ensemble du groupe, d’un plan qui avait créé un climat d’insécurité permanent pour tout le personnel (Crim. 5 juin 2018, n° 17-87.524). En admettant la responsabilité délictuelle de salariés n’ayant pas nécessairement été en contact avec les salariés victimes de harcèlement moral, cette décision s’inscrit dans une conception large de la notion d’auteur du harcèlement moral. Elle complète, en outre, la jurisprudence relative à la reconnaissance du harcèlement moral dit « managérial » lié aux méthodes de gestion utilisées par l’employeur (Soc. 10 nov. 2009, n° 07-45.321, D. 2009. 2857 , obs. S. Maillard ; ibid. 2010. 672, obs. O. Leclerc, E. Peskine, J. Porta, L. Camaji, A. Fabre, I. Odoul-Asorey, T. Pasquier et G. Borenfreund ; JA 2010, n° 415, p. 11, obs. L. T. ; Dr. soc. 2010. 109, obs. C. Radé ; RDT 2010. 39, obs. F. Géa ).

Il n’en demeure pas moins que la coaction supposant que chacun des protagonistes réunisse individuellement sur leur tête l’ensemble des éléments constitutifs de l’infraction, donc la répétition des faits en cas de harcèlement, l’assouplissement de la définition pénale du harcèlement sexuel se justifie (sur la question et pour une analyse critique, v. E. Baron, La coaction en droit pénal, thèse Bordeaux 4, 2012) ; en droit social, la réforme n’était pas nécessaire techniquement, mais l’on comprend sa portée symbolique. 

Auteur d'origine: Dargent

Le projet de loi est passé, en cours de navette, de 69 à 305 articles. Les députés de gauche avaient fait un recours très général devant le conseil constitutionnel, ne le saisissant formellement que sur un article, d’ailleurs validé. Le Conseil a en revanche censuré 14 cavaliers législatifs.

L’article premier est solennel : l’État rappelle son engagement à respecter les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le texte est d’ailleurs riche en déclarations de principe, immixtion dans le domaine réglementaire, neutrons législatifs et demandes de rapport. Il contient toutefois des dispositions importantes, couvrant plusieurs aspects du quotidien.

Consommation

L’article 2 impose un affichage sur les impacts environnementaux des produits. Cet affichage sera progressivement mis en place et précisé par décret.

Le chapitre II encadre la publicité, pour notamment interdire celles promouvant les énergies fossiles ou les voitures les plus polluantes. Les publicités devront progressivement afficher l’impact environnemental des produits, en commençant par l’automobile et l’électroménager. Les allégations environnementales seront encadrées. Selon l’article 14, le Conseil supérieur de l’audiovisuel sera chargé de promouvoir des codes de bonne conduite environnementaux des publicités. Les règlements locaux de publicité pourront interdire les publicités et enseignes lumineuses et l’article 20 interdit les banderoles tractées par avion. La plupart des échantillons publicitaires seront interdits.

Des obligations de vente en vrac pour les centres commerciaux seront imposées en 2030 (art 23). L’article 30 favorise la mise à disposition de pièces détachées, notamment des outils de bricolage et de jardinage. L’article 35 impose la prise en compte des considérations environnementales dans les marchés publics, tant dans les critères d’attribution que dans les conditions d’exécution du marché.

Code minier

L’article 65, réforme le code minier et modifie le droit de suite : il donne au gouvernement la possibilité de refuser l’octroi, l’extension ou la prolongation d’un permis de recherche ou d’une concession pour raison environnementale. Le régime de plein contentieux sera appliqué concernant les projets miniers. L’article 81 habilite le gouvernement à modifier par ordonnance le droit minier.

Déplacements

L’article 103 prévoit la fin de la vente des voitures particulières neuves émettant plus de 123 g de CO2/km, d’ici 2030. Les zones à faibles émissions seront généralisées à toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants d’ici à 2025 (art. 119).

Une ordonnance prévue à l’article 137 permettra à certaines régions de mettre en place une écotaxe sur le transport routier de marchandises.

L’article 145 prévoit d’interdire en mars 2022 les lignes aériennes régulières intérieures, s’il existe une alternative ferroviaire sans correspondance de moins de 2h30. Exception : si la ligne assure majoritairement le transport de passagers en correspondance.

L’article 146 interdit les déclarations d’utilité publique pour les travaux d’extension des aéroports, avec des exceptions pour Nantes-Atlantique, Bâle-Mulhouse et les hélistations. Les émissions de gaz à effet de serre des vols intérieurs devront être compensées.

Logement

D’ici 2022, la hausse des loyers sera interdite dans les logements classés F et G par l’article 159. Les logements classés G, F puis E seront progressivement interdits à la location à compter de 2025.

L’article 167 crée un carnet d’information du logement. Ce carnet listera les plans, différents travaux de rénovation énergétique et la liste des matériaux utilisés. L’article 171 prévoit que les copropriétés de plus de quinze ans auront l’obligation d’élaborer un projet de plan pluriannuel de travaux.

L’article 173 permet de modifier par ordonnance le régime de contrôle et de sanctions des règles de construction.

Dispositions diverses

Les terrasses chauffées seront interdites en mars 2022 (art. 181).

L’article 191 entend limiter l’artificialisation des sols. Pour se faire, l’article suivant insère cet objectif parmi les objectifs généraux du code de l’urbanisme. Les documents de planification et d’urbanisme des collectivités territoriales devront le prendre en compte

L’article 215 prévoit qu’une autorisation d’exploitation commerciale ne pourra être délivrée pour une implantation ou une extension qui artificialiserait des sols, sauf si le projet s’insère dans un secteur particulier ou s’il est compensé. Les bâtiments commerciaux neufs de plus de 500 m² devront être végétalisés ou avoir des panneaux photovoltaïques.

L’article 231 permet de limiter l’accès aux espaces protégés.

Plusieurs articles portent sur l’érosion et le recul du trait de côte, avec notamment la création d’un droit de préemption spécifique et prioritaire (art. 244). Une réforme plus globale aura lieu par ordonnances.

L’article 252 prévoit un menu végétarien hebdomadaire pour la restauration collective scolaire et de l’État.

Les engrais de synthèse seront progressivement interdits pour les usages non-agricoles (art. 269).

Justice environnementale

La loi muscle la justice environnementale (Dalloz actualité, 30 mars 2021, art. P. Januel), en créant des délits de mise en danger et d’atteinte grave et durable à l’environnement (l’atteinte étant considéré comme durable à partir de sept ans). La condition de double intentionnalité du délit d’écocide a finalement été supprimée.

Les amendes de plusieurs délits environnementaux ont été renforcées (art. 286). L’article 290 permet le prononcé de mesures de réparation dans le cadre de CRPC. Sur les référés environnementaux (Dalloz actualité, 31 mars 2021, art. P. Januel), les avancées sont plus limitées, même si l’article 284 élargit le champ d’application du référé pénal spécial.

Le dernier titre porte sur le suivi de la loi : la Cour des comptes fera une évaluation annuelle de ce texte, avec l’appui du Haut Conseil pour le climat.

Auteur d'origine: Dargent

Le texte, dont la plupart des dispositions entreront en vigueur le 31 mars 2022, est organisé en quatre parties : renforcer la prévention au sein des entreprises et décloisonner la santé publique et la santé au travail ; définir une offre socle de services à fournir par les services de prévention et de santé au travail ; mieux accompagner certains publics vulnérables et lutter contre la désinsertion professionnelle ; et réorganiser la gouvernance du système de santé au travail.

Mieux évaluer et prévenir les risques professionnels

Depuis le rapport Lecocq, la volonté affichée des pouvoirs publics est de privilégier une logique de prévention et non plus de réparation en entreprise. À cette fin, plusieurs dispositifs de prévention en entreprise sont créés ou précisés.

Le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) est renforcé

Un nouvel article L. 4121-3-1 définit légalement le contenu du DUERP et ses modalités de mises à jour, de conservation et de mise à disposition.

Ainsi, il est précisé que le DUERP répertorie l’ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs et assure la traçabilité collective de ces expositions. L’employeur doit transcrire et mettre à jour dans le DUERP les résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, à laquelle il procède en application de l’article L. 4121-3 du code du travail.

Outre son concours à l’analyse des risques professionnels, le CSE, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, doit, désormais, être consulté sur le DUERP et ses mises à jour.

Le DUERP doit, par ailleurs, être conservé et mis à disposition pendant au moins 40 ans.

Le DUERP a pour finalité de permettre à l’employeur de définir les mesures de prévention nécessaires.

L’étendue de cette obligation est fonction de l’effectif de l’entreprise.

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, les résultats de l’évaluation des risques doivent déboucher sur un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail.
Le contenu de cette obligation est renforcé par la loi, afin, notamment, de garantir son caractère opérationnel. Ainsi, ce programme doit désormais :

fixer la liste détaillée des mesures devant être prises au cours de l’année à venir, qui comprennent les mesures de prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels ainsi que, pour chaque mesure, ses conditions d’exécution, des indicateurs de résultat et l’estimation de son coût ;identifier les ressources de l’entreprise pouvant être mobilisées ;comprendre un calendrier de mise en œuvre.

Ce programme doit être présenté au CSE dans le cadre de sa consultation sur la politique sociale de l’entreprise.

Pour les entreprises de moins de 50 salariés, les résultats de l’évaluation des risques doivent déboucher sur la définition d’actions de prévention des risques et de protection des salariés. Une liste de ces actions doit être consignée dans le DUERP et ainsi que les mises à jour correspondantes. Cette liste doit dorénavant être présentée au CSE.

Mise en place d’un passeport prévention

Un passeport de prévention, qui devra être créé au plus tard le 1er octobre 2022, devra faire figurer tous les attestations, certificats et diplômes obtenus par chaque travailleur dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail. Le passeport sera renseigné par les employeurs, les organismes de formation mais aussi les travailleurs eux-mêmes lorsqu’ils ont suivi ces formations de leur propre initiative. Les demandeurs d’emploi auront également la possibilité d’ouvrir ce passeport. Il sera intégré dans le passeport d’orientation, de formation et de compétences si le salarié ou demandeur d’emploi en possède un.

QVCT, nouveau thème de négociation périodique obligatoire

L’ANI du 9 décembre 2020 proposait que « l’approche traditionnelle de la qualité de vie au travail soit revue pour intégrer la qualité de vie et des conditions de travail ». La loi pour renforcer la prévention en santé au travail intègre cette modification dans les dispositions du code du travail relatives à la négociation périodique obligatoire d’entreprise, en renvoyant désormais à la notion de « qualité de vie et des conditions de travail » (QVCT). Ainsi, les partenaires sociaux devront aborder tous les 4 ans – dans le cadre des négociations périodiques obligatoires -, la question de la QVCT et l’accord « d’adaptation » conclu à l’issue de ces négociations devra aborder le thème (C. trav., art. L 2242-11). Ces dispositions sont d’ordre public. À défaut d’accord sur le sujet, ou en cas de non-respect de ses stipulations, l’employeur devra engager, chaque année, une négociation sur l’égalité professionnelle femmes/hommes et la qualité de vie et des conditions de travail.

Définition du harcèlement sexuel

La loi du 2 août 2021 harmonise la définition du harcèlement sexuel contenue dans le Code du travail avec celle du code pénal (sur cette nouvelle définition, v. Y. Pagnerre, à paraître). Ainsi, les propos ou comportements à connotation sexiste peuvent également caractériser des faits de harcèlement sexuel. D’autres formes de manifestation du harcèlement sexuel, prévues par le Code pénal, sont intégrées au Code du travail. Le harcèlement sexuel peut donc aussi être constitué :

lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.

Toutefois, à la différence de l’article 222-33 du code pénal, le texte ne retient pas l’exigence d’un élément intentionnel pour constituer le harcèlement.

Extension des missions des services de santé

Conformément à l’accord national interprofessionnel sur la santé au travail du 9 décembre 2020, la loi pour renforcer la prévention en santé au travail, réforme l’offre des services de santé au travail, rebaptisés « services de prévention et de santé au travail » (SPST). Le texte leur assigne de nouvelles missions et définit un ensemble socle de services que devront assurer tous les SPST interentreprises (SPSTI). En outre, le texte organise l’accès du médecin du travail au dossier médical partagé des travailleurs dont il assure le suivi.

Une nouvelle offre socle de services

Avec pour objectif d’améliorer la qualité des services rendus par les SPSTI, la loi du 2 août définit une « offre socle » que ces services devront obligatoirement mettre en place ainsi qu’une offre de services complémentaires, qu’ils pourront proposer de manière facultative. La loi prévoit en outre que chaque SPSTI devra faire l’objet d’une procédure de certification par un organisme indépendant.

Le socle de services devra répondre à l’ensemble des missions des SPSTI prévues par le Code du travail en matière de prévention des risques professionnels, de suivi individuel des travailleurs et de prévention de la désinsertion professionnelle. La liste et les modalités de ces services devront être définies par le comité national de prévention et de santé au travail ou, en l’absence de décision du comité et à l’issue d’un délai à déterminer, par décret en Conseil d’État.

Médecins du travail : exercice des fonctions

La loi du 2 août relève au niveau législatif le principe selon lequel le médecin du travail doit consacrer à ses missions en milieu de travail le tiers de son temps de travail (cette répartition était auparavant prévue à l’art. R. 4624-4 c. trav.). À ce titre, les directeurs des SPSTI, tout comme les employeurs s’agissant des services autonomes, devront prendre l’ensemble des mesures nécessaires pour que le médecin du travail puisse respecter cette répartition de son temps de travail mais aussi assurer sa participation, au cours des deux tiers restants, aux instances territoriales de coordination, dont notamment les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ou encore les dispositifs d’appui à la coordination des parcours complexes.

Par ailleurs, l’article 21 de la loi organise la possibilité pour les professionnels de santé au travail de recourir à des pratiques médicales ou de soins à distance pour le suivi individuel du travailleur, compte tenu de son état de santé physique et mentale et, sous réserve, que ce dernier y ait consenti.

Enfin dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, la loi du 2 août organise l’accès au dossier médical partagé par le médecin du travail. En effet, la loi « Santé » du 24 juillet 2019 intégrait le dossier médical en santé au travail (DMST) du travailleur dans son dossier médical partagé (DMP) à compter du 1er juillet 2021. Mais il n’était prévu qu’une possibilité de communication de ce dossier à un médecin choisi par le travailleur à la demande expresse de ce dernier. La loi du 2 août poursuit le renforcement de la collaboration entre la médecine du travail et de la médecine de ville, en proposant de permettre au salarié de consentir à l’accès, total ou partiel, à son DMP par le médecin du travail, en préservant la possibilité pour le salarié de revenir à tout moment sur les conditions de cet accès. Ce partage d’informations entre la médecine du travail et la médecine de ville doit permettre de mieux adapter l’environnement professionnel du travailleur à son état de santé.

Infirmier en santé au travail

L’article 34 de la loi du 2 août introduit une nouvelle section dans le Code du travail consacrée à l’infirmier en santé au travail et reconnaît donc un statut à ce professionnel de santé qui « assure les missions qui lui sont dévolues par le Code du travail ou déléguées par le médecin du travail, dans la limite des compétences prévues pour les infirmiers par le Code de la santé publique » et peut sous certaines conditions exercer « en pratique avancée en assistance d’un médecin du travail au sein d’un SPST » (C. trav., art. L. 4301-1).

Accompagnement des personnes vulnérables et lutte contre la désinsertion professionnelle

La prévention de la désinsertion professionnelle a une acception proche de celle du maintien en emploi ; elle doit permettre la mise en place d’actions permettant à des personnes dont les problèmes de santé ou le handicap restreignent l’aptitude professionnelle de rester en activité ou de la reprendre, soit par maintien dans l’emploi, soit par changement d’activité ou d’emploi. Plusieurs dispositifs sont prévus par la loi du 2 août.

Cellule pluridisciplinaire de prévention de la désinsertion professionnelle. Une cellule doit être mise en place au sein de chaque SPST et animée par un médecin du travail ou un membre de l’équipe pluridisciplinaire désigné par lui et agissant sous sa responsabilité. Elle a pour missions :

de proposer des actions de sensibilisation ;d’identifier les situations individuelles ;de proposer, en lien avec l’employeur et les travailleurs des mesures individuelles d’aménagement d’adaptation ou de transformation du poste de travail ;de participer à l’accompagnement du travailleur percevant des indemnités journalières éligible à des actions de prévention de la désinsertion.

Ces missions sont remplies en collaboration avec les professionnels de santé chargés des soins et de nombreux acteurs intervenant en matière d’insertion.

À compter du 1er janvier 2024, il est prévu que dans le cadre de sa mission de prévention de la désinsertion professionnelle, le SPST informe le service de contrôle médical, les organismes locaux et régionaux d’assurance maladie et le service social de la Carsat lorsqu’il accompagne un travailleur. Sous réserve de l’accord de celui-ci, il leur transmet des informations sur le poste et les conditions de travail. Lorsque les arrêts de travail adressés par l’assuré font apparaître un risque de désinsertion professionnelle, les organismes d’assurance maladie en informent les SPST.

Création d’une visite médicale de mi-carrière. Les travailleurs sont examinés par le médecin du travail au coursd’une visite médicale de mi-carrière, organisée à une échéance déterminée par accord de branche ou, à défaut, durant l’année civile de leur 45e anniversaire. Cette visite a pour objectif, outre de faire un état des lieux de l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé du salarié, de permettre une évaluation du risque de désinsertion professionnelle et une sensibilisation du travailleur aux problématiques relatives au vieillissement au travail et à la prévention des risques professionnels.

Rendez-vous de liaison et organisation de la reprise. Lorsque la durée de l’arrêt de travail est supérieure à une durée fixée par décret, la suspension du contrat de travail ne fait pas obstacle à l’organisation d’un rendez-vous de liaison entre le salarié et l’employeur, associant le SPST. Celui-ci a pour objet d’informer le salarié qu’il peut bénéficier d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle, d’un examen de pré-reprise et de mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail. Ce rendez-vous est organisé à l’initiative de l’employeur ou du salarié. Le salarié peut refuser de s’y rendre.

La loi donne également un cadre légal à la visite de pré-reprise ainsi qu’à la visite de reprise après un congé de maternité ou une incapacité résultant de maladie ou d’accident.

Convention de rééducation professionnelle. Une convention de rééducation professionnelle conclue entre l’employeur, le salarié et la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) détermine les modalités de rééducation professionnelle ainsi que le montant et les conditions dans lesquelles la caisse verse au salarié l’indemnité journalière. Lorsque la rééducation professionnelle est assurée par l’employeur du salarié, elle donne lieu à un avenant au contrat de travail qui ne peut modifier la rémunération prévue par celui-ci. Lorsqu’elle n’est pas assurée par l’employeur, la rééducation professionnelle fait l’objet d’une convention de mise à disposition à but non lucratif. Un décret fixe les modalités d’application de ces dispositions. Peuvent bénéficier de cette convention les travailleurs handicapés ou non déclarés inaptes ou pour lesquels, lors de l’examen de pré-reprise, le médecin du travail a identifié un risque d’inaptitude.

Nouvelles règles de gouvernance du système de santé au travail

La loi réorganise la gouvernance de la santé au travail, en adaptant l’organisation interne des SPST, en élargissant les conditions dans lesquelles le médecin du travail peut déléguer une partie de ses missions à d’autres membres de l’équipe de santé et en renforçant le pilotage national.

En particulier, le texte prévoit que chaque SPSTI devra être administré paritairement par un conseil composé de représentants des employeurs désignés par les organisations représentatives au niveau national et interprofessionnel parmi les entreprises adhérentes ainsi que de représentants des salariés des entreprises adhérentes (C. trav., art. L. 4622-11 modifié). Est également prévu la dotation pour les SSTI d’un organe de surveillance sous la forme :

soit d’un comité social et économique interentreprises constitué par les comités sociaux et économiques (CSE) intéressés ;soit d’une commission de contrôle composée pour un tiers de représentants des employeurs et pour deux tiers de représentants des salariés, le président étant élu parmi ces derniers. Cette commission pourra saisir le comité régional de prévention et de santé au travail de toute question relative à l’organisation ou à la gestion du SPST.
Auteur d'origine: Dechriste
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La transparence financière figure parmi les sept critères présidant à la représentativité d’une organisation syndicale de salariés, critères énumérés à l’article L. 2121-1 du code du travail. Cette obligation de transparence financière a été validée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 avril 2020 (Cons. const. 30 avr. 2020, n° 2020-835 QPC, D. 2020. 989  ; RDT 2020. 690, obs. L. Jubert-Tomasso  ; Constitutions 2019. 605, décision ).

Ce critère implique notamment de justifier de l’état et de l’origine de ses ressources conformément aux règles édictées aux articles D. 2135-1 et suivants du code du travail.

Les ressources des syndicats s’entendent des subventions, des produits de toute nature liés à l’activité courante, des produits financiers ainsi que des cotisations. Sont toutefois déduites de ce dernier montant les cotisations reversées, en vertu de conventions ou des statuts, à des syndicats professionnels de salariés et à leurs unions ou à des associations de salariés (C. trav., art....

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Auteur d'origine: Dechriste

Durant les vacances d’été, la rédaction de Dalloz actualité prend quelques congés.

Merci d’être toujours plus nombreux à nous suivre.

Nous vous souhaitons à toutes et tous de belles vacances et nous vous retrouvons dès le 6 septembre, avec une édition complète et riche en actualités.

Auteur d'origine: Bley
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Avec la loi Sapin II (L. n° 2016-1691, 9 déc. 2016, relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique), le législateur a entendu renforcer la protection qui entoure les lanceurs d’alerte professionnelle, qui se trouvent désormais intégrés au régime traitant des discriminations, par la combinaison des articles L. 1132-3-3 et L. 1332-4 du code du travail. Si cette protection reste conditionnée, notamment à ce que les faits dénoncés soient susceptibles d’être constitutifs d’un délit ou d’un crime (Soc. 4 nov. 2020 P, n° 18-15.669 P, Dalloz actualité, 24 nov. 2020, obs. L. de Montvalon ; D. 2020. 2242  ; Légipresse 2020. 654, et les obs. ) et à ce que la dénonciation soit faite de bonne foi (Soc. 13 janv. 2021 P, n° 19-21.138 P, Dalloz actualité, 26 janv. 2021, obs. L. Malfettes ; D. 2021. 139  ; Dr. soc. 2021. 365, obs. P. Adam ), elle n’en demeure pas moins importante, en particulier contre le licenciement. Est-ce à dire qu’un licenciement prononcé à l’encontre d’un lanceur d’alerte doit nécessairement être frappé de nullité dès lors que des faits potentiellement délictuels sont dénoncés de bonne foi ? C’est là précisément la question posée dans l’arrêt présentement commenté.

En l’espèce, un salarié engagé en qualité de directeur du service des tutelles par une association a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à licenciement. Quelques jours plus tard, le salarié a dénoncé à l’organe de tutelle de l’employeur des faits pénalement répréhensibles qui auraient été commis par l’association. Il a ensuite fait l’objet d’un licenciement pour insuffisance professionnelle.

L’intéressé a alors saisi la juridiction prud’homale afin de contester son licenciement, estimant que celui-ci était en lien avec la dénonciation. Les juges du fond estimèrent le licenciement sans cause réelle et sérieuse mais rejetèrent les demandes du salarié quant à sa nullité, de sorte que ce dernier s’est pourvu en cassation.

Au visa de l’article 10, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, la chambre sociale de la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel.

La haute juridiction a en effet affirmé qu’en raison de l’atteinte qu’il porte à la liberté d’expression, en particulier au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur lieu de travail, le licenciement d’un salarié intervenu pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions et qui, s’ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales, est atteint de nullité.

Les juges du fond avaient retenu que la lettre adressée à la direction par le salarié était postérieure à la convocation de celui-ci à l’entretien préalable au licenciement, la concomitance...

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Auteur d'origine: Dechriste
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Certaines professions, telles que les agents de contrôle des transports de la RATP, parce qu’elles impliquent le pouvoir de verbaliser, sont soumises à une prestation de serment préalable. Celle-ci impliquant de « jurer », elle peut se heurter frontalement à la liberté religieuse des intéressés. Et tel était précisément le cas dans l’arrêt présentement commenté.

Une agente a été engagée par la RATP en qualité de stagiaire, au sens du statut du personnel, son admission définitive dans le cadre permanent de la RATP étant subordonnée à son assermentation.

La RATP lui fit parvenir une convocation devant le tribunal de grande instance en vue de son assermentation en application de l’article 23 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer.

Or l’agent a indiqué lors de l’audience que sa religion chrétienne lui interdisait de prêter le serment, de sorte que ce dernier n’a pas été prêté.

L’agent a par la suite été licenciée au motif qu’elle avait refusé de prêter le serment, ces faits fautifs ne permettant pas son admission définitive dans le cadre permanent de la RATP.

L’agent a saisi la juridiction prud’homale afin de voir qualifier le licenciement de dépourvu de cause réelle et sérieuse, invoquant le fait qu’elle avait refusé de prononcer la formule du serment en raison de ses convictions religieuses en proposant toutefois une autre formule, conforme à sa religion, que le président de juridiction avait refusée.

Les juges du fond la déboutèrent de ses demandes, de sorte que l’intéressée se pourvut en cassation invoquant la nullité du licenciement pour discrimination fondée sur ses convictions religieuses.

La cour d’appel avait en effet avancé les arguments selon lesquels la formule juratoire litigieuse était présente dans les serments prêtés par de nombreuses professions, l’intéressée n’apposant du reste pas la main droite sur un texte religieux ni même sur la Constitution. La juridiction avait en outre considéré que la formule était dénuée de toute connotation religieuse et de toute référence à une autorité supérieure, et était seulement destinée à traduire l’engagement de celui qui la prononce à respecter loyalement et solennellement les obligations mises à sa charge, à savoir constater des infractions et dresser des procès-verbaux dans le respect des règles qui s’imposent à l’intéressé. Aussi en avait-elle déduit que l’employeur n’avait – en la licenciant – fait que respecter la loi qui exigeait une assermentation de la part de celle-ci pour pouvoir exercer ses fonctions.

La Cour de cassation va, au visa des articles 9 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article L. 1232-1 du code du travail, casser l’arrêt d’appel.

Elle va en effet rappeler que toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, ce droit impliquant la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites. Elle va encore rappeler la – maintenant très classique – formule de l’alinéa 2 de l’article 9 de la Convention européenne, selon laquelle cette liberté « ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».

Une protection européenne

Dans son raisonnement, la haute juridiction française va encore s’appuyer sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour rappeler que le devoir de neutralité et d’impartialité de l’État est incompatible avec un quelconque pouvoir d’appréciation de sa part quant à la légitimité des croyances religieuses ou des modalités d’expression de celles-ci (CEDH 1er juill. 2014, n° 43835/11, S.A.S. c. France, § 127, Dalloz actualité, 3 juill. 2014, obs. M.-C. de Montecler ; AJDA 2014. 1348 ; ibid. 1763, chron. L. Burgorgue-Larsen ; ibid. 1866, étude P. Gervier ; D. 2014. 1451, et les obs. ; ibid. 1701, chron. C. Chassang ; ibid. 2015. 1007, obs. REGINE ; Constitutions 2014. 483, chron. M. Afroukh ; RSC 2014. 626, obs. J.-P. Marguénaud ; RTD civ. 2014. 620, obs. J. Hauser ; RTD eur. 2015. 95, chron. P. Ducoulombier ). Or il est maintenant bien acquis que les libertés européennes, parmi lesquelles la liberté de manifester ses convictions religieuses, comportent souvent une dimension négative, soit en l’occurrence le droit pour l’individu de ne pas être obligé de faire état de ses convictions religieuses et de ne pas être contraint d’adopter un comportement duquel on pourrait déduire qu’il a – ou n’a pas – de telles convictions. Il n’est pas loisible aux autorités étatiques de s’immiscer dans la liberté de conscience d’une personne en s’enquérant de ses convictions religieuses ou en l’obligeant à les manifester, et spécialement à le faire, notamment à l’occasion d’une prestation de serment, pour pouvoir exercer certaines fonctions (v. CEDH 21 févr. 2008, n° 19516/06, Alexandridis c. Grèce, § 38 ; 3 juin 2010, n° 42837/06 et a., Dimitras et autres c. Grèce, § 78, Dalloz actualité, 10 juin 2008, obs. C. de Gaudemont). Dans l’arrêt de la CEDH du 21 février 2008, le requérant devait – de façon similaire – prêter serment sur les Évangiles devant le tribunal pour être inscrit au barreau. Il avait alors dû révéler qu’il n’était pas chrétien orthodoxe et le tribunal l’avait autorisé à faire une déclaration solennelle, ce qui a conduit malgré tout la Grèce à une condamnation, la Cour considérant la liberté de manifester ses convictions religieuses dans son aspect négatif, qui implique l’interdiction pour les autorités étatiques de s’immiscer dans la liberté de conscience d’une personne en s’enquérant de ses convictions religieuses ou en l’obligeant à les manifester, notamment « à l’occasion d’une prestation de serment, pour pouvoir exercer certaines fonctions » (ibid.).

En considération de ce contexte jurisprudentiel, la Cour de cassation conclut en affirmant que l’agent n’avait commis aucune faute en sollicitant, lors de l’audience de prestation de serment, la possibilité de substituer à la formule « je le jure » celle d’un engagement solennel, de sorte que le licenciement pour faute au motif de son refus de prêter serment et de l’impossibilité consécutive d’obtenir son assermentation était sans cause réelle et sérieuse.

L’absence de nullité du licenciement

Ce n’est donc pas sur la piste du licenciement nul suggérée par le demandeur au pourvoi que s’engage la haute juridiction. Celle-ci a en effet estimé, à juste titre selon nous, que le licenciement n’a pas été prononcé par l’employeur en raison des convictions religieuses de la salariée. C’est en effet la circonstance, jugée fautive, du refus de prêter le serment prévu combiné à l’impossibilité d’exercer la profession sans être assermenté qui justifia la rupture de la relation.

Il paraît pour autant difficile, au regard de la jurisprudence antérieure et en particulier européenne, de pouvoir légitimement caractériser une faute grave au regard des circonstances. L’intéressée n’avait en effet pas refusé toute forme d’engagement déontologique, mais seulement le geste qui lui apparaissait incompatible avec sa religion. L’on notera que la CEDH pousse le degré d’exigence au niveau où l’intéressé doit non seulement ne pas se voir opposer un obstacle dirimant à la profession s’il refuse de prêter serment (comme ce fut le cas dans la présente espèce, le magistrat ayant refusé toute autre forme d’engagement solennel), mais ne doit pas même se voir confronté à une situation dans laquelle il serait amené à révéler – le cas échéant par son refus – ses convictions religieuses.

Cette circonstance devrait ainsi conduire à ouvrir plus largement le système de formalisation de l’assermentation des agents verbalisateurs qui, au regard du droit européen, ne devrait pas permettre de distinguer un salarié/agent ayant des convictions religieuses d’un autre.

La solution d’une sanction d’un licenciement jugé « seulement » sans cause réelle et sérieuse sans être frappé de nullité se démarque avec la ligne jurisprudentielle antérieure, la chambre sociale ayant déjà jugé dans une affaire aux faits pratiquement identiques qu’était nul le licenciement pour faute grave d’un agent de la RATP au motif qu’il n’avait pas obtenu son assermentation devant le tribunal, ce salarié ayant proposé, lors de sa prestation de serment, une formule de serment différente de celui prêté habituellement et conforme à sa religion chrétienne (Soc. 1er févr. 2017, n° 16-10.459 P, Dalloz actualité, 17 févr. 2017, obs. M. Peyronnet ; D. 2017. 550 , note J. Mouly ; ibid. 840, obs. P. Lokiec et J. Porta ; Dr. soc. 2017. 215, étude J.-G. Huglo et R. Weissmann ; RDT 2017. 332, obs. I. Desbarats ).

L’on notera que la Cour avait alors précisé que le serment prévu pour les agents de la RATP pouvait « être reçu selon les formes en usage dans leur religion », en avait déduit que le salarié n’avait commis aucune faute et que par conséquent son licenciement, prononcé en raison de ses convictions religieuses, était nul. Il s’agit donc d’un changement de cap qu’opère la haute juridiction qui ne semble plus y voir un licenciement nul comme étant fondé sur la violation d’une liberté fondamentale.

La solution prête à discussion en ce que si le licenciement ne trouve pas directement sa cause dans les convictions religieuses de l’intéressée mais plutôt dans son refus de prêter serment, il n’en demeure pas moins que l’un et l’autre restaient ici lié, la discrimination indirecte étant tout autant prohibée tant au niveau européen que national (v. not. C. trav., art. L. 1132-1, qui dispose qu’aucun salarié ne peut être sanctionné ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte).

Les employeurs du secteur des transports proposant des postes impliquant une assermentation devront donc désormais se montrer vigilants s’ils envisagent le licenciement de la personne ayant refusé de prêter serment pour un motif religieux. Celui-ci ne pourra en effet pas être licencié pour faute, sous peine de voir requalifier la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il restera alors trois hypothèses pour sortir de l’impasse : faire admettre une alternative au serment solennel compatible avec les convictions religieuses de chacun ; envisager un licenciement non disciplinaire, le cas échéant pour trouble au bon fonctionnement de l’entreprise. Cette dernière hypothèse, à notre sens plutôt risquée, deviendrait en effet plus envisageable si la chambre sociale n’associe plus le licenciement en pareil contexte à la violation de la liberté religieuse. La dernière hypothèse, présentant le moindre risque, consisterait alors dans la mesure où cela est possible, à positionner l’agent/le salarié sur un poste alternatif où l’assermentation n’est pas obligatoire.

Auteur d'origine: Dechriste

Dans les entreprises dépourvues d’institution représentative du personnel, le salarié convoqué à un entretien préalable au licenciement peut se faire assister par un conseiller inscrit sur une liste arrêtée par l’autorité administrative après consultation des organisations représentatives d’employeurs et de salariés au niveau national.

Le conseiller a souvent lui-même la qualité de salarié et exerce sa mission d’assistance sur son temps de travail.

Dans les établissements d’au moins onze salariés, l’employeur a l’obligation de laisser au salarié conseiller le temps nécessaire à l’exercice de sa mission dans la limite d’une durée qui ne peut excéder quinze heures par mois (C. trav., art. L. 1232-8).

Ce temps passé est assimilé à une durée de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés, du droit aux prestations d’assurances sociales et aux prestations...

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Auteur d'origine: Dechriste
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Après avoir longtemps assumé une filiation avec le droit civil en matière de prescription, le droit du travail s’est progressivement émancipé des règles de droit commun pour dégager un régime propre ou presque. Cette évolution s’est construite suivant une logique constante de raccourcissement des délais, d’abord initié à l’occasion de la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 (L. n° 2013-504, 14 juin 2013), puis définitivement consacré par l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017. Définie comme un « mode d’extinction du droit résultant de l’inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps » (C. civ., art. 2219), la prescription conditionne la validité de l’action entreprise par le salarié qui ne peut plus faire valoir ses droits une fois la prescription acquise.

Pierre angulaire de la prescription en matière de relations individuelles de travail, l’article L. 1471-1 décline les délais d’action selon la nature des prétentions émises. On sait que le délai de prescription extinctive de toute action portant sur l’exécution du contrat de travail est de deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit (C. trav., art. L. 1471-1, al. 1). En parallèle, toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture (C. trav., art. L. 1471-1, al. 2). Le législateur a par ailleurs multiplié les voies de l’exception. Ainsi, les actions en réparation d’un dommage corporel causé à l’occasion de l’exécution du contrat de travail (C. civ., art. 2226), les actions en paiement ou en répétition du salaire (C. trav., art. L. 3245-1) et les actions visant des faits de discrimination ou de harcèlement (C. trav., art. L. 1134-5 ; art. L. 1152-1 ; art. L. 1153-1) se prescrivent respectivement par dix ans, trois ans et cinq ans. À cela s’ajoutent diverses dispositions légales prévoyant des délais spécifiques s’agissant par exemple de la régularité de la procédure de licenciement pour motif économique en raison de l’absence ou de l’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi (C. trav., art. L. 1235-7 : douze mois), de la validité d’une rupture conventionnelle homologuée (C. trav., art. L. 1237-14 : douze mois) ou encore de la dénonciation par le salarié du reçu pour solde de tout compte (C. trav., art L. 1234-20 : six mois).

Dans la pratique, la prescription est un enjeu de taille pour le salarié, qu’il s’agisse de déterminer le régime applicable à l’action intentée et/ou le point de départ du délai. À la lumière de plusieurs décisions rendues le 30 juin 2021, la Cour de cassation nous livre de précieuses réponses s’agissant de la prescription de l’action engagée par le salarié, selon la nature de la créance invoquée.

Action en paiement d’un rappel de salaire fondée sur l’invalidité d’une convention de forfait : prescription triennale (pourvoi n° 18-23.932)

Ainsi, la chambre sociale précise que « l’action en paiement d’un rappel de salaire fondée sur l’invalidité d’une convention de forfait en jours est soumise à la prescription triennale prévue par l’article L. 3245-1 du code du travail ». Dans le cas présent, l’employeur faisait valoir à l’appui du pourvoi que l’action en contestation de la convention de forfait jours, quand bien même elle tendait incidemment à un rappel de salaire, portait nécessairement sur l’exécution du contrat de travail, de sorte qu’elle aurait dû être engagée dans un délai de deux ans. La cour d’appel relevait en revanche que le salarié ne demandait pas à ce que soit prononcée la nullité de la convention individuelle de forfait en jours intégrée à son contrat de travail. Ce dernier sollicitait simplement un rappel de salaire sur heures supplémentaires en faisant valoir l’inopposabilité de cette convention, laquelle avait été conclue alors que la société n’était pas dotée d’un accord d’entreprise. En ce sens, la chambre sociale avait admis qu’un salarié puisse réclamer le paiement d’heures supplémentaires et invoquer la nullité de la convention de forfait en jours à titre incident dès lors que la demande avait été formulée avant que la prescription triennale ne soit acquise (Soc. 27 mars 2019, n° 17-23.314, Dalloz actualité, 6 mai 2019, obs. W. Fraisse ; D. 2019. 705  ; ibid. 1558, chron. A. David, F. Le Masne de Chermont, A. Prache et F. Salomon ).

Action en paiement de sommes résultant d’une action en requalification d’un contrat : prescription triennale

Autre enseignement : lorsque la demande en paiement de sommes diverses résulte d’une action en requalification d’un contrat de travail à temps complet et en reclassification professionnelle, il y a lieu d’appliquer la prescription triennale instituée par l’article L. 3245-1 du code du travail (pourvoi n° 19-10.161). Pour la chambre sociale, il s’agit d’une action afférente au salaire, quand bien même les réclamations d’ordre pécuniaire sont la conséquence de prétentions visant la requalification à temps complet du contrat de travail. Sur le principe, rien ne faisait obstacle à ce que la demande soit soumise à la prescription biennale applicable aux requêtes portant sur l’exécution du contrat. En effet, force est de constater qu’il existe un lien fort, sinon exclusif, avec la problématique de la durée du temps de travail. Ce n’est pourtant pas la voie suivie par la chambre sociale, qui s’en était déjà détournée par le passé en privilégiant la prescription triennale après avoir assimilé la demande de requalification d’un contrat de travail en contrat à temps complet à une action en paiement du salaire (Soc. 19 déc. 2018, n° 16-20.522 P ; 9 sept. 2020, n° 18-24.831 P).

Point de départ du délai de prescription en cas de succession de contrats de mission (n° 19-16.655)

En parallèle, la Cour de cassation souligne que « le délai de prescription d’une action en requalification d’un contrat de mission à l’égard de l’entreprise utilisatrice en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au contrat de mission énoncé au contrat a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats de mission, le terme du dernier contrat » (n° 19-16.655). Par ailleurs, « le salarié est en droit, lorsque la demande en requalification est reconnue fondée, de faire valoir auprès de l’entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission » (n° 19-16.655). Dès lors qu’il n’est pas justifié par un cas légal de recours, le contrat d’intérim peut être requalifié en CDI auprès de l’entreprise utilisatrice. Dans cette hypothèse, le délai de prescription commence à courir à l’issue du dernier contrat d’intérim mais ses effets sont susceptibles d’être appréciés à partir du premier contrat irrégulier, suivant une lecture scrupuleuse de l’article L. 1251-40 du code du travail. Déjà, sous l’empire des anciennes dispositions fondées sur la prescription quinquennale de droit commun, la Cour de cassation avait fait prévaloir la date de rupture de la relation contractuelle pour déterminer le point de départ de la prescription (Soc. 13 juin 2012, n° 10-26.387, Dalloz actualité, 10 juill. 2012, obs. B. Ines ; D. 2012. 1682 ). La chambre sociale enracine un peu plus sa solution, et conforte la jurisprudence dégagée parallèlement en matière de CDD. Pour rappel, lorsque le recours à de multiples CDD a pour objet de pourvoir un emploi lié à l’activité permanente de l’entreprise, le délai de prescription ne court qu’au terme du dernier CDD (Soc. 8 nov. 2017, n° 16-17.499 P, Dalloz actualité, 22 mai 2018, obs. C. Couëdel ; JA 2018, n° 583, p. 39, étude M. Julien et J.-F. Paulin  ; 29 janv. 2020, n° 18-15.359, Dalloz actualité, 27 févr. 2020, obs. L. Malfettes ; D. 2020. 286  ; ibid. 1740, chron. A. David, M.-P. Lanoue, A. Prache et T. Silhol ; JA 2020, n° 622, p. 38, étude M. Julien et J.-F. Paulin ; Dr. soc. 2020. 847, étude L. Bento de Carvalho et S. Tournaux ; RDT 2020. 114, obs. D. Baugard ).

Demande de monétisation de jours épargnés sur le compte épargne-temps : prescription triennale

Parmi les cinq décisions rendues le même jour, l’une se révèle être intéressante à plusieurs égards. Tenant compte de l’objet du compte épargne-temps, la chambre sociale retient que « l’action relative à l’utilisation des droits affectés sur un compte épargne-temps, acquis en contrepartie du travail, a une nature salariale » (pourvoi n° 19-14.543). En effet, le compte épargne-temps favorise l’accumulation de droits à congé rémunéré ou le bénéfice d’une rémunération, immédiate ou différée, en contrepartie notamment de périodes de congé ou de repos non prises, voire de sommes directement affectées à ce titre. Par conséquent, la demande de monétisation de jours épargnés sur le compte épargne-temps se prescrit par trois ans et non par deux ans comme le faisait valoir la cour d’appel.

Médaille du travail et discrimination : prescription quinquennale

En outre, la Cour de cassation souligne que la demande en versement d’une gratification conventionnelle afférente à la médaille du travail en raison des années d’ancienneté dans l’entreprise suit le régime de la prescription quinquennale dès lors que l’action est initiée à raison de faits de discrimination commis en application d’un accord collectif. En l’espèce, le salarié estimait avoir été privé de la gratification conventionnelle versée aux salariés justifiant d’une ancienneté de plus de trente-cinq années et ayant reçu une médaille de travail. Selon lui, le non-paiement de la gratification engendrait une discrimination en raison de l’âge, laquelle était couverte par la prescription quinquennale. Dans le sillage de sa jurisprudence (Soc. 9 oct. 2019, n° 17-16.642, Dalloz actualité, 15 nov. 2019, obs. W. Fraisse ; D. 2019. 1999 ; ibid. 2020. 1136, obs. S. Vernac et Y. Ferkane ), la haute juridiction retient le caractère discriminatoire pour finalement admettre que l’action n’était pas prescrite à la date de saisine de la juridiction prud’homale.

Demande de rappel de salaires fondée sur une atteinte au principe d’égalité de traitement : prescription triennale

En revanche, la demande de rappel de salaires fondée non pas sur une discrimination mais sur une atteinte au principe d’égalité de traitement échappe à la prescription quinquennale (pourvoi n° 20-12.960). Dans ce cas, l’action en cause est couverte par la prescription triennale prévue par l’article L. 3245-1 du code du travail. Pour rappel, la jurisprudence distingue la discrimination de l’atteinte au principe d’égalité de traitement en ce que cette dernière suppose nécessairement une comparaison entre la situation du demandeur et celle des autres salariés (Soc. 12 juin 2019, n° 17-31.295). Tel n’est pas le cas dans l’hypothèse d’une discrimination, laquelle implique, par définition, l’existence d’un motif discriminatoire, et donc illicite, tiré de l’article L. 1132-1. Contrairement à ce que faisait valoir le pourvoi, la réparation intégrale d’un dommage né d’une discrimination n’oblige pas à placer celui qui l’a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n’avait pas eu lieu. Cela relève en réalité du principe d’inégalité de traitement, ce qui a conduit la cour d’appel à admettre que la demande de rappels de salaire était recevable uniquement dans la limite de la prescription triennale.

In fine, la Cour de cassation procède suivant une logique distributive, en tenant rigoureusement compte de la nature de la créance objet de la demande pour déterminer le régime de la prescription. Avec la profusion récente des délais de prescription en droit du travail, le résultat en est d’autant plus complexe pour le salarié qui devra opter pour une stratégie judiciaire réfléchie, voire parfois audacieuse, afin que sa demande puisse aboutir.

Auteur d'origine: Dechriste

Mme B…, assistante maternelle depuis 2006, a sollicité en 2015 le renouvellement de son agrément. Au cours de l’instruction, le département des Alpes-Maritimes a été averti par la commune de résidence de l’intéressée que le domicile de celle-ci avait fait l’objet d’une perquisition administrative le 26 novembre 2015. Le président du conseil départemental a, par une décision du 13 janvier 2016, retiré son agrément. Saisi par Mme B…, le tribunal administratif de Nice a annulé cette décision. Elle se pourvoit en cassation contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille qui a infirmé le jugement. Pour rejeter la demande, la cour s’est seulement fondée sur les circonstances que le département avait été informé par la mairie de la perquisition administrative faite à son domicile, que l’intéressée n’en avait...

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Auteur d'origine: emaupin

Le conseiller du salarié, autrefois dénommé « conseiller extérieur », est appelé à intervenir aux côtés de celui-ci lorsqu’il est convoqué à un entretien préalable au licenciement alors qu’il travaille dans une entreprise dépourvue de représentants du personnel (C. trav., art. L. 1232-4). Choisi sur une liste dressée dans chaque département par le préfet, il jouit de certains droits lui permettant d’exercer au mieux sa mission. Ainsi, une indemnisation forfaitaire annuelle tend à lui permettre de couvrir tout ou partie de ses frais administratifs et documentaires (C. trav., art. D. 1232-8) et la prise en charge de ses frais de déplacement est prévue. Il bénéficie d’un droit à formation (C. trav., art. L. 1232-12). S’il est salarié, le code du travail lui donne par ailleurs l’autorisation de s’absenter de son travail avec maintien de sa rémunération (C. trav., art. L. 1232-8 s.). Mais c’est sans doute l’application du statut des salariés protégés aux conseillers qui marque l’importance du rôle qu’on leur a confié, par la protection contre la rupture de leur contrat de travail dont ils disposent ainsi.

Selon le code du travail, dans le...

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Auteur d'origine: Cortot
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Principale manifestation du pouvoir normatif de l’employeur au sein de l’entreprise, le règlement intérieur est un élément clé en matière de discipline et de santé et sécurité au travail. Destiné à mettre en lumière des règles générales et permanentes, son élaboration est étroitement encadrée, sans quoi le règlement intérieur est réputé inopposable au salarié. Le règlement intérieur doit d’abord être soumis à l’avis du comité social et économique (CSE) (C. trav., art. L. 1321-4) avant de faire l’objet de mesures de publicité (C. trav., art. R. 1321-1). Le règlement intérieur doit par ailleurs être déposé au greffe du conseil de prud’hommes du ressort de l’entreprise ou de l’établissement (C. trav., art. L. 1321-4 et art. R. 1321-2). Enfin, le règlement intérieur doit être communiqué à l’inspecteur du travail, ce dernier étant libre d’exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux prescriptions du code du travail relatives au contenu du règlement intérieur (C. trav., art. L. 1321-4 ; art. R. 1321-4 et art. L. 1322-1). Ces différentes formalités conditionnent la mise en œuvre du contenu obligatoire du règlement intérieur (Soc. 9 mai 2012, n° 11-13.687 P, Dalloz actualité, 7 juin 2012, obs. C. Fleuriot ; D. 2012. 1340  ; RDT 2012. 564, obs. V. Pontif  ; 1er juill. 2020, n° 18-24.556) et doivent être respectées même dans l’hypothèse d’une modification du règlement intérieur, en cas d’ajouts ou d’adjonctions (C. trav., art. L. 1321-5). Mais qu’en est-il lorsque la modification intervient consécutivement à la demande de l’inspection du travail ? L’employeur, contraint d’adapter le contenu du règlement intérieur, doit-il de nouveau consulter les membres...

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Auteur d'origine: Dechriste
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Thématique devenue incontournable, les droits et libertés fondamentaux infusent le droit du travail. Qu’il s’agisse de libertés individuelles ou collectives, les droits fondamentaux du salarié prennent corps dans des principes divers tels que la liberté syndicale, la liberté d’expression, la protection de la santé et la sécurité ou encore le droit à une vie personnelle. Destiné à dissocier son statut de salarié de celui d’« être social », le droit au respect de la vie privée s’exprime à la fois au travail et en dehors, même si le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication a rendu la frontière relativement poreuse.

D’un côté, l’employeur n’est pas admis à empiéter sur ce qui relève de la vie personnelle du salarié, en recueillant par exemple des informations en lien avec sa vie privée ou en mobilisant des faits tirés de la sphère personnelle pour motiver une sanction disciplinaire (Soc. 9 mars 2011, n° 09-42.150, Dalloz actualité, 18 mars 2011, obs. A. Astaix). De l’autre, le salarié s’est vu reconnaître un droit à une vie personnelle au temps et lieu de travail (Soc. 2 oct. 2001, n° 99-42.727, Nikon, D. 2002. 768, et les obs. , obs. M. Mercat-Bruns ; ibid. 2297, obs. A. Lepage ; Dr. soc. 2001. 915, note J.-E. Ray ; ibid. 1039, note J.-E. Ray ; RTD civ. 2002. 72, obs. J. Hauser ). Pourtant placé sous la subordination juridique de son employeur, le salarié est libre de faire vivre ses croyances et d’exprimer des choix personnels au travail.

Pour autant, l’employeur peut contrôler l’exécution du travail et surveiller et éventuellement sanctionner le salarié défaillant. Pour cela, et à condition de respecter un cadre contraignant, l’employeur est admis à recourir à différents procédés tels que la géolocalisation ou la vidéosurveillance. Rappelons toutefois quelques règles élémentaires s’agissant de la mise en place et de l’exploitation de ce type de dispositifs. Dans tous les cas, l’installation du mécanisme doit être conduite selon les principes de transparence – à l’égard des salariés comme des institutions représentatives du personnel – et de proportionnalité. Dès lors que le respect des droits de la personne du salarié est en cause, l’atteinte doit nécessairement être justifiée et appropriée suivant la fameuse maxime issue de l’article L. 1121-1 du code du travail.

La mise en balance des droits et libertés fondamentaux du salarié et des intérêts légitimes de l’employeur a donné lieu à un abondant contentieux. Malgré tout, il est parfois difficile de savoir où cesse la liberté du salarié et où commence l’expression du pouvoir de direction et de contrôle de l’employeur. Bien souvent, l’enjeu principal réside dans la licéité du mode de preuve tiré d’un dispositif dont la légitimité est contestée. Dans un arrêt du 23 juin 2021, la chambre sociale nous livre un nouvel exemple et nous éclaire sur l’étendue ainsi que sur les modalités de contrôle du salarié au moyen d’un dispositif de vidéosurveillance.

En l’espèce, un salarié qui travaillait comme cuisinier dans une pizzeria avait été licencié pour faute grave à raison de faits que l’employeur entendait justifier à partir d’images tirées d’un dispositif de vidéosurveillance. Le salarié saisissait le conseil de prud’hommes afin de contester son licenciement. La cour d’appel lui donnait raison et condamnait l’employeur à payer différentes sommes à titre d’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, d’indemnité de licenciement, de rappels de salaire et congés payés afférents et dommages-intérêts pour licenciement abusif. Pour la cour d’appel de Paris, le mode de preuve constitué par les enregistrements provenant de la vidéosurveillance devait être jugé inopposable dès lors que l’installation d’une caméra dans un lieu où le salarié travaillait seul portait nécessairement atteinte au droit au respect de sa vie privée. Faisant valoir que la mise en place de la vidéosurveillance était justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché, à savoir la sécurité des personnes et des biens, l’employeur formait un pourvoi en cassation.

Dans un arrêt du 23 juin 2021, la chambre sociale se range à l’analyse de la cour d’appel et rejette le pourvoi. Suivant une démarche pragmatique conduite par l’article L. 1121-1 du code du travail, la Cour de cassation admet que « les enregistrements issus de ce dispositif de surveillance, attentatoire à la vie personnelle du salarié et disproportionné au but allégué par l’employeur de sécurité des personnes et des biens, n’étaient pas opposables au salarié ». Dans le cas présent, le salarié exerçait seul son activité en cuisine et était cependant soumis à la surveillance constante de la caméra qui y était installée. Quand bien même l’objectif affiché était d’éviter la réitération par le salarié de manquements aux règles d’hygiène et de sécurité, le dispositif était jugé inapproprié compte tenu des circonstances. La solution n’est pas surprenante.

Très tôt, le ministère du Travail avait indiqué que la vidéosurveillance ne pouvait avoir pour but exclusif le contrôle de l’activité professionnelle des salariés, au risque d’être jugée contraire à la liberté individuelle des personnes (rép. min., JOAN Q 16 juin 1980, 2152). Une surveillance exacerbée du salarié au moyen de la vidéosurveillance conduit nécessairement à détourner la finalité du dispositif par la mise en lumière constante de l’identité propre de l’individu et de son intimité. L’employeur est donc tenu de privilégier d’autres moyens s’il s’avère qu’il peut préserver les intérêts de l’entreprise sans porter une atteinte excessive aux droits des salariés. À cet égard, la bascule terminologique opérée à l’occasion de la loi dite LOPPSI II (L. n° 2011-267, 14 mars 2011, d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure) prend tout son sens.

Aujourd’hui, il est moins question de « vidéosurveillance » que de « vidéoprotection », la lumière étant mise sur l’équilibre des intérêts en jeu plutôt que sur la manifestation exorbitante du pouvoir de contrôle de l’employeur.

À l’heure où la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a laissé entrevoir un doute quant à la teneur de la protection de la vie privée du salarié (CEDH 17 oct. 2019, nos 1874/13 et 8567/13, López Ribalda et a. c. Espagne, AJDA 2020. 160, chron. L. Burgorgue-Larsen ; D. 2019. 2039, et les obs. ; ibid. 2021. 207, obs. J.-D. Bretzner et A. Aynès ; AJ pénal 2019. 604, obs. P. Buffon ; Dr. soc. 2021. 503, étude J.-P. Marguénaud et J. Mouly ; RDT 2020. 122, obs. B. Dabosville ; Légipresse 2020. 64, étude G. Loiseau ; RTD civ. 2019. 815, obs. J.-P. Marguénaud  ; RJS 3/2020, n° 164), la solution retenue doit être saluée. Pour rappel, la CEDH avait admis les enregistrements tirés d’un dispositif illicite comme moyen de preuve à raison des soupçons légitimes d’irrégularités graves et des pertes constatées par l’employeur. Au demeurant, la décision est conforme à la ligne presque indélébile tracée par la CNIL, laquelle a par exemple admis que « le placement sous surveillance continue des postes de travail des salariés n’est possible que s’il est justifié par une situation particulière ou un risque particulier auxquels sont exposées les personnes objets de la surveillance » (délib. CNIL, 17 juill. 2017, n° 2014-307 ; pour un autre ex., v. délib. CNIL, 16 avr. 2009, n° 2009-201).

(Original publié par Dechriste)

Précision quant à la date de constat du transfert des contrats

Quand doit être constaté le transfert des contrats de travail dans le cadre de la mise en œuvre de l’article L. 1224-1 du code du travail ? Question délicate et potentiellement lourde de conséquences, à laquelle la chambre sociale répond sans ambages dans l’une des espèces présentement commentées (n° 18-24.597).

Un salarié y avait été mis à disposition d’une filiale du groupe auquel appartenait son employeur initial. Or les deux entités ont estimé que les contrats des salariés mis à disposition de la filiale étaient transférés en application de l’article L. 1224-1 du code du travail, état de fait que le salarié entendit contester devant la juridiction prud’homale. Les juges du fond le déboutèrent de ses demandes, de sorte que l’intéressé forma un pourvoi en cassation.

La chambre sociale va, au visa de l’article L. 1224-1 du code du travail, interprété au prisme de la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001, rappeler que l’article s’applique en cas de transfert d’une entité économique autonome qui conserve son identité et dont d’activité est poursuivie ou reprise.

L’éminente juridiction en profite pour rappeler la définition qu’il convient de retenir des termes « transfert » et « entité économique autonome ». L’entité économique autonome doit en effet s’entendre d’un « ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ». Le transfert quant à lui se réalise si « des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l’exploitation de l’entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant ».

La Cour de cassation va enfin préciser la date à laquelle doit être constaté le transfert. Celui-ci s’opère en effet à la date à laquelle le nouvel exploitant est mis en mesure d’assurer la direction de cette entité.

On soulignera le réalisme de la solution retenue qui s’affranchit ainsi d’une appréciation qui serait fondée sur des critères...

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(Original publié par Dechriste)

Dans deux arrêts du 23 juin 2021 diffusés sur son site internet, la Cour de cassation précise que le supérieur hiérarchique qui a connaissance de faits fautifs d’un salarié doit être considéré comme l’employeur même s’il n’est pas titulaire du pouvoir disciplinaire, que ce soit pour le point de départ du délai d’engagement de la procédure disciplinaire ou concernant la possibilité de sanctionner des faits antérieurs à une précédente sanction.

Sur le point de départ du délai d’engagement des poursuites disciplinaires

L’employeur dispose d’un délai de deux mois, à compter du jour où il a connaissance d’un fait fautif imputé à un salarié, pour engager une procédure disciplinaire s’il le souhaite, en application de l’article L. 1332-4 du code du travail. La Cour de cassation l’indique clairement : pour le point de départ du délai de prescription des faits fautifs, l’employeur s’entend aussi du supérieur hiérarchique du salarié, et ce même s’il n’est pas le titulaire du pouvoir disciplinaire.

Dans cette affaire, un salarié avait été licencié pour des faits de dénigrement survenus en présence d’un formateur, ayant transmis un rapport de ces événements à la direction de la société onze jours plus tard. C’est à la date de ce rapport que l’employeur a considéré avoir connaissance des faits fautifs. Il a...

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(Original publié par Dechriste)
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1. Le contentieux lié à la violation d’une clause de non-concurrence stipulée dans le contrat de travail d’un salarié soulève de nombreuses difficultés (M. Poumarède, La sanction de l’embauche déloyale d’un salarié d’une entreprise concurrente : aux confins du droit des affaires et du droit du travail, RTD com. 2012. 651 ). Une problématique récurrente est de déterminer si le juge commercial saisi de ce litige doit, ou non, surseoir à statuer dans l’attente d’une décision du conseil de prud’hommes, également saisi. L’arrêt commenté est, à ce titre, particulièrement intéressant en ce qu’il rappelle l’orientation adoptée et s’attarde sur le cas particulier du référé commercial.

2. Les faits d’espèce était des plus classiques : une société se plaignait de l’embauche de son ancien salarié par l’un de ses concurrents, au mépris de la clause de non-concurrence stipulée dans le contrat de travail. La société victime engage alors deux actions : la première contre son ancien salarié devant le conseil de prud’hommes ; la seconde contre son concurrent devant le tribunal de commerce afin de faire cesser, en référé, la nouvelle relation de travail.

3. Dans le cadre du référé commercial, un sursis à statuer fut sollicité par l’entreprise concurrente dans l’attente du jugement du conseil de prud’hommes. Pour nous en tenir à l’essentiel, l’ordonnance de référé fut frappée d’appel et la cour d’appel refusa de surseoir à statuer. En d’autres termes, cette dernière accéda donc aux demandes de la société victime et ordonna l’arrêt de la relation de travail sous astreinte ainsi que le paiement d’une provision. Le pourvoi formé se concentrait sur la position de la cour d’appel qui aurait dû surseoir à statuer compte tenu de la procédure engagée devant le conseil de prud’hommes.

4. La Cour de cassation rejette toutefois ce pourvoi en affirmant qu’aucun sursis à statuer n’avait, en l’espèce, à être retenu. La formule mérite d’être reprise in extenso : « Si la juridiction commerciale, qui a compétence, dans le cadre d’un litige opposant deux...

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Auteur d'origine: Delpech
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Le Conseil d’État s’était déjà attaché à tirer les conséquences de la portée différenciée de l’annulation d’une décision d’homologation ou de validation d’un plan de sauvegarde de l’emploi selon le motif retenu. Il avait ainsi jugé que « lorsque le juge administratif est saisi d’une requête dirigée contre une décision d’homologation ou de validation d’un plan de sauvegarde de l’emploi d’une entreprise qui n’est pas en redressement ou en liquidation judiciaire, il doit, si cette requête soulève plusieurs moyens, toujours se prononcer, s’il est soulevé devant lui, sur le moyen tiré de l’absence ou de l’insuffisance du plan, même lorsqu’un autre moyen est de nature à fonder l’annulation de la décision administrative » (CE 15 mars 2017, n° 387728, Ministre du Travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, Lebon ; AJDA 2017. 603 ; RDT 2017. 242, concl. F. Dieu ).

Dans l’arrêt du 14 juin 2021, le Conseil d’État réaffirme ce principe mais précise davantage encore la grille d’analyse à laquelle le juge administratif doit se conformer. Il incombe désormais au juge administratif de toujours commencer par se prononcer sur le moyen tiré de l’absence ou de l’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi d’une entreprise qui n’est pas en redressement ou en liquidation judiciaire, dès lors que ce moyen est soulevé devant lui. Priorité doit ensuite être donnée aux autres moyens éventuellement présentés à l’appui...

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Auteur d'origine: Dechriste

La procédure de licenciement pour inaptitude répond à des impératifs parfois obscurs, souvent complexes. Cela suppose le respect d’un cadre précis et contraignant, que l’on peut observer au stade de la déclaration d’inaptitude par le médecin du travail, de la recherche de propositions de reclassement ou de la procédure de licenciement en elle-même. Sur le principe, il appartient au médecin du travail de déclarer inapte le salarié dont l’état de santé justifie un changement de poste, lorsque aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail n’est envisageable. Les enjeux sont réels, tant pour l’employeur que pour le salarié déclaré inapte. Aussi, il est admis que le salarié comme l’employeur peuvent saisir le conseil de prud’hommes selon la procédure accélérée au fond afin de contester les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail et reposant sur des éléments de nature médicale (C. trav., art. L. 4624-7). La saisine doit intervenir « dans un délai de quinze jours à compter de leur notification » (C. trav., art. R. 4624-46). Derrière cette apparente simplicité se cache pourtant une interrogation : le délai de quinze jours commence-t-il à courir à compter de la notification de l’avis d’inaptitude ou, au contraire, à...

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Auteur d'origine: Dechriste

Marqué du sceau de l’hybridation, le statut de VRP interpelle souvent par son originalité. Tout à la fois salarié et indépendant, le VRP bénéficie pour l’essentiel des dispositions du code du travail, avec toutefois quelques particularités. Pour rappel, le VRP, qui est chargé de développer une clientèle au profit d’un fournisseur, est lié à ce dernier à raison d’engagements portant notamment sur les services ou marchandises proposés à la vente ou à l’achat, sur le secteur d’activité à prospecter (champ géographique ou catégorie de clientèle) ainsi que sur le taux et la nature de la rémunération. Pour le reste, il bénéficie d’une grande latitude dans la mise en œuvre de ses missions. De cette large autonomie découle un lien de subordination particulièrement distendu, le pouvoir de direction et de contrôle de l’employeur étant, dans les faits, assez limité.

La spécificité du statut du VRP s’observe également à travers le lien étroit qu’il entretient avec la clientèle qu’il développe. Tenant compte de ce paramètre, le code du travail reconnaît au VRP le bénéfice d’une indemnité de clientèle, destinée à valoriser la part qui lui revient personnellement dans l’importance en nombre et en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui (C. trav., art. L. 7313-13). Le VRP en est toutefois privé dans l’hypothèse d’un licenciement pour faute...

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Auteur d'origine: Dechriste
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Énième rebondissement dans la non-application de la réforme de l’assurance chômage, les nouvelles modalités de détermination du montant de l’allocation d’assurance chômage ne s’appliqueront pas au 1er juillet. Une ordonnance de référé du Conseil d’État a en effet décidé que « les incertitudes sur la situation économique ne permettent pas de mettre en place » au 1er juillet les nouvelles règles, « qui sont censées favoriser la stabilité de l’emploi en rendant moins favorable l’indemnisation du chômage des salariés ayant alterné contrats courts et inactivité. […] De nombreuses incertitudes subsistent quant à l’évolution de la crise sanitaire et ses conséquences économiques sur la situation de celles des entreprises qui recourent largement aux contrats courts pour répondre à des besoins temporaires », justifie la plus haute juridiction de l’ordre administratif. « Or ces nouvelles règles de calcul des allocations chômage pénaliseront de manière significative les salariés de ces secteurs, qui subissent plus qu’ils ne choisissent l’alternance entre périodes de travail et périodes d’inactivité. »

Les nouvelles règles de détermination des droits des salariés en matière d’assurance chômage résultent – après l’impossibilité pour les partenaires sociaux de trouver un accord satisfaisant les objectifs dictés par le gouvernement – d’un décret du 26 juillet 2019 qui devait remplacer les règles issues de la convention de 2017 au 1er novembre 2019. Application reportée dans un premier temps à l’aune de crise sanitaire. Puis plusieurs dispositions de la réforme de l’assurance chômage avaient été censurées par le Conseil d’État le 25 novembre 2020 et notamment les celles relatives aux nouvelles modalités de calcul du salaire journalier de référence (SJR). Le juge administratif y voyait certes un objectif légitime (contrer les effets pervers du recours à des contrats courts fractionné qui permettait pour un même nombre d’heures de travail d’avoir un SJR plus élevé que le salarié en CDI à temps partiel sur la même période), mais relevait dans le même temps que les nouvelles règles conduisaient à des variations du SJR allant du « simple au quadruple » pour un même nombre d’heures de travail. En pénalisant fortement les allocataires travaillant de manière discontinue, le nouveau mode de calcul apparaissait ainsi à l’appréciation du Conseil d’État opérer une différence de traitement manifestement disproportionnée au regard du motif d’intérêt général poursuivi (v. CE 25 nov. 2021, n° 434920, Dalloz actualité, 1er déc. 2020, obs. L. Malfettes ; AJDA 2020. 346 ).

En réponse et pour corriger les règles ayant fait l’objet de l’annulation, un décret du 30 mars 2021 ajoutait un mécanisme de plancher au calcul du salaire journalier de référence afin d’éviter qu’il puisse varier du « simple au quadruple » (v. décr. n° 2021-346). Mais, pour l’ensemble des syndicats, les inégalités de traitement entre demandeurs d’emploi ayant travaillé une même durée pour une même rémunération mais selon un rythme différent existaient toujours et étaient en contradiction avec le principe assurantiel du régime d’assurance chômage en prenant en compte des périodes non travaillées. Toutes les organisations syndicales représentatives – à l’exception de la CFTC – ont déposé un recours auprès du Conseil d’État dans l’objectif d’obtenir la suspension de l’application des mesures de détermination de l’allocation d’assurance chômage afin qu’elle n’entre pas en vigueur au 1er juillet et, dans le même temps, elles ont déposé un recours au fond pour en obtenir l’annulation du décret du 30 mars.

La suspension du décret sonne pour les syndicats comme une victoire. Mais le gouvernement temporise et la ministre du Travail, Élisabeth Borne, a d’ores et déjà précisé sur RTL que le ministère du Travail prendra en urgence un décret « pour que les règles actuelles puissent continuer à s’appliquer “au-delà du 1er juillet” ».

Sur le fond, le Conseil d’État doit se prononcer « dans les prochains mois » et son communiqué prend le soin de préciser que la décision de suspension ne remet « pas en cause le principe de la réforme ».

Le Conseil d’État devra ainsi se prononcer sur une violation au principe d’égalité avancée par les syndicats pour justifier une annulation de la réforme ou confirmer un changement de paradigme de l’assurance chômage qui n’aurait plus comme vocation la couverture assurantielle de la privation d’emploi. Comme l’explique Mathieu Grégoire, la réforme de l’assurance chômage introduite par les décrets du 26 juillet 2019 et 30 mars 2021 « n’est pas une réforme paramétrique. C’est une réforme systémique. Il ne s’agit pas de donner une nouvelle définition au “salaire journalier de référence”. Il s’agit d’introduire un nouvel objet qui n’est pas un salaire, mais un indicateur synthétique de salaire et de quantum d’emploi, en lieu et place de ce salaire journalier. […] Le changement d’objet témoigne du caractère systémique de la réforme qui éloigne profondément le dispositif d’une logique assurantielle de remplacement du salaire pour les salariés en situation de privation d’emploi » (v. M. Grégoire, Réforme de l’assurance chômage : vers la fin de la couverture assurantielle de la privation d’emploi, RDT 2021. 364, à paraître).

Auteur d'origine: Thill
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L’arrêt rendu le 14 juin 2021 par le Conseil d’État apporte d’intéressantes précisions relativement au périmètre d’appréciation de la réalité du motif économique en cas d’appartenance de l’employeur à un groupe. Il intervient à la suite d’une décision du 29 juin 2020 (n° 423673, Lebon ; AJDA 2020. 1642 ) concernant la même affaire et qui avait donné l’occasion à la Haute juridiction de définir, pour la première fois, la notion de groupe et de préciser l’office du juge en la matière.

À la suite de son licenciement intervenu en 2012, un salarié protégé de la société Papeteries du Léman (PDL) avait, sans contester la décision d’autorisation de licenciement devant la juridiction administrative, saisi le conseil de prud’hommes afin de voir déclarer son licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse et d’obtenir une indemnisation. Cette juridiction l’ayant débouté de sa demande, l’intéressé a interjeté appel devant la cour d’appel de Chambéry laquelle a, par un arrêt du 29 juin 2017, fort logiquement, sursis à statuer et saisi le tribunal administratif de Grenoble de la question préjudicielle de la légalité de la décision administrative. Plus précisément, la question soumise à la juridiction administrative, dont le champ d’intervention est strictement limité par la question préjudicielle posée par le juge judiciaire (v. CE 17 oct. 2003, n° 244521, Bompard, Lebon ; AJDA 2003. 2028 , chron. F. Donnat et D. Casas  ; D. 2004. 1186, et les obs., note C. Boiteau ), était celle de savoir si l’inspecteur du travail avait commis une erreur d’appréciation en limitant le périmètre d’examen des difficultés économiques au seul groupe PVL. Par un jugement du 22 janvier 2018, le tribunal administratif de Grenoble avait déclaré illégale la décision de l’inspecteur du travail. Par une première décision du 29 juin 2020 (n° 417940, Papeteries du Léman (Sté), Lebon ; AJDA 2020. 2191 ), le Conseil d’État, a, sur le pourvoi de la société Papeteries du Léman, d’une part, annulé ce jugement en précisant pour la première fois la notion de groupe permettant de déterminer le périmètre d’appréciation des difficultés économiques et la nature du contrôle opéré par le juge administratif, et, d’autre part, sursis à statuer sur la question préjudicielle afin de permettre aux parties de débattre du bien-fondé de cette appréciation. Un an plus tard, l’examen de l’affaire lui permet tant de préciser davantage la notion de groupe que de clarifier le régime de la preuve en la matière.

La notion de groupe étendue à l’ensemble des entreprises placées sous le contrôle d’une même personne physique

La définition jurisprudentielle restrictive, par le premier arrêt PDL, de la notion de groupe en l’état du droit antérieur aux ordonnances de 2017

Par l’arrêt du 26 juin 2020 – dont le principe est rappelé mais affiné par la décision du 14 juin 2021 ici commentée – le Conseil d’État a, pour la première fois, défini le groupe, par référence au (seul) I de l’article L. 2331-1 du code du travail relatif au comité de groupe, comme s’entendant « de l’ensemble constitué par les entreprises placées sous le contrôle d’une même entreprise dominante dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce », et ce « quel que soit le lieu d’implantation de leur siège, tant que ne sont pas applicables à la décision attaquée les dispositions introduites par l’article 15 de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 à l’article L. 1233-3 du code du travail » (rejoignant sur ce deuxième point la jurisprudence de la Cour de cassation, v. not. Soc. 16 nov. 2016, n°s 14-30.063 P, 15-15.190 P et 15-19.927 P). Une telle analyse, qui a...

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Auteur d'origine: Dechriste
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La sanction de requalification d’un CDD en CDI et la rétroactivité qui lui est consubstantielle n’est pas sans poser un certain nombre de questions sur les modalités de « reconstitution » de la relation réputée à durée indéterminée, ainsi que sur les conséquences indemnitaires de la rupture. C’est sur ce terrain que les trois arrêts rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation le 2 juin 2021 se situent.

Dans chacune des espèces, un salarié avait sollicité la requalification d’une succession de CDD en CDI et l’avait obtenue. Différents problèmes juridiques surgirent au détour des espèces. Sur quelle base doit être calculé le rappel de salaire couvrant les périodes interstitielles séparant les différents CDD, ou encore l’indemnité compensatrice de préavis ?

L’indemnisation des périodes interstitielles

La question se pose avec une acuité particulière lorsque le salarié était par ailleurs en contrat à temps partiel. Sur ce terrain, la chambre sociale affirme d’abord, dans l’un des arrêts (pourvoi n° 19-16.183), que la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail. Réciproquement, la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée de travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat.

Sans motif de requalification d’un temps partiel en temps plein, la seule circonstance qu’existe une requalification de CDD en CDI est sans impact sur la durée du travail prévue au contrat et sur sa projection sur les périodes interstitielles séparant les contrats successifs.

Elle indique par ailleurs qu’il incombe au salarié qui sollicite un rappel de salaire au titre des périodes interstitielles de rapporter la preuve qu’il est resté à la disposition de l’employeur durant les périodes séparant deux contrats à durée déterminée.

Aussi censure-t-elle le raisonnement des juges du fond qui, retenant pour base de calcul du montant du rappel de salaire dû la durée moyenne mensuelle de travail obtenue par l’addition des durées des contrats à durée déterminée exécutés rapportée au mois, ne s’en étaient pas tenus à la réalité de la situation de chaque période interstitielle telle qu’elle résultait de chacun des CDD précédents.

Le principe est donc clairement affirmé : l’appréciation au réel doit prendre le pas sur le calcul basé sur une moyenne.

C’est déjà en ce sens que la chambre sociale avait pu statuer en jugeant que le salarié engagé par plusieurs CDD non successifs et dont le contrat est requalifié CDI, ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat sauf à démontrer qu’il s’est tenu à la disposition de l’employeur durant ces périodes (Soc. 10 déc. 2014, n° 13-22.422 P, Dalloz actualité, 27 janv. 2015, obs. W. Fraisse ; D. 2015. 20 ; 10 nov. 2009, n° 08-40.088, Dalloz actualité, 2 déc. 2009, obs. B. Ines). Pour bénéficier d’un rappel de salaire, le salarié doit, d’une part, démontrer qu’il s’est tenu à la disposition de l’entreprise pendant les périodes intermédiaires et, d’autre part, il doit en apporter la preuve.

Cette affirmation implique dès lors de prendre en considération la nature réelle du contrat à temps partiel concerné par la requalification en CDI dans l’appréciation de l’indemnisation des périodes interstitielles. Et telle est également la solution retenue en matière d’indemnité de préavis.

Indemnité compensatrice de préavis (temps partiel)

La chambre sociale rappelle en effet, en outre, que l’indemnité compensatrice de préavis doit être égale au montant des salaires que le salarié aurait perçus s’il avait travaillé pendant la durée du préavis (pourvoi n° 19-18.080).

Or la cour d’appel avait ici aussi retenu pour base de calcul le salaire mensuel moyen et voit donc son raisonnement infirmé par les hauts magistrats. Le calcul de l’indemnité doit en effet se faire non pas sur un salaire moyen perçu pour les seules périodes contractuelles antérieures à la rupture, mais doit prendre en compte le salaire théorique que le salarié aurait dû percevoir s’il avait pu exécuter le préavis.

C’est dans cette droite ligne que le troisième arrêt vient également s’inscrire (n° 20-10.141).

Un salarié consultant pigiste à temps partiel avait saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir la requalification de son contrat en CDI et le paiement des indemnités afférentes. Les juges du fond firent droit à sa demande, en lui allouant une indemnité compensatrice de préavis correspondant à trois mois d’un salaire à temps complet. L’employeur, estimant que cette indemnité ne pouvait correspondre à un salaire temps complet, s’est pourvu en cassation.

Les hauts magistrats, au visa de l’article L. 1234-5 du code du travail, rappellent d’abord que l’inexécution du préavis n’entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du préavis, indemnités de congés payés comprises, avant de censurer le raisonnement des juges du fond. Ceux-ci avaient en effet estimé que le défaut d’exécution du délai-congé résultait de l’action fautive de l’employeur, qui devait dès lors payer une indemnité compensatrice de préavis correspondant à une durée de travail à temps complet.

La chambre sociale invalide cette dernière réflexion, en s’appuyant sur ce même principe de réalité, et en invitant le juge à vérifier si, au jour de la rupture, le salarié était engagé à temps complet ou à temps partiel. Un salarié qui, au moment de la rupture, était à temps partiel doit, dès lors, et quel que soit le motif de la rupture, voir ses indemnités calculées sur la base dudit temps partiel.

Cette idée d’une appréciation « au réel » transparaît également dans l’appréhension de la rémunération mensuelle de référence qui, lorsqu’elle a été définie d’un commun accord par les parties, ne doit pas s’en trouver impactée par l’opération de requalification.

(Non-)impact de la requalification sur les autres clauses du contrat

Tel est en effet ce qui ressort de l’une des espèces présentement commentées (pourvoi n° 19-18.080), où un salarié, qui avait été embauché au titre de plusieurs CDD successifs au sein d’une société d’édition, a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir la requalification de son contrat en CDI et le paiement des indemnités afférentes.

Le salarié ayant été soumis, lors de ses derniers contrats, à une réduction du nombre des jours travaillés, se posait alors la question, une fois acquise la cause de la requalification en CDI, de la façon dont la rémunération mensuelle de référence servant de base au paiement des indemnités devait être calculée, considérant cette diminution de jours. Les juges du fond prirent le parti de prendre la moyenne des douze derniers mois effectivement travaillés avant la baisse du nombre de jours.

La chambre sociale va, au visa de l’article L. 1245-1 du code du travail, affirmer que la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les autres stipulations contractuelles, tenant notamment au nombre de jours travaillés.

Aussi, la détermination des jours de travail, dès lors qu’elle résulte – comme c’était le cas dans l’espèce commentée – de l’accord des parties intervenu lors de la conclusion de chacun des contrats, ne doit pas être affectée par la requalification en contrat à durée indéterminée. Les juges du fond ne doivent dès lors pas chercher à reconstituer, sur la base d’une moyenne consolidée, le nombre de jours de rémunération devant servir de base au calcul des indemnités liées à la requalification. Celles-ci doivent, et c’est ici le message principal et homogène qui ressort des arrêts, être calculées au réel, abstraction faite de toute moyenne reconstituée.

Cette primauté donnée par la Cour de cassation à la situation réelle du salarié et des termes du contrat initial nous apparaît louable. Bien que cette solution se montre plus fastidieuse pour celui qui devra quantifier les indemnités, il serait en effet cependant difficilement justifiable de considérer qu’une sanction de requalification en CDI emporte également un recalcul artificiel de la rémunération mensuelle servant de base pour calculer les indemnités auxquelles le salarié peut prétendre au titre de la rupture, alors pourtant que le code du travail n’y invite pas expressément.

Auteur d'origine: Dechriste

Le juge de l’exécution est compétent pour connaître d’une demande d’annulation du commandement de payer un indu de revenu de solidarité active, ainsi que, par voie de conséquence, de décharge de l’obligation de payer, sans que puisse être remis en cause devant lui le bien-fondé de la créance, juge le Tribunal des...

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Auteur d'origine: pastor
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La loi n° 2015-994 du 17 août 2015, dite « loi Rebsamen », a posé le principe selon lequel les listes comportant plusieurs candidats doivent être composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes inscrits sur la liste électorale (C. trav., art. L. 2314-30, al. 1er). Les listes sont composées alternativement d’un candidat de chaque sexe jusqu’à épuisement des candidats d’un des sexes.

Cette exigence s’applique tant à la liste des membres titulaires du comité social et économique qu’à la liste de ses membres suppléants (C. trav., art. L. 2314-30, al. 7). En revanche, elle ne concerne pas les candidatures libres présentées au second tour (Soc. 25 nov. 2020, n° 19-60.222 P, Dalloz actualité, 23 déc. 2020, obs. C. Couëdel ; D. 2020. 2349 ; ibid. 2021. 370, chron. S. Ala, M.-P. Lanoue et A. Prache ; ibid. 863, obs. RÉGINE ; ibid. 1152, obs. S. Vernac et Y. Ferkane ; Dr. soc. 2021. 1, tribune F. Petit ; ibid. 248, étude J. Brunie  ; 31 mars 2021, n° 19-24.134).

La proportion de femmes et d’hommes composant chaque collège doit être mentionnée dans le protocole d’accord préélectoral. Lorsqu’au moins une organisation syndicale a répondu à l’invitation à négocier de l’employeur et que l’accord ne peut être obtenu, la proportion est fixée par la DREETS, laquelle a remplacé la DIRECCTE au 1er avril 2021 (C. trav., art. L. 2314-13). Dès qu’un accord ou une décision de l’autorité administrative ou de l’employeur sur la répartition du personnel est intervenu, l’employeur doit alors porter à la connaissance des salariés, par tout moyen...

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Auteur d'origine: Dechriste
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La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) se prononce, dans un arrêt du 3 juin 2021 (aff. C‑784/19), sur la notion d’« activités substantielles autres que des activités de pure administration interne », notion servant à qualifier les activités d’une entreprise, qui entend détacher des travailleurs, dans l’État membre dans lequel elle est établie. La haute juridiction pose fermement la nécessité pour une entreprise de travail temporaire qui se prévaut de détachements transnationaux à partir d’un État membre d’effectuer une partie significative de ses activités de mise à disposition de travailleurs intérimaires au profit d’entreprises utilisatrices établies et exerçant leurs activités sur le territoire dudit État membre. Si cette solution peut sembler évidente au premier abord, et si elle est certainement heureuse eu égard à ses enjeux, elle n’était pas pleinement acquise compte tenu des conclusions de l’avocat général et de la prédominance qui est souvent accordée par la Cour de justice à la libre prestation de services. Une fois n’est pas coutume, en contredisant son avocat général, la Cour de justice fait preuve de sagesse.

La CJUE est ainsi conduite à interpréter les articles 12.1 du règlement (CE) n° 883/2004 et 14.2 du règlement (CE) n° 987/2009, portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale. Pour rappel, l’article 12.1 du règlement n° 883/2004, qui est le règlement de base, indique que la personne détachée doit exercer une activité salariée dans un État membre pour le compte d’un employeur « y exerçant normalement ses activités ». Quant au règlement d’application n° 987/2009, il précise en son article 14.2 que les termes « y exerçant normalement ses activités » désignent « un employeur qui exerce généralement des activités substantielles autres que des activités de pure administration interne sur le territoire de l’État membre dans lequel il est établi ».

En l’espèce, la société Team Power Europe, société d’intérim de droit bulgare, contestait la décision de l’institution compétente bulgare de lui avoir refusé la délivrance d’un certificat A1. Ce certificat devait attester, rétroactivement, de l’application de la législation bulgare de sécurité sociale à un travailleur, ressortissant bulgare, ayant été mis à disposition par cette société auprès d’une entreprise utilisatrice établie en Allemagne. La demande formulée le 9 mai 2019 concernait en effet une période de mise à disposition comprise entre le 15 octobre et le 21 décembre 2018.

Un tel refus était motivé par l’absence de réunion des conditions permettant de qualifier une mobilité transnationale de détachement, au sens de l’article 12.1 du règlement de base et de l’article 14.2 du règlement d’application. Il était en particulier justifié par le défaut d’activité substantielle de l’entreprise de travail intérimaire sur le territoire bulgare au sens de ces articles. Plusieurs éléments avaient conduit l’institution compétente à une telle décision. Par exemple, l’entreprise n’employait pas, à l’exception du personnel administratif et de direction, de travailleurs sur le territoire bulgare. Ou encore : la totalité de son chiffre d’affaires résultait des activités exercées par les travailleurs intérimaires mis à disposition en Allemagne, ce qui était corroboré par le fait qu’aucun contrat conclu avec des opérateurs exerçant une activité sur le territoire bulgare n’avait été présenté.

Pour critiquer cette décision, et en obtenir l’annulation devant les juridictions bulgares, l’entreprise intérimaire avait fait valoir à l’inverse qu’elle exerçait bien des activités substantielles sur le territoire bulgare : il s’agissait d’activités « de sélection, de recrutement et d’affiliation à la sécurité sociale de travailleurs intérimaires », celles-ci n’étant pas assimilables à l’accomplissement de tâches administratives purement internes.

La question qui se dessinait en creux dans ce contentieux était donc claire : la particularité de l’activité des entreprises de travail temporaire justifie-t-elle d’adapter les critères permettant d’évaluer l’existence d’activités substantielles dans l’État membre d’établissement de l’employeur ? La juridiction bulgare, statuant en dernier ressort en matière de sécurité sociale, estimant que la jurisprudence de la Cour de justice ne permettait pas de répondre à cette question, décidait d’interroger cette dernière. Il en a découlé la question préjudicielle suivante : l’article 14.2 du règlement n° 987/2009 doit-il être interprété en ce sens qu’une entreprise de travail intérimaire établie dans un État membre doit, pour être considérée comme « exerçant normalement ses activités », au sens de l’article 12.1 du règlement n° 883/2004, dans cet État membre, effectuer une partie significative de ses activités de mise à disposition de travailleurs intérimaires au profit d’entreprises utilisatrices établies et exerçant leurs activités sur le territoire dudit État membre ? Autrement dit, pour qu’une entreprise de travail intérimaire relève du champ d’application de cette disposition, est-il suffisant que cette entreprise effectue de manière significative, dans l’État membre dans lequel elle est établie, des activités de sélection et de recrutement de travailleurs intérimaires ou doit-elle également exercer de manière significative des activités de mise à disposition de tels travailleurs dans cet État membre ?

La Cour de justice de l’Union européenne choisit la seconde alternative. Elle n’admet pas que l’entreprise de travail temporaire n’ait pas d’activités significatives de mise à disposition dans l’État d’établissement. Elle justifie cette solution en puisant dans trois registres d’interprétation : une interprétation des « termes » de l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 987/2009, de son « contexte » normatif et des « objectifs » qu’il poursuit. Invitée par les textes à s’attarder sur les caractéristiques propres de chaque employeur et à la nature réelle des activités exercées, elle observe que la mise à disposition de travailleurs est le but ultime poursuivi par les activités de sélection et de recrutement de ces derniers. Ainsi, si la Cour admet, aux points 45 et 46 de son arrêt, que les activités consistant à procéder à la sélection et au recrutement de travailleurs intérimaires ne sauraient être assimilées à des « activités de pure administration interne », soit « des activités de nature exclusivement administrative qui visent à assurer le fonctionnement interne de l’entreprise », elle n’en relève pas moins, au point 49, que l’opération de mise à disposition auprès d’entreprises utilisatrices est le cœur de cette activité : seule la mise à disposition de ces travailleurs auprès d’entreprises utilisatrices en exécution des contrats conclus à cette fin avec ces dernières génère effectivement un chiffre d’affaires. En outre, les règles relatives au détachement sont dérogatoires et doivent donc être d’interprétation stricte (v. déjà, en ce sens, CJUE 6 sept. 2018, Alpenrind et al., aff. C-527/16, D. 2018. 1754 ), ce qui implique d’être particulièrement regardant sur la réalité de l’activité exercée. Enfin, les règlements de coordination des systèmes de sécurité sociale visent à garantir l’exercice effectif de la libre circulation des personnes et de la libre prestation de services. Il s’agit alors de « contribuer à l’amélioration du niveau de vie et des conditions d’emploi des personnes qui se déplacent au sein de l’Union » et d’offrir « un avantage en matière de sécurité sociale aux entreprises », vertueuses. À cet égard, la Cour ne se fait plus d’illusions : « le fait de permettre aux entreprises de travail intérimaire recourant à la libre prestation de services de bénéficier de cet avantage lorsqu’elles orientent leurs activités de mise à disposition de travailleurs intérimaires exclusivement ou principalement vers un ou plusieurs États membres autres que celui dans lequel elles sont établies risquerait d’inciter ces entreprises à choisir l’État membre dans lequel elles souhaitent s’établir en fonction de la législation de sécurité sociale de ce dernier dans le seul but de bénéficier de la législation qui leur est la plus favorable en cette matière et de permettre ainsi le “forum shopping” » (pt 62 de l’arrêt). Autrement dit, avoir des facilités administratives pour circuler est autorisé ; pouvoir exercer librement une pression vers le bas sur les systèmes de sécurité sociale ne l’est pas.

La CJUE refuse de suivre les conclusions de l’avocat général. Suivant ces dernières, les entreprises de travail temporaire étaient admises, au nom de la libre prestation de services et après analyse de leur « cœur de métier », à mettre des travailleurs à disposition, principalement ou exclusivement, auprès d’entreprises utilisatrices situées dans d’autres États membres que l’État d’établissement. Une limite était toutefois apportée à ce raisonnement : l’hypothèse de la fraude, en particulier lorsque la mise à disposition a lieu en direction d’un État exclusivement. La Cour de justice ne l’entend pas ainsi. Il n’y a pas une apparence de réalité et le détournement intentionnel d’une règle mais l’absence de réunion des conditions du détachement. C’est une question de qualification qui est soulevée, pas de caractérisation d’une fraude.

En raisonnant comme l’avocat général, la CJUE n’aurait fait qu’accroître le pouvoir d’organisation des entreprises fondé sur la libre prestation de services dans le marché intérieur européen et déjà fortement renforcé par sa jurisprudence relative au certificat A1. Au-delà, dans cet arrêt, la Cour porte une appréciation critique sur le travail intérimaire, forme d’externalisation de l’emploi.

La réponse apportée par la Cour de justice de l’Union européenne, dans cette affaire, était très attendue des organismes de contrôle, alertés par les conclusions de l’avocat général. Cette décision, riche, mérite leur attention.

(Original publié par Dechriste)
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En raison de complications survenues lors de l’accouchement de sa mère, un enfant se retrouve tétraplégique. Les parents de la victime, agissant tant en leur nom personnel qu’en qualité de représentant de leur enfant mineur, ont assigné en indemnisation l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM), ainsi que la société venant aux droits du centre hospitalier au sein duquel l’accouchement a eu lieu et l’assureur de ce dernier.

La cour d’appel de Nancy, par un arrêt du 18 novembre 2019, a infirmé partiellement la solution rendue par les juges de première instance. Si la cour d’appel retient également que la charge de l’indemnisation des préjudices subis par l’enfant et par ses parents doit peser sur l’ONIAM sur le fondement de l’article L. 1142-1, II, du code de la santé publique, elle refuse toutefois que l’AEEH soit déduite de l’indemnité de plus de deux millions d’euros versée au titre des besoins d’assistance par une tierce personne jusqu’aux dix-huit ans de l’enfant.

L’ONIAM forme alors un pourvoi en cassation arguant de la violation des articles L. 1142-1, II et L. 1142-17 du code de la santé publique, ainsi que du principe de réparation intégrale du préjudice, considérant que l’AEEH, en sa composante de base, comme en ses compléments, doit être déduite de l’indemnisation due par l’ONIAM au titre des frais d’assistance par tierce personne.

La Cour de cassation devait donc répondre à la question de l’imputation de l’AEEH sur l’indemnité des besoins d’assistance par tierce personne due par l’ONIAM. Cette question suppose de s’interroger sur la nature de l’AEEH. A-t-elle une nature indemnitaire ? Et dans ce cas, doit-elle être déduite du poste de préjudice d’assistance par une tierce personne afin de respecter le principe de réparation intégrale du préjudice ?

La première chambre civile de la Cour, par son arrêt du 2 juin 2021, rejette le pourvoi, décidant que l’AEEH et son complément « ne revêtent pas de caractère indemnitaire » de sorte que les juges du fond étaient fondés à refuser leur déduction de l’indemnisation due par l’ONIAM au titre de l’assistance par une tierce personne. Au sein de la motivation de la décision, les juges de cassation précisent la nature de l’AEEH : « elle constitue une prestation familiale et ne répare pas un préjudice ».

Rappel du principe de déduction posé par l’article L. 1142-17 du code de la santé publique

La Cour de cassation commence par rappeler le texte de l’article L. 1142-17 du code de la santé publique. Ce dernier, en son deuxième alinéa, prévoit en effet que l’offre d’indemnisation réalisée par l’ONIAM indique le montant des indemnités « déduction faite des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 […], et plus généralement des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice ». En cas de litige relatif au montant de l’indemnisation proposée par l’ONIAM, il appartient donc au juge, afin d’évaluer le montant des indemnités qui reviennent à la victime, déduction faite des prestations et indemnités visées par l’article L. 1142-17 du code de la santé publique, d’interroger notamment la victime sur les prestations et indemnités perçues (CE, avis, 22 janv. 2010, n° 332716, Coppola, Lebon ; AJDA 2010. 237 ; ibid. 1138, chron. S.-J. Liéber et D. Botteghi ; RDSS 2010. 576, obs. D. Cristol ; et dans le même sens, Civ. 1re, 5 fév. 2020, n° 18-21.696 et 18-25.751, Gaz. Pal. 5 mai 2020, obs. D. Zegout).

L’application des dispositions de l’article L. 1142-17 permet de respecter le principe de réparation intégrale du préjudice, selon lequel il ne doit résulter pour la victime, rétablie « dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu » (Civ. 2e, 28 oct. 1954 , Bull. civ. II, n° 328 ; JCP 1955. II. 8765, note R. Savatier ; RTD civ. 1955. 324, obs. H. Mazeaud et L. Mazeaud), ni perte, ni profit (v. not. en ce sens, Civ. 2e, 23 janv. 2003, n° 01-00.200, D. 2003. 605 JCP 2003. II. 10110, note J.-F. Barbièri). Autrement dit, il s’agit de réparer « tout le préjudice, mais rien que le préjudice ».

C’est dans cet aspect négatif du principe de réparation intégrale que s’inscrit l’article L. 1142-17 du code de la santé publique. En effet, ce dernier vise, outre les prestations énumérées à l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985 (lequel fait référence aux prestations versées par les organismes de sécurité sociale et groupements mutualistes, mais également aux sommes versées en remboursement des frais de traitement médical et de rééducation et aux salaires et accessoires de salaire maintenus pendant la période d’inactivité de la victime ou encore aux arrérages de pensions et de rentes d’invalidité versées par l’État à un agent public), aux « indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice ». La Cour de cassation a déjà été amenée à trancher des questions relatives à la déduction ou non de certaines indemnités ou prestations en application du principe de réparation intégrale (v. par ex., Civ. 2e, 29 mars 2006, n° 04-06.063 pour l’allocation de solidarité spécifique ; Civ. 2e, 3 juin 2010, n° 09-67.357 pour l’allocation de retour à l’emploi, RDSS 2010. 967, obs. D. Cristol ; Civ. 3e, 10 juill. 2008, n° 07-17.424 pour l’allocation aux adultes handicapés, D. 2008. 2226 ; ibid. 2009. 1168, obs. A. Leborgne ).

L’AEEH n’étant pas une des prestations énumérées par l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985, la question était donc de savoir s’il s’agissait d’une indemnité réparant le même préjudice, plus spécifiquement en l’espèce, se posait la question de savoir si cette allocation ne réparait pas déjà, au moins en partie, une part du préjudice subi au titre de l’assistance par une tierce personne, poste de préjudice prévu au sein de la nomenclature Dintilhac.

L’AEEH, une prestation familiale dépourvue de caractère indemnitaire

L’AEEH est prévue par l’article L. 541-1 du code de la sécurité sociale. La Cour de cassation rappelle succinctement, au sein du paragraphe 6 de sa décision, les principales conditions d’attribution de cette allocation. En effet, cette dernière bénéficie à la personne qui assume la charge d’un enfant handicapé, âgé de moins de vingt ans, lorsque ce dernier justifie d’un taux d’incapacité permanente minimum (CSS, art. R. 541-1) et qu’il ne bénéficie pas d’une rémunération excédant un plafond fixé par l’article R. 512-2 du code de la sécurité sociale. Surtout, les juges de cassation soulignent les modalités de fixation de cette allocation : « elle est fixée, sans tenir compte des besoins individualisés de l’enfant, à un montant forfaitaire exprimé en pourcentage de la base de calcul mensuelle des allocations familiales et […], s’agissant d’une prestation à affectation spéciale, liée à la reconnaissance de la spécificité des charges induites par le handicap de l’enfant, elle constitue une prestation familiale et ne répare pas un préjudice de cet enfant ».

Le montant de l’allocation est fixé en pourcentage de la base mensuelle de calcul des prestations familiales et le montant de son complément est déterminé au moyen d’un guide d’évaluation et en fonction de la nature ou de la gravité du handicap de l’enfant tout en prenant en compte « la réduction d’activité professionnelle d’un ou des parents ou sa cessation ou la renonciation à exercer une telle activité et la durée du recours à une tierce personne rémunérée » (CSS, art. R. 541-2).

On comprend, dès lors, l’hésitation quant à la nature de l’AEEH. En effet, si sa base mensuelle ne tient pas compte des besoins individualisés de l’enfant, son complément suppose une certaine évaluation de la situation de l’enfant handicapé notamment au regard de la nécessité ou non d’un recours à une tierce personne. Ainsi, la Cour de cassation avait, en 2014, retenu que l’AEEH et son complément, « revêtent un caractère indemnitaire dès lors qu’elles ne sont pas attribuées sous condition de ressources et que, fixées en fonction des besoins individualisés de l’enfant, elles réparent certains postes de préjudices indemnisables » (Civ. 1re, 18 juin 2014, n° 12-35.252, D. 2015. 124, obs. P. Brun et O. Gout ; RTD civ. 2015. 148, obs. P. Jourdain ; Gaz. Pal. 12-14 oct. 2014, obs. F. Bibal). Toutefois, l’AEEH n’a pas pour objet de réparer le préjudice de l’enfant handicapé mais, comme l’indique le secrétariat d’État chargé des personnes handicapées, est « une prestation familiale » qui « a pour but d’aider les familles à faire face aux frais supplémentaires qu’entraîne le handicap d’un enfant à charge de moins de 20 ans ». Cette prestation est donc fixée indépendamment des préjudices effectivement subis (le montant du complément à l’allocation n’est d’ailleurs pas individualisé, mais est déterminé en fonction de 6 catégories, v. CSS, art. R. 541-2) et est versée à la famille qui a la charge de l’enfant handicapé. Prenant certainement en compte ces critiques, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation avait déjà eu l’occasion d’affirmer, dans des termes très proches de ceux de l’arrêt du 2 juin 2021, que l’AEEH « constitue une prestation familiale et ne répare pas un préjudice de cet enfant » de sorte que, ne revêtant pas de caractère indemnitaire, elle n’avait pas lieu d’être déduite de l’indemnité allouée par la CIVI (Civ. 2e, 7 mars 2019, n° 17-25.855, D. 2019. 535 ; ibid. 2058, obs. M. Bacache, A. Guégan et S. Porchy-Simon ; ibid. 2020. 40, obs. P. Brun, O. Gout et C. Quézel-Ambrunaz ; RTD civ. 2019. 344, obs. P. Jourdain ; ibid. 356, obs. P. Jourdain ; Gaz. Pal. 21 mai 2019, note A. Guégan). La première chambre civile de la Cour de cassation harmonise ainsi sa jurisprudence avec celle de la deuxième chambre civile, confirmant la nature de prestation familiale sans caractère indemnitaire de l’AEEH.

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Destinés à accompagner les services RH et structurer les méthodes de gestion au sein de l’entreprise, les guides RH occupent une place de choix dans les pratiques sociales contemporaines. Dans les faits, cet outil constitue un support permettant aux services concernés de mieux gérer diverses problématiques (durée du travail, congés, discipline, dialogue social, licenciement) et de dessiner un panorama exhaustif des règles juridiques. Il arrive parfois que le contenu du guide RH outrepasse les prescriptions légales pour intégrer des éléments qui lui sont propres. Lorsque le guide RH invite à suivre une procédure qui s’avère plus avantageuse pour le salarié, la question de la valeur juridique du guide RH en vient à se poser naturellement. Dans ce cas, qu’en est-il lorsque le service RH prend ses distances avec le contenu du guide qui le lie ? Dans un arrêt en...

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Dans l’exercice de ses attributions économiques et sociales, le CSE est admis à recourir à l’assistance d’experts afin qu’ils livrent une analyse objective et détaillée selon les situations. Tel est le cas s’agissant de la consultation sur les orientations stratégiques (C. trav., art. L. 2315-87) ou sur la situation économique et financière de l’entreprise (C. trav., art. L. 2315-88). Le CSE peut également faire appel à un expert habilité en cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (C. trav., art. L. 2315-94 ; pour le CHSCT, v. anc. C. trav., art. L. 4614-12). Dans ce cadre, l’expert est chargé d’étudier le projet et ses conséquences et de fournir un rapport approfondi sur les mesures projetées. Pour mener à bien sa mission dans le délai qui lui est imparti, l’expert dispose des mêmes éléments d’information que les membres élus du CSE. Faut-il encore que ces données soient suffisamment qualitatives pour que l’expert puisse livrer un examen lisible de la situation, permettant par ailleurs aux élus de formuler un avis éclairé. Les processus de consultation et d’expertise étant enfermés dans des délais relativement courts, la question du point de départ de ces délais s’avère cruciale, notamment lorsqu’un blocage découle de l’insuffisance des informations transmises par l’employeur. La procédure de consultation est-elle réputée suivre son cours alors même que les élus, dans l’attente du rapport d’expertise, ne sont pas en mesure de s’exprimer sur la nature du projet. Telle était la question soumise à la Cour de cassation à l’occasion d’un arrêt en date du 27 mai 2021.

La procédure de consultation est-elle réputée suivre son cours alors même que les élus, dans l’attente du rapport d’expertise, ne sont pas en mesure de s’exprimer sur la nature du projet ?

En l’espèce, plusieurs CHSCT d’établissement de La Poste avaient sollicité une expertise s’agissant d’un accord national portant « sur l’amélioration des conditions de travail et sur l’évolution des métiers de la distribution et des services des factrices/facteurs et de leurs encadrantes/encadrants de proximité ». Plusieurs mois après la désignation de l’expert, La Poste informait les CHSCT de l’organisation d’une réunion d’information/consultation sur les mesures prévues par l’accord en question. Au jour de la réunion, les CHSCT faisaient savoir à la direction qu’ils étaient dans l’impossibilité d’émettre un avis, en l’absence de restitution du rapport d’expertise. La Poste demandait aussitôt au cabinet d’expertise l’arrêt de sa mission et informait les établissements relevant du périmètre des CHSCT de l’application en leur sein des mesures contenues dans l’accord collectif. Les CHSCT saisissaient le président du tribunal de grande instance de demandes tendant notamment à dire que le délai de consultation n’avait pas commencé à courir. Les CHSCT souhaitaient faire obstacle à la poursuite de la procédure de consultation et obtenir la suspension, sous astreinte, de la mise en œuvre de l’accord. Le cabinet d’expertise intervenait à l’instance pour faire juger notamment que le délai d’expertise n’avait pas commencé à courir, faute de transmission par La Poste des documents nécessaires. Le cabinet d’expertise demandait par ailleurs la transmission de ces documents sous astreinte. Dans un arrêt du 18 avril 2019, la cour d’appel de Montpellier, statuant en référé, avait estimé que le délai préfix de deux mois de consultation des CHSCT n’avait pas commencé à courir et qu’il ne pouvait commencer à courir qu’à compter de l’obtention du rapport d’expertise. La Poste était enjointe de poursuivre la procédure de consultation des CHSCT, en transmettant au cabinet d’expertise les documents nécessaires afin qu’il puisse remplir sa mission. Estimant que le délai de consultation devait commencer à courir à compter de la date à laquelle, ayant reçu de l’employeur les informations nécessaires à l’exercice de leur mission, les CHSCT avaient décidé de recourir à une expertise et procédé à la désignation de l’expert, La Poste formait un pourvoi en cassation.

Dans un arrêt du 27 mai 2021, la chambre sociale casse et annule la décision de la cour d’appel. Après avoir rappelé le cadre de consultation du CSHCT ainsi que les modalités et délais de recours à l’expertise, la Cour de cassation précise que « l’absence de remise du rapport par l’expert, tenu pour exécuter la mesure d’expertise de respecter un délai qui court du jour de sa désignation, n’a pas pour effet de prolonger le délai de consultation du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail fixé par l’article R. 4614-5-3 du code du travail ». Consulté sur une décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (C. trav., art. L. 4612-8 anc.), le CHSCT qui a recours à l’expertise est en principe tenu de se prononcer dans un délai de deux mois (C. trav., art. R. 4614-5-3 anc.). Ce délai court à compter de la date à laquelle celui-ci a reçu une information le mettant en mesure d’apprécier l’importance de l’opération envisagée (C. trav., art. R. 4614-5-2 anc.). Le CHSCT peut alors décider de recourir à un expert, lequel est censé rendre son rapport dans un délai d’un mois à compter de sa désignation (C. trav., art. R. 4614-18, al. 1er anc.). Quand bien même il existerait un blocage à raison de l’insuffisance des informations transmises par l’employeur, l’absence de remise du rapport par l’expert n’emporte pas automatiquement la prolongation des délais de consultation et d’expertise.

Pas de recours judiciaire pour transmission insuffisante des informations par l’employeur, pas de prolongation ou de suspension du délai

En effet, cela suppose que le CHSCT (aujourd’hui la CSSCT du CSE) mette en œuvre les voies de recours normalement admises dans l’hypothèse d’une insuffisance d’informations. Dans ce cas précis, il appartient aux élus de saisir le président du tribunal judiciaire afin de faire reconnaître le caractère lacunaire des informations communiquées et ainsi obtenir la transmission d’informations complémentaires et, le cas échéant, la suspension du délai de consultation (Soc. 26 févr. 2020, n° 18-22.759, Dalloz actualité, 26 mars 2020, obs. C. Couëdel ; D. 2020. 440 ; ibid. 1740, chron. A. David, M.-P. Lanoue, A. Prache et T. Silhol ; ibid. 2312, obs. S. Vernac et Y. Ferkane ; RDT 2020. 559, obs. F. Signoretto ). Á défaut d’avoir entrepris une telle procédure, rien ne pouvait valablement justifier la suspension des délais de consultation, pas même l’absence de remise du rapport par l’expert. Dans le cas présent, plus de quatre mois séparaient le point de départ de la consultation et la désignation de l’expert de la mise en œuvre du projet. Dès lors que « les CHSCT n’avaient pas saisi le juge dans le délai qui leur était imparti pour donner leur avis à l’effet d’obtenir la communication d’informations complémentaires et la suspension du délai de consultation […] jusqu’à la communication de ces éléments complémentaires », la procédure de consultation était réputée arriver à son terme à l’issue des deux mois.

Pour la cour d’appel, le point de départ du délai de consultation devait être calqué sur la date de remise du rapport d’expertise. Admettre que le délai puisse commencer à courir avant même que le CHSCT soit en possession de l’analyse sollicitée aurait pour effet « de priver de toute portée de recours à expertise ». Il est vrai que les procédures de consultation et d’expertise sont intrinsèquement liées car c’est sur la base du rapport que les élus sont en mesure de fournir un avis éclairé sur le projet. C’est toutefois oublier que les représentants du personnel disposent d’outils juridiques pour surpasser cette situation de blocage.

Par ailleurs, s’il est admis que les représentants du personnel et l’employeur peuvent « fixer d’autres délais de consultation, les prolonger, ou modifier leur point de départ » (Soc. 8 juill. 2020, n° 19-10.987, D. 2020. 1470 ; ibid. 2312, obs. S. Vernac et Y. Ferkane ), cela suppose que la volonté commune des parties soit explicite, peu important que l’accord ait été formalisé ou non. Dans le cas présent, la haute juridiction a estimé, au contraire de la cour d’appel, qu’il ne résultait pas de faits de l’espèce que les délais de consultation des CHSCT avaient été prolongés d’un commun accord. En d’autres termes, il n’était pas possible de déduire des échanges intervenus entre l’employeur et les CHSCT que les parties s’étaient entendues pour repousser les délais de consultation à raison de difficultés pratiques.

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Prévu par la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire (v. AJDA 2021. 1068 ), et validé par le Conseil constitutionnel (v., Cons. const. 31 mai 2021, n° 2021-819 DC, AJDA 2021. 1121 ; D. 2021. 1087 et les obs. ), sa mise en place avait suscité des craintes de la part de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (v. C. Crichton, Mise en garde de la CNIL sur le « pass sanitaire », Dalloz actualité, 20 mai 2021) et de la Défenseure des droits (AJDA 2021. 1070 ) qui avaient insisté sur son caractère exceptionnel. Le message a été entendu. Le pass sanitaire est limité dans le temps : il ne sera exigé que du 9 juin au 30 septembre. Il l’est également s’agissant de son champ d’application : il est obligatoire dès onze ans pour accéder à certains lieux ou évènements de...

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Il est acquis que les règles définies à l’article L. 2314-30 du code du travail sont d’ordre public absolu, le protocole préélectoral ne pouvant y déroger (Soc. 11 déc. 2019, n° 19-10.826 P, Dalloz actualité, 23 déc. 2020, obs. C. Couëdel ; D. 2020. 563, obs. M.-P. Lanoue ; RJS 2/2020, n° 102). Mais sont-elles conformes à la Constitution ? C’est là la question posée par le truchement du mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité à l’occasion du litige présenté dans l’arrêt du 27 mai 2021 ci-après commenté.

En l’espèce, suite à la proclamation des résultats des élections professionnelles intervenue au sein de l’Unité économique et sociale Randstad (UES) le 5 mars 2020, l’un des syndicats intéressé a saisi le tribunal judiciaire en annulation des élections de certains salariés en invoquant le non-respect par ces organisations syndicales des principes de représentativité équilibrée et d’alternance.

Les juges du fond relevèrent sur le fondement de l’article L. 2314-30 du code du travail qu’il ne pouvait y avoir de candidature unique sur une liste présentée par une organisation syndicale, et annulèrent les élections de certains membres des comités sociaux et économiques de l’UES.

Un pourvoi en cassation contre cette décision fut formé, et à l’occasion duquel un syndicat et plusieurs salariés ont demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) rédigée en ces termes : « Les alinéas 1 à 6 de l’article L. 2314-30 code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017, tels qu’interprétés par la Cour de cassation, portent-ils atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et notamment à la liberté syndicale, au droit à l’éligibilité aux institutions représentatives du personnel qui découle du principe de participation des travailleurs consacrés par les sixième et huitième alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 en ce qu’ils interdisent aux syndicats de présenter aux élections professionnelles, lorsqu’au moins deux sièges sont à pourvoir au sein d’un collège électoral, une liste comportant un candidat unique appartenant au sexe sur-représenté ? »

Une question ni nouvelle, ni sérieuse pour la chambre sociale

La chambre sociale de la Cour de cassation va, de façon très classique vérifier la recevabilité de la QPC, et conclure par la négative, faute d’un caractère nouveau et sérieux.

Elle va en effet d’abord considérer que la disposition contestée est applicable au litige, dans la mesure où il est question d’une élection des membres de comités sociaux et économiques (CSE).

La chambre sociale relève cependant que si elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, la question posée, ne portant pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’occasion de faire application, n’est pas nouvelle.

D’autre part, les hauts magistrats vont encore considérer que la question posée ne présente pas un caractère sérieux.

Cette absence de caractère sérieux découle pour la chambre sociale du fait...

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Le contentieux des élections professionnelles est un domaine borné par un strict cadre procédural, trouvant à la fois sa source dans les grands principes du droit électoral et dans le code du travail. Parmi ces règles figure celle de l’article R. 2314-24 du code du travail, qui dispose que lorsque la contestation porte « sur la régularité de l’élection ou sur la désignation de représentants syndicaux, la requête n’est recevable que si elle est remise ou adressée dans les quinze jours suivant cette élection ou cette désignation ». À défaut de contestation dans ce délai, la jurisprudence juge de manière constante que les élections sont purgées de tout vice (Soc. 19 nov. 1987, n° 87-60.178). Le bon sens pourrait conduire à penser qu’une requête en contestation des élections n’a vocation à être déposée qu’une fois le premier tour des élections organisé. Il avait déjà été jugé que le tribunal d’instance peut être saisi dès avant les élections de contestations relatives à la régularité d’opérations antérieures aux élections. (Soc. 22 avr. 1982, Bull. civ. V, n° 255 ; Dr. ouvrier 1990. 363).

Mais peut-on cependant valablement déposer une demande en annulation d’élections professionnelles avant-même que celles-ci aient eu lieu ? Telle était en substance la question portée par l’arrêt rendu le 12 mai 2021 présentement commenté.

En l’espèce, des négociations ont été menées dans une société de la grande distribution entre la direction et les organisations syndicales représentatives afin d’y mettre en place des comités sociaux et économiques (CSE) d’établissement. Ces négociations restées infructueuses, ont donc été supplée par une décision unilatérale de l’employeur fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts au sein de la société sur une branche particulière de l’entreprise (hypermarchés,...

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Le 12 octobre 2016, la direction de Renault Sandouville décide d’étendre à l’ensemble de ses ateliers le port des protections individuelles contre le bruit, jusqu’alors imposé dans les seuls ateliers « montage » et « peinture ».

Toutefois, l’inspectrice du travail retire cette décision en ce que les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) des ateliers concernés n’ont pas été consultés.

Cette décision est finalement annulée par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi de Normandie, saisi d’un recours hiérarchique formé par la société.

Le syndicat CGT des travailleurs de Renault Sandouville intente alors une action contentieuse devant le tribunal administratif de Rouen. Par jugement du 12 mai 2021, le tribunal rejette la requête, estimant que la note qui généralise le port d’équipements de protection individuels constitue une simple mesure d’application du règlement intérieur.

Fallait-il voir dans cette note de service une adjonction au règlement intérieur ? Telle est la question sur laquelle avait à se...

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Il résulte des dispositions de l’article L. 513-1 du CSS que le législateur a entendu lier l’attribution des prestations familiales, au nombre desquelles figure la prestation d’accueil du jeune enfant comprenant le complément du libre choix du mode de garde, à la charge effective et permanente de l’enfant.

« Dans le cas […] où à la suite du divorce, de la séparation de droit ou de fait des époux ou de la cessation de la vie commune des...

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Le contrat à durée indéterminée constitue le contrat de droit commun. Il est la forme normale et générale de la relation de travail (C. trav., art. L. 1221-2). A l’inverse, le caractère exceptionnel et dérogatoire du recours au contrat à durée déterminée est souligné par l’ensemble des règles qui l’encadrent rigoureusement et dont le non-respect est susceptible d’entraîner sa requalification en contrat à durée indéterminée.

Tel est le cas lorsque le contrat à durée déterminée a pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise (C. trav., art. L. 1242-1), ne contient pas les mentions obligatoires (C. trav., art. L. 1242-12), ne respecte pas les délais de carence entre deux contrats successifs (C. trav., art. L. 1244-3).

C’est de ce non-respect dont il était question dans l’affaire ayant conduit à l’arrêt de la Cour de cassation du 5 mai 2021. En l’espèce, une salariée a été engagée en qualité d’aide cuisinière par une association, selon contrats à durée déterminée de remplacement du 24 avril au 11 septembre 2009, pour surcroît d’activité pour la journée du 12 septembre 2009, puis pour remplacement d’un salarié absent du 15 septembre 2009 au 8 avril 2011.

La salariée a saisi la juridiction prud’homale aux fins, notamment, d’obtenir la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée à compter du 12 septembre 2009. La Cour d’appel a débouté la salariée de sa demande aux motifs que l’action de la salariée en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée était prescrite. Cette position est censurée par la Cour de cassation qui, dans son arrêt, apporte quelques précisions sur le régime de la prescription des...

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Dans une décision rendue le 19 mai 2021, le Conseil d’État annule l’article 9 de l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020, ainsi que le décret n° 2020-508 du 2 mai 2020 qui s’y rattache. Ces deux textes adaptaient temporairement les délais relatifs à la consultation et à l’information du CSE afin de faire face aux conséquences de la propagation de l’épidémie de covid-19.

L’article 9 de l’ordonnance prévoyait, à titre temporaire, un raccourcissement des délais légaux ou conventionnels de communication aux membres du CSE de l’ordre du jour des séances consacrées aux décisions de l’employeur ayant pour objectif de faire face à l’épidémie, à l’exception des procédures de licenciement de dix salariés ou plus. Sur le fondement de cette ordonnance, le décret du 2 mai 2020 précisait que les délais réduits (8 à 10 jours selon les cas de consultation au lieu d’1 à 3 mois) s’appliquaient entre le 3 mai et le 23 août 2020.

Pas d’habilitation expresse

Ces dispositions ont été contestées pour excès de pouvoir par FO, Solidaires et par le Syndicat des avocats de France (SAF). Le Conseil d’État leur donne aujourd’hui raison, alors même que ces textes ne sont plus applicables.

Le juge administratif considère que la loi du 23 mars 2020 habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnance ne l’autorisait pas à réduire les délais d’information et de consultation des CSE, ni les délais applicables au déroulement des expertises décidées par les comités. Le juge se réfère non seulement au texte de la loi d’habilitation, mais aussi à son exposé des motifs et aux travaux parlementaires lors de son adoption, pour rappeler que la loi d’habilitation visait non pas le raccourcissement explicite des délais de consultation mais « les modalités d’information et de consultation des IRP, d’organiser la consultation des IRP par voie dématérialisée […] et l’adaptation, l’interruption, la suspension et le report du terme de certains délais », le texte évoquant même un moratoire sur les délais.

Une voie contentieuse ?

Les effets de cette annulation sont cependant limités : ces textes n’ont été applicables que quatre mois et ils ne sont donc plus en vigueur. Mais, comme s’il s’agissait d’un avertissement adressé à l’exécutif, le Conseil d’État, d’une certaine façon, montre les dents. Peu convaincue par une ministre du Travail qui « se borne à évoquer qu’une telle annulation pourrait seulement donner lieu à l’engagement d’éventuelles actions indemnitaires en vue d’obtenir la réparation des préjudices susceptibles d’être causés par l’organisation de procédures passées d’information et de consultation des CSE », la plus Haute juridiction administrative estime qu’il n’y a pas lieu de limiter les effets de ces annulations, alors même qu’elle pourrait considérer qu’il en va de l’intérêt général et décider que les effets rétroactifs de l’annulation ne jouent pas. Autrement dit, cette décision pourrait ouvrir une voie de contentieux sur des décisions d’entreprises fondées sur ces délais abrogés de consultation du CSE ou sur l’impossibilité pour le CSE de se prononcer dans les délais impartis, estime l’avocat de FO, Thomas Haas. 

Auteur d'origine: Dechriste

Généralement consécutive à une rupture du contrat de travail, la transaction peut être également conclue en cours de contrat, afin de mettre un terme à un différend concernant son exécution (Soc. 10 mars 1998, n° 95-43.094 P, RJS 4/1998, n° 456). Dans ces circonstances, l’employeur et son salarié entendent prévenir ou dissiper toute contestation relative au contrat de travail par des concessions mutuelles. Régie par le code civil (C. civ., art. 2044 s.), la transaction repose sur la volonté réciproque des parties et engage chacune d’entre elles suivant les conditions valablement négociées. En principe, un protocole transactionnel ne lie que les parties à la négociation, celui-ci étant par nature inopposable aux tiers. Mais alors qu’en est-il lorsque de cette transaction résulte une disparité entre salariés pourtant placés dans une situation comparable, voire identique. C’est la question à laquelle a été confrontée la chambre sociale à l’occasion d’un arrêt rendu le 12 mai 2021.

En l’espèce, plusieurs salariés concernés par des mesures économiques tendant à la suppression des équipes de nuit...

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par Jean-Marc Pastorle 19 mai 2021

L’ordonnance n° 2021-581 précise les principes guidant la procédure selon laquelle les établissements de santé peuvent prétendre au label des hôpitaux de proximité. Elle les redéfinit comme étant le premier niveau de la gradation des soins hospitaliers. Leur fonctionnement est spécifique et décloisonné et ils sont investis dans des missions partagées et assurées en complémentarité avec les acteurs du territoire. La labellisation relève d’une démarche volontaire des établissements de santé et d’un engagement à assurer des missions définies en coopération étroite avec les acteurs des territoires. L’adéquation du projet de l’établissement aux missions des hôpitaux de proximité relèvera...

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Le règlement intérieur constitue la principale manifestation du pouvoir normatif de l’employeur au sein de l’entreprise. Destiné à encadrer la relation de travail par l’instauration de règles contraignantes, le règlement intérieur doit nécessairement traiter les questions de la santé et sécurité au travail et prévoir des règles relatives à la discipline. Ainsi, le règlement intérieur vise à assurer le bon ordre dans l’établissement en interdisant certains comportements ou actions et en aménageant les modalités de contrôle, de surveillance et de sanction des salariés.

À cet égard, il est parfois difficile de déterminer ce qui relève du champ disciplinaire et ce qui en est exclu. Certains documents tels que les codes de bonne conduite, les chartes d’éthique ou encore les codes de déontologie ont vocation à réglementer et codifier les rapports ou les pratiques au sein de l’entreprise. Dès lors qu’ils visent à obtenir du salarié un comportement donné, les rapports entretenus avec les domaines du règlement intérieur s’avèrent parfois difficiles à appréhender. En témoigne un arrêt du 5 mai 2021 à l’occasion duquel la chambre sociale s’est exprimée sur l’adjonction au règlement intérieur d’un code de déontologie (Soc. 5 mai 2021, n° 19-25.699, D. 2021. 907 ).

En l’espèce, un salarié recruté par une banque publique d’investissement en qualité de « directeur investissement » avait été licencié sur le fondement d’une cause réelle et sérieuse pour avoir manqué à certaines règles édictées...

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Il est aujourd’hui acquis que la rupture conventionnelle doit déterminer notamment le montant de l’indemnité de rupture versée par l’employeur, étant précisée que celle-ci ne peut en tout état de cause être inférieure au montant de l’indemnité, légale ou conventionnelle, à laquelle le salarié pourrait prétendre en cas de licenciement en application de l’article L. 1234-9 du code du travail (C. trav., art. L. 1237-13, tel qu’interprété de façon constante par la jurisprudence). Un avenant du 18 mai 2009 à l’ANI du 11 janvier 2008, étendu par un arrêté du 27 novembre 2009, impose en outre le versement de l’indemnité conventionnelle de licenciement, si elle est plus favorable que l’indemnité légale. Mais qu’en est-il lorsque la convention prévoit non pas une, mais deux indemnités conventionnelles distinctes, ou renvoie directement à l’indemnité légale dans l’une des deux hypothèses ? C’est précisément dans ce contexte que l’arrêt du 5 mai 2021 nous apporte des éléments de réponse.

Une salariée recrutée par une caisse d’épargne et de prévoyance est convenue avec cette dernière d’une rupture conventionnelle près de vingt ans après son embauche.

La salariée a reçu, au titre de cette rupture, une indemnité spécifique calculée par référence au montant de l’indemnité légale de licenciement.

La salariée a néanmoins saisi les juridictions contestant le montant qui lui fut alloué. Les juges du fond ont fait droit à sa demande en appel, condamnant l’employeur au paiement d’un solde au titre de cette indemnité, de sorte que ce dernier s’est pourvu en cassation.

Les juges du fond, partant du constat qu’une indemnité conventionnelle plus favorable à l’indemnité de licenciement existait, en ont déduit que l’indemnité de rupture conventionnelle devait a minima atteindre ce montant conventionnel. Or les articles 2.2.4 et 2.2.5 de l’Accord sur les instances paritaires nationales du 22 décembre 1994 applicable aux salariés du Groupe Caisse d’Épargne prévoyaient le versement d’une indemnité conventionnelle de licenciement seulement dans deux hypothèses, en cas de licenciement pour insuffisance résultant d’une incapacité professionnelle et en cas de difficultés économiques sérieuses mettant en cause la pérennité de l’entreprise, tous les autres cas de licenciement pour motif personnel n’ouvrant droit qu’à l’indemnité légale de licenciement.

Pour l’employeur, à défaut de précision et considérant ces conditions, il était exclu que la salariée puisse prétendre à l’indemnité d’un montant supérieur à l’indemnité légale dans le cadre d’une rupture conventionnelle.

La chambre sociale de la Cour de cassation, saisie du pourvoi, rejette l’argumentation de l’employeur.

Les hauts magistrats ont en effet validé l’interprétation de l’article L. 1237-13 du code du travail livrée par la cour d’appel consistant à appliquer comme plancher de l’indemnité de rupture conventionnelle le montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement, dès lors qu’elle est plus favorable que l’indemnité légale de licenciement.

La solution, bien qu’en cohérence avec la jurisprudence antérieure, n’allait pas nécessairement de soi en présence d’une convention collective prévoyant différentes modalités d’indemnités conventionnelles de licenciement, dont certaines renvoyant à l’indemnité légale. Devait-on nécessairement indexer le plancher de l’indemnité de rupture conventionnelle sur la plus favorable des hypothèses conventionnelles ? Tel semble être le parti pris de la chambre sociale.

Une contradiction apparente avec l’interprétation administrative

En cela, elle peut paraître s’écarter d’une interprétation de l’instruction DGT n° 2009-25 du 8 décembre 2009 qui précisant que, lorsqu’une convention collective prévoit deux indemnités de licenciement, l’une pour motif personnel, l’autre pour motif économique, l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle doit être au moins égale à l’indemnité légale si au moins une des indemnités conventionnelles est inférieure à l’indemnité légale ou à l’indemnité conventionnelle la plus faible si les deux indemnités conventionnelles sont supérieures à l’indemnité légale.

C’est en tout cas ce qu’invoquait l’employeur à l’appui de son pourvoi. Cette contradiction à l’instruction de la DGT n’est en réalité qu’apparente, puisque celle-ci évoque précisément un plancher correspondant « à l’indemnité conventionnelle la plus faible dans l’hypothèse où les indemnités conventionnelles seraient toutes supérieures à l’indemnité légale ». Tel n’était pas le cas en l’espèce, puisque la convention prévoyait soit une indemnité conventionnelle plus favorable, soit une indemnité égale à celle prévue par la loi, et non pas supérieure à celle-ci.

Sous cet angle, ce n’est que si toutes les indemnités conventionnelles de licenciement sont supérieures à l’indemnité légale que la règle de l’application de la plus faible d’entre elles à la rupture conventionnelle mérite application. À défaut, il était parfaitement loisible au juge sans contredire l’interprétation de l’autorité administrative de prendre l’indemnité conventionnelle de licenciement comme plancher de l’indemnité de rupture conventionnelle, fût-elle réservée à seulement deux motifs de licenciement clairement identifiés.

Un régime indemnitaire favorable au salarié

Cette solution pourrait apparaître également en rupture vis-à-vis de l’interprétation plus stricte qui domine en matière d’indemnité de licenciement. En matière de licenciement, en effet, la jurisprudence avait eu l’occasion de préciser que, dès lors qu’une convention collective énumère les causes pour lesquelles le licenciement peut être prononcé, l’indemnité conventionnelle de licenciement qu’elle institue ne peut être accordée que si le licenciement a été prononcé pour l’une de ces causes (v. not. Soc. 25 mars 1992, n° 90-45.494, RJS 5/1992, n° 589 ; 3 févr. 1993, n° 91-42.409, D. 1993. 61  ; ibid. 1994. 305, obs. M.-A. Souriac-Rotschild ).

Or l’article L. 1237-13 du code du travail renvoie, en matière d’indemnité de rupture conventionnelle, à l’indemnité légale de licenciement définie à l’article L. 1234-9, qui constitue un plancher en deçà duquel il n’est pas envisageable de descendre. Ce plancher s’en trouve rehaussé lorsqu’existe un régime conventionnel plus favorable en matière d’indemnité de licenciement, peu important que la convention ou l’accord n’ait pas expressément intégré la question de l’indemnité de rupture conventionnelle. C’est ce que prévoit un avenant du 18 mai 2009 à l’ANI du 11 janvier 2008, étendu par arrêté du 27 novembre 2009. Ce dernier impose clairement le versement de l’indemnité conventionnelle de licenciement si elle est plus favorable que l’indemnité légale. Les entreprises couvertes par l’ANI du fait de son extension sont donc désormais tenues sur ce fondement de verser l’indemnité conventionnelle pour toute rupture conventionnelle.

Aussi, à la lumière de cet arrêt et à défaut de précision du tissu conventionnel, l’hypothèse dans laquelle l’indemnité conventionnelle ne serait prévue que pour certains types de licenciement ne pourra servir d’argument pour s’affranchir de ce plafond plus favorable.

Reste en suspens la question d’une convention qui prévoirait deux indemnités conventionnelles distinctes, toutes deux plus favorables que l’indemnité légale. Dans cette hypothèse, non tranchée dans le cas d’espèce, l’instruction DGT n° 2009-25 du 8 décembre 2009 inviterait à ne retenir comme plancher que la plus faible des deux.

Il sera sans doute profitable aux partenaires sociaux souhaitant se réapproprier la question de l’indemnité de rupture conventionnelle de renégocier, le cas échéant par accord collectif d’entreprise. On rappellera en effet qu’il est désormais possible par ce biais, sur le fondement des nouveaux articles L. 2253-1 à L. 2253-3, de moduler l’indemnité, y compris à la baisse, dès lors qu’elle reste au moins égale au minimum légal de l’indemnité de licenciement définie à l’article L. 1234-9 du code du travail. Prévoir un paragraphe exclusivement consacré à l’indemnité de rupture conventionnelle permettra dans cette perspective de dissiper toute ambiguïté qui pourrait naître d’interprétations croisées entre les textes de niveau négocié de champ plus large, les textes interprétatifs de l’administration et la jurisprudence rendues à propos de l’indemnité de licenciement.

(Original publié par Dechriste)

Le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a suspendu les arrêtés du préfet de la Marne rendant obligatoire le port du masque dans les agglomérations des communes de Châlons-en-Champagne, Compertrix, Fagnières, Saint-Martin-sur-le-Pré et Saint-Memmie. Il a jugé que la mesure n’était pas proportionnée à la situation de ces communes à faible densité de population.

Le préfet invoquait, au soutien de ses arrêtés, qui ont remplacé une précédente décision rendant le port du masque obligatoire dans le...

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Le juge administratif, dont la compétence en matière de droit du travail est loin d’être nouvelle ou résiduelle1, a vu son office considérablement étendu dans ce domaine par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, qui, procédant à une refonte des procédures de licenciement collectif, a confié à l’administration le soin de valider ou d’homologuer les plans de sauvegarde de l’emploi (PSE), tout en maintenant la compétence du juge judiciaire pour les contentieux individuels. L’intervention de l’administration du travail et, partant, du juge administratif en matière de licenciement pour motif économique a ainsi été rétablie en ce qui concerne les « grands » licenciements pour motif économique, alors qu’après avoir relevé de l’ordre administratif à la suite de l’instauration, en 1975, de l’autorisation administrative de licenciement, le contentieux des licenciements économiques avait intégralement été confié, après la suppression, en 1986, de cette autorisation, au juge judiciaire. La réforme législative de 2013, qui modifie profondément la procédure de licenciement collectif applicable aux entreprises tenues d’établir un plan de sauvegarde d’emploi, c’est-à-dire aux entreprises d’au moins cinquante salariés projetant au moins dix licenciements sur une période de trente jours, a entendu retranscrire les lignes directrices de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 et l’étude d’impact ayant précédé son adoption (M.-C. Sarrazin et A. Denis, Plan de sauvegarde de l’emploi : le droit public s’invite à la table des négociations, Dr. ouvrier 2014. 790).

Une compétence partagée

Depuis l’adoption de cette réforme, les hautes juridictions des ordres administratif et judiciaire ont rendu plusieurs décisions qui ont précisé les frontières de leurs compétences respectives en s’attachant à dégager des lignes directrices garantissant un contrôle juridictionnel cohérent et effectif (v. la très éclairante Lettre de la chambre sociale de la Cour de cassation, n° spéc., oct. 2020, « Les compétences respectives du juge administratif et du juge judiciaire en cas de licenciement économique collectif », par L. Pécault-Rivolier [dir.] ; également les discours introductifs au colloque Vers un nouveau droit du travail ? Regards croisés du Conseil d’État et de la Cour de cassation, 19 avr. 2019, B. Lasserre et B. Louvel). Très récemment, le Tribunal des conflits est venu parfaire le bloc de compétence dévolu au juge administratif, en jugeant que le contrôle du respect, par l’employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques en vertu de l’article L. 4121-1 du code du travail relève en cette matière de l’administration (et, partant, du juge administratif, T. confl., 8 juin 2020, n° 4189, Syndicat CGT Alstom Grid Villeurbanne, Lebon ; AJDA 2020. 2061 ), solution qui invite le juge administratif à exercer pleinement, en la matière, un rôle renouvelé (et qui met un terme à certaines interrogations soulevées par D. Piveteau dans son entretien à la SSL du 28 janv. 2019 n° 1846, Des frontières encore à préciser pour le juge du PSE).

Le développement d’un droit administratif du plan de sauvegarde de l’emploi

Le contrôle du plan de sauvegarde de l’emploi par le juge administratif s’est ainsi considérablement développé et affiné2, à des degrés variables selon que le contentieux concerne l’homologation du document unilatéral ou la validation de l’accord collectif fixant le contenu du plan, sur laquelle le juge administratif exerce un contrôle réel mais moins approfondi3, conformément à la promotion législative d’une voie négociée entre partenaires sociaux pour traiter les PSE (v. J. Daniel, Les périmètres du PSE en pratique, JCP S 2013, n° 19-20) et à la primauté de cette négociation.

Les contours et les modalités de l’obligation d’information-consultations du CSE

En ce qui concerne le contrôle de la régularité de la procédure d’information-consultation des instances représentatives, l’article L. 1233-30 du code du travail prévoit, dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, la réunion et la double consultation du comité social et économique (CSE, qui s’est vu attribuer par les ordonnances de 2017 les prérogatives de l’ancien comité d’entreprise et du CHSCT), d’une part, sur l’opération projetée et ses modalités d’application et, d’autre part, sur le projet de licenciement collectif (nombre de suppressions d’emploi, catégories professionnelles concernées, critères d’ordre et calendrier prévisionnel des licenciements, mesures sociales d’accompagnement et prévention des risques sociaux), en excluant toutefois de cette consultation le projet de licenciement ayant fait l’objet d’un accord collectif. Il précise que le comité, qui doit tenir au moins deux réunions espacées d’au moins quinze jours, rend ses deux avis dans un délai qui ne peut être supérieur à une période allant de deux à quatre mois (selon le nombre de licenciements envisagés) et qu’en l’absence d’avis de cette instance dans ces délais, celle-ci est réputée avoir été consultée.

Le contrôle de la régularité de cette procédure d’information et de consultation entre, fort logiquement – à peine de laisser lettre morte ces exigences légales pourtant essentielles –, dans le champ du contrôle devant être opéré par l’administration avant toute décision d’homologation du document élaboré par l’employeur (C. trav., art. L. 1233-57-3) ou de validation de l’accord collectif (art. L. 1233-57-2).

Le Conseil d’État a très tôt précisé, essentiellement dès l’arrêt Heinz (CE 22 juill. 2015, n° 385816, Ministre du Travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, Dalloz actualité, 24 juill. 2015, obs. D. Poupeau ; Lebon ; AJDA 2015. 1444 ; ibid. 1632 , chron. J. Lessi et L. Dutheillet de Lamothe ; D. 2016. 807, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RDT 2015. 514, concl. G. Dumortier ; ibid. 528, étude F. Géa ; ibid. 2016. 113, obs. C. Gilbert ), qu’il appartient ainsi à l’administration saisie par un employeur d’une demande d’homologation d’un document unilatéral de s’assurer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de la régularité de la procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise, et qu’elle ne peut légalement accorder cette homologation que si le comité a été mis à même d’émettre régulièrement un avis, d’une part, sur l’opération projetée et ses modalités d’application et, d’autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l’emploi. Il en a déduit qu’il lui appartient de s’assurer que l’employeur a adressé au comité d’entreprise, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité, tous les éléments utiles pour qu’il formule ses deux avis en toute connaissance de cause. S’agissant des décisions de validation d’un accord collectif, il a toutefois adapté cette analyse, en conformité avec la réserve formulée par le 2° de l’article L. 1233-30 du code du travail, en jugeant inopérant le moyen tiré de ce que la décision validant un tel accord serait illégale en raison d’un vice affectant la consultation du comité d’entreprise sur le projet de licenciement (CE 22 mai 2019, n° 420780, British Airways, Lebon ; D. 2019. 2153, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RDT 2019. 574, obs. F. Géa ). Cette exigence d’information complète et loyale des instances représentatives des salariés n’en demeure pas moins, quelles que soient les modalités d’élaboration, unilatérale ou négociée, du PSE, essentielle : il appartient au juge, lorsqu’il constate que la procédure a été irrégulière, d’annuler la décision de validation ou d’homologation sans avoir à rechercher l’influence exercée par cette irrégularité sur la décision en litige ni à examiner si elle a privé les salariés d’une garantie (CE 29 juin 2016, n° 386581, Astérion France [Sté], Lebon ; AJDA 2016. 1866, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet ).

Une jurisprudence administrative pragmatique mais vigilante

La haute juridiction administrative fait, en la matière comme dans d’autres domaines, œuvre de pragmatisme. Ainsi, les éléments d’information devant être communiqués au CSE ne sont-ils pas étendus à la situation économique d’un autre secteur d’activité que celui retenu par l’employeur (arrêt Heinz préc.), dès lors que l’appréciation de la réalité du motif économique n’entre pas dans le champ du contrôle de l’administration. En outre, la circonstance que ce comité ait rendu ses avis au-delà des délais prévus par l’article L. 1233-30 du code du travail est, par elle-même, sans incidence sur la régularité de la procédure d’information et de consultation du comité (arrêt British Airways préc.). Quel que soit le formalisme imposé par le code du travail, l’obligation substantielle de l’employeur, ou, en cas de procédure collective, de l’administrateur ou du liquidateur, s’articule autour de cette exigence, dont le respect est soumis au contrôle de l’administration : mettre l’instance concernée – pour ce qui nous concerne, le CSE – en mesure de se prononcer, en toute connaissance de cause, sur l’opération projetée.

L’arrêt du 16 avril 2021 s’inscrit bel et bien dans ce souci de pragmatisme jurisprudentiel et d’effectivité de l’information-consultation du CSE, en permettant d’éclaircir l’articulation entre le droit du CSE de recourir à un expert et les spécificités procédurales propres à l’existence d’une procédure collective.

Le droit de recourir à l’assistance d’un expert-comptable

Le législateur a prévu, à l’article L. 1233-34 du code du travail, la faculté du CSE consulté dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi de recourir à l’assistance d’un expert-comptable, décision devant, en principe (v. CE 23 nov. 2016, n° 388855, Saglietto, Lebon ; RDT 2017. 29, concl. M. Vialettes ), être prise dès la première réunion de ce comité. Cette faculté constitue, à n’en pas douter, un atout important de l’information du CSE permettant de rééquilibrer les forces en présence, l’expert-comptable se trouvant généralement au fait de la procédure et de ses enjeux. Le Conseil d’État a, en quelque sorte, transposé sa grille d’analyse appliquée à l’information des instances représentatives à celle de l’expert, en jugeant que l’administration doit s’assurer que ce dernier a pu exercer sa mission dans des conditions permettant au comité d’entreprise de formuler ses avis en toute connaissance de cause et que la circonstance que l’expert n’ait pas eu accès à l’intégralité des documents demandés ne vicie pas la procédure si les conditions dans lesquelles il a accompli sa mission ont néanmoins permis au comité de disposer de tous les éléments utiles (CE 21 oct. 2015, n° 385683, Dentressangle, Lebon ; AJDA 2016. 351 ; ibid. 1866, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet ; RDT 2016. 113, obs. C. Gilbert ).

Les spécificités procédurales relatives à l’existence d’une procédure collective

Ce droit de recourir à l’assistance d’un expert-comptable doit toutefois être concilié, en cas d’ouverture d’une procédure collective, avec les règles propres à ces procédures, tenant à une exigence de célérité. Afin de tenir compte de l’urgence résultant de la situation de l’entreprise, la procédure de consultation se trouve, en effet, allégée. À la différence de la procédure applicable aux sociétés in bonis, l’obligation de réunir au moins deux fois le CSE est écartée lorsque l’entreprise est soumise à une procédure collective par l’article L. 1233-58 du code du travail. De même, la Direccte (DREETS depuis le 1er avr. 2021) dispose, pour instruire une demande de validation ou d’homologation, d’un délai réduit à compter de la date de la dernière réunion du comité (huit jours en cas de procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, quatre jours en cas de liquidation judiciaire (C. trav., art. L. 1233-58, II, al. 2). Enfin, le CSE doit rendre son avis au plus tard le jour ouvré avant l’audience du tribunal de commerce (C. com., art. L. 631-19, III).

L’absence d’obligation d’une double réunion du comité social et économique en cas de procédure collective fait-elle, pour autant, obstacle à la mise en œuvre effective du droit de cette entité de recourir à un expert ? Une réponse négative avait été apportée, sous l’empire des dispositions antérieures à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, par la jurisprudence judiciaire (Soc. 7 juill. 1998, n° 96-21.451 P, D. 1998. 212 ; Dr. soc. 1998. 948, obs. A. Mazeaud ). Dans l’arrêt rendu le 16 avril 2021, le Conseil d’État, après avoir rappelé qu’il appartient à l’administration de s’assurer que l’employeur a adressé au comité « tous les éléments utiles pour qu’il formule ses deux avis en toute connaissance de cause, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d’avoir faussé sa consultation » et que, même si, en cas de redressement et de liquidation judiciaires, « une seule réunion du comité d’entreprise est en principe prévue par l’article L. 1233‑58 », « le recours à un expert, destiné à éclairer le comité d’entreprise, justifie qu’il soit réuni une seconde fois afin de ne pas priver d’effet le recours à l’expertise », précise qu’il « appartient alors à l’administration de s’assurer que les deux avis du comité d’entreprise ont été recueillis après que ce dernier a été mis à même de prendre connaissance des analyses de l’expert ou, à défaut de remise du rapport de l’expert, à une date à laquelle, eu égard notamment aux délais propres à la procédure ouverte par le tribunal de commerce et aux diligences de l’employeur, l’expert a disposé d’un délai suffisant pour réaliser sa mission dans des conditions permettant au comité d’entreprise de formuler ses avis en connaissance de cause ».

Une telle solution permet d’articuler les exigences relatives à l’information du comité social et économique et celles relatives aux délais réduits applicables en cas de procédure collective, en ne privant pas de toute utilité le recours à l’assistance d’un expert. Elle apparaît, en outre, respectueuse de l’économie générale du rôle de ce comité et des prérogatives spécifiques qui lui sont accordées en cas de procédure collective, celui-ci devant être consulté à différentes étapes de la procédure (C. trav., art. L. 2312-53) et ses représentants être entendus par le tribunal de la procédure avant qu’il n’arrête certaines décisions (art. L. 2312-54). Enfin, et surtout, elle s’inscrit pleinement dans l’exigence de loyauté de la consultation du comité social et économique dégagée par la jurisprudence administrative comme judiciaire, exigence au sujet de laquelle Gaëlle Dumortier indiquait déjà, dans ses conclusions sur l’affaire Heinz, que « la loyauté de la consultation du comité d’entreprise, qu’on peut rattacher au principe constitutionnel de participation », implique que « l’employeur dialogue avec le comité d’entreprise, réponde à ses demandes légitimes d’information et soit ouvert à ses propositions ».

 

Notes

1. Outre la fonction consultative du Conseil d’État en matière de réglementation du travail (pour un exemple récent, v. l’éclairant avis rendu par le Conseil d’État le 4 février 2021 sur la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail), le juge administratif est appelé à contrôler les décisions prises par l’administration du travail qui régulent les relations sociales dans l’entreprise : autorisations relatives au licenciement des salariés protégés (CE, ass., 10 juin 1996, n° 66792, Ministre du travail c. Bisson, Lebon  ; 5 mai 1976, nos 98647 et 98820, SAFER d’Auvergne et ministre de l’agriculture c. Bernette, Lebon, p. 232 ) et, plus récemment, à la rupture conventionnelle (ord. n° 2017-1387, 22 sept. 2017 et n° 2017-1718, 20 déc. 2017), même dans l’hypothèse où le salarié protégé contesterait la validité de son consentement (Soc. 20 déc. 2017, n° 16-14.880 P, D. 2018. 15 ; JA 2018, n° 583, p. 39, étude M. Julien et J.-F. Paulin ), mais aussi injonctions relatives aux règlements intérieurs des entreprises (CE 1er févr. 1980, n° 06361, Lebon , excluant la légalité de contrôles systématiques par alcootests à l’égard de l’ensemble des salariés de l’entreprise qui excèdent, par leur généralité, l’étendue des sujétions que l’employeur peut légalement imposer ; CE 5 déc. 2016, Société Sogea Sud, n° 394178, Lebon avec les conclusions ; AJDA 2016. 2353 ; Dr. soc. 2017. 244, étude J. Mouly , jugeant en revanche que le recours à des tests salivaires de détection immédiate de produits stupéfiants ne requiert pas l’intervention d’un médecin du travail ; JCP S 2017. 1022, note T. Noël).

2. Pour des illustrations topiques, voir, outre les arrêts fondateurs (CE, ass., 22 juill. 2015, n° 385816, Heinz, Dalloz actualité, 24 juill. 2015, obs. D. Poupeau ; Lebon ; AJDA 2015. 1444 ; ibid. 1632 , chron. J. Lessi et L. Dutheillet de Lamothe ; D. 2016. 807, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RDT 2015. 514, concl. G. Dumortier ; ibid. 528, étude F. Géa ; ibid. 2016. 113, obs. C. Gilbert  ; CE 7 déc. 2015, n° 383856, Darty, Lebon ; AJDA 2016. 645 ; ibid. 1866, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet  ; 29 juin 2016, n° 386581, Asterion, Lebon ; AJDA 2016. 1866, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet ), sur la procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise et du CHSCT : CE 27 mars 2015, n° 371852, Société Den Hartogh, Lebon (salariés protégés) ; 7 déc. 2015, n° 381307, Roussel, Lebon ; AJDA 2016. 1866, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet ; RDT 2016. 113, obs. C. Gilbert ; 22 mai 2019, n° 413342, M. Lignie et a, Lebon ; AJDA 2019. 1848 et n° 420780 British Airways, Lebon ; D. 2019. 2153, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RDT 2019. 574, obs. F. Géa ; sur la motivation de la décision administrative, v. CE 1er févr. 2017, n° 391744, Me Sohm, Lebon ; AJDA 2017. 257  ; 12 mai 2017, n° 391649, Spirel ; 24 nov. 2017, n° 389443, Société Conserves du blaisois, Lebon ; AJDA 2018. 606 ; sur le caractère suffisant du plan, v. CE 22 juill. 2015, n° 383481, Calaire Chimie, D. 2016. 807, obs. P. Lokiec et J. Porta ; 22 mai 2019, nos 407401 et 407414, M. Dib et a, Lebon ; D. 2020. 1136, obs. S. Vernac et Y. Ferkane (s’agissant du plan de reclassement) ; CE 30 mai 2016, SCP Louis Lageat (s’agissant des modalités d’appréciation des moyens du groupe) ; v. égal., sur ce point, l’article de L. Dutheillet de Lamothe et de G. Odinet, Un an de jurisprudence sur les plans de sauvegarde de l’emploi, AJDA 2016. 1866 .

3. CE 7 déc. 2015, n° 383856, Syndicat CGT Darty France, Lebon ; AJDA 2016. 645 ; ibid. 1866, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet  : lorsque le contenu du PSE a été déterminé par un accord collectif majoritaire signé dans les conditions prévues à l’article L. 1233-24-1 du code du travail, l’administration doit seulement s’assurer de la présence, dans ce plan, des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63. Un moyen tiré de ce que le plan de reclassement prévu par l’accord collectif est insuffisant au regard du nombre de postes vacants au sein de l’entreprise est donc inopérant. V. égal. not. CE 22 juill. 2015, n° 385668, Société Pages jaunes, Dalloz actualité, 24 juill. 2015, obs. préc. ; Lebon avec les conclusions ; AJDA 2015. 1444 ; ibid. 1632 , chron. J. Lessi et L. Dutheillet de Lamothe ; D. 2016. 807, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RDT 2015. 514, concl. G. Dumortier ; ibid. 528, étude F. Géa ; 12 juin 2019, n° 420084, M. Aubert et a, Dalloz actualité, 27 juin 2017, obs. L. Malfettes ; Lebon ; AJDA 2019. 2157 ; 22 juill. 2015, n° 383481, Syndicat CGT de l’Union locale de Calais et environs, Dalloz actualité, 24 juill. 2015, obs. préc. ; Lebon ; AJDA 2015. 1444 ; ibid. 1632 , chron. J. Lessi et L. Dutheillet de Lamothe ; ibid. 2016. 1866, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet ; D. 2016. 807, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RDT 2015. 514, concl. G. Dumortier ; ibid. 528, étude F. Géa .

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La directive 2006/54/CE du 5 juillet 2006 relative à l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes en matière d’emploi et de travail pose le principe de l’égalité entre les hommes et les femmes (JOUE, L 204, 26 juill. 2006). Le droit national entérine également ce principe d’égalité à l’alinéa 3 du Préambule de la Constitution, lequel proclame que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme ». Pour sa part, l’article L. 3221-2 du code du travail impose à l’employeur d’assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.

Le principe de l’égalité entre les hommes et les femmes est renforcé par les dispositions prohibant la discrimination en raison du sexe.

Aux termes des articles L. 1132-1 du code du travail et 225-1 du code pénal, aucune personne ne peut faire l’objet d’une discrimination, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, en raison du sexe.

L’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 précitée, intégrant en droit français les dispositions de l’article 2.1, b), de la directive 2006/54, précise que constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner, pour l’un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but soient nécessaires et appropriés (L. n° 2008-496, 27 mai 2008, portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations).

La Cour de cassation, dans son arrêt du 14 avril 2021, se prononce sur la question du caractère discriminatoire d’un dispositif de préretraite.

En l’espèce, un dispositif de départ volontaire en préretraite, mis en place dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, permettait aux salariés devant quitter leurs fonctions de percevoir une indemnité spéciale de départ en préretraite et, pendant toute la durée de leur préretraite, un revenu de remplacement sous forme de rente mensuelle correspondant à un certain pourcentage de leur rémunération mensuelle brute. Ce versement était garanti jusqu’à l’âge auquel les bénéficiaires pouvaient prétendre à la retraite à taux plein et dans la limite de cinq ans.

Une salariée avait adhéré à ce dispositif le 12 septembre 2007. Son contrat de travail avait pris fin le 30 septembre 2008 et sa prise en charge au titre du dispositif de préretraite avait cessé au 30 avril 2011. Estimant être victime d’une discrimination à raison de son sexe et de sa situation de famille par l’application du dispositif de préretraite faite à son égard par la société ayant imposé la prise en compte des trimestres acquis au titre de la majoration de la durée d’assurance en raison de ses trois enfants, alors qu’elle aurait dû bénéficier du dispositif de préretraite jusqu’au 30 juin 2013, date de la retraite à taux plein, la salariée avait saisi, le 22 janvier 2014, la juridiction prud’homale aux fins de paiement par l’employeur de diverses sommes.

La cour d’appel a fait droit aux demandes de la salariée et a condamné la société à lui payer des sommes à titre d’indemnité pour le défaut de portage du dispositif de préretraite du 1er mai 2011 au 30 juin 2013, à titre d’indemnité pour le défaut de cotisations de l’employeur sur la période de portage jusqu’au 30 juin 2013 mais également à titre d’indemnité pour discrimination.

Cette décision est censurée par la haute juridiction.

Elle juge en premier lieu que la salariée avait atteint, au 30 avril 2011, la durée d’assurance pour bénéficier d’une retraite à taux plein en y intégrant les majorations de durée d’assurance résultant, au titre de ses enfants, des dispositions de l’article L. 351-4 précité du code de la sécurité sociale.

La Cour de cassation se prononce en second lieu sur la question du caractère discriminatoire dudit dispositif. Elle considère que le dispositif de préretraite mis en place par le plan de sauvegarde de l’emploi, selon lequel le maintien dans la structure de préretraite est garanti jusqu’à l’âge auquel les bénéficiaires peuvent prétendre à la retraite à taux plein, intègre ainsi les trimestres acquis au titre des majorations de durée d’assurance instituées à l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2010-462 du 6 mai 2010. Cette disposition, apparemment neutre, est susceptible d’entraîner, à raison du sexe, un désavantage pour les salariées de sexe féminin, du fait de la naissance et de l’éducation des enfants, dès lors que celles-ci, qui atteignent plus rapidement l’âge auquel le bénéfice d’une retraite à taux plein est attribué, sont plus souvent conduites à une sortie anticipée du dispositif de préretraite. Cette différence de traitement peut toutefois être admise en présence d’une justification objective par un but légitime, dès lors que les moyens pour réaliser ce but sont nécessaires et appropriés.

Au soutien de sa démonstration, la Cour de cassation excipe de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, s’agissant de la question similaire de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous a), de la directive 79/7/CEE du 19 décembre 1978 relative à la mise en œuvre progressive du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale, selon laquelle, lorsqu’un État membre prévoit, pour l’octroi des pensions de vieillesse et de retraite, un âge différent pour les hommes et pour les femmes, la dérogation autorisée, définie par les termes « conséquences pouvant en découler pour d’autres prestations », figurant à l’article 7, paragraphe 1, sous a), permet qu’un État membre, eu égard au principe de cohérence, prévoie que les prestations d’invalidité qui ont pour fonction de remplacer le revenu procuré par l’activité professionnelle cessent d’être payées et sont remplacées par la pension de retraite au moment où les bénéficiaires arrêteraient de toute façon de travailler du fait qu’ils atteignent l’âge de la retraite (CJCE 11 août 1995, aff. C-92/94, Graham, Dr. soc. 1997. 397, chron. S. Van Raepenbusch ; ibid. 510, chron. S. Van Raepenbusch  ; et pour une allocation destinée à compenser la diminution de salaire consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, v. CJCE 23 mai 2000, aff. C-196/98, Hepple, AJDA 2000. 808, chron. H. Chavrier, H. Legal et G. de Bergues  ; D. 2000. 196, et les obs.  ; Dr. soc. 2003. 751, chron. S. Van Raepenbusch ).

Elle en déduit qu’en l’espèce, le dispositif de préretraite instauré par le plan de sauvegarde de l’emploi est justifié par un but légitime étranger à toute discrimination en raison du sexe dès lors que les prestations de préretraite, ayant pour fonction de remplacer le revenu procuré par l’activité professionnelle dans l’attente de l’âge auquel le salarié est en droit de prétendre à une retraite à taux plein, cessent d’être versées à cette date objective, la pension de retraite étant servie au terme du versement des prestations de préretraite.

Auteur d'origine: Dechriste

Dans un rapport publié le 4 mai et consacré aux droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), la Défenseure des droits, Claire Hédon, tire la sonnette d’alarme sur les atteintes aux droits fondamentaux et aux libertés des résidents.

Ces six dernières années, l’institution a été saisie de 900 réclamations dénonçant les conditions et modalités d’accompagnement...

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Auteur d'origine: emaupin

Le projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire entend tirer les conséquences de la politique vaccinale et de l’adoption de mesures de freinage de la diffusion du virus, bien que la situation demeure « problématique » et « incertaine », selon le Conseil d’État. Ce dernier estimant que « le contexte sanitaire actuel et son évolution prévisible justifient […] le maintien des mesures de police sanitaires nécessaires à la lutte contre l’épidémie, pour une durée adéquate ».

L’instauration d’un dispositif de sortie de l’état d’urgence sanitaire

La principale mesure est un dispositif de gestion de la sortie de crise sanitaire à compter du 2 juin et ce jusqu’au 31 octobre 2021. Le Premier ministre pourra prendre une série de mesures dont :

réglementer ou interdire la circulation des personnes et des véhicules, interdire ou restreindre les déplacements de personnes ;réglementer l’ouverture au public de certains établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, à l’exception des locaux à usage d’habitation ;réglementer les rassemblements de personnes sur la voie publique.

En Commission des lois, les députés ont adopté un amendement permettant en outre d’interdire aux personnes de sortir de leur domicile entre 21 heures et 6 heures, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé, et ce jusqu’au 30 juin. Selon l’exposé des motifs, cela se justifie par « la dynamique de l’épidémie observée ces dernières semaines, et de sa trajectoire prévisible d’ici la fin du mois de juin ».

Passe sanitaire

L’un des principaux points de crispation concerne la mise en place d’un futur « passe sanitaire ». Le régime transitoire permettait d’ores et déjà (loi du 9 juill. 2020), d’imposer à un passager aérien la présentation d’un test de dépistage...

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Auteur d'origine: pastor

Les règles présidant à l’acquisition de la qualité d’organisation patronale représentative, inspirées de celles applicables aux organisations syndicales de salariés, ont été consacrées par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014.

L’article L. 2151-1 du code du travail subordonne ainsi la représentativité patronale à la preuve de la réunion de six critères : le respect des valeurs républicaines, l’indépendance, la transparence financière, une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation, l’influence, prioritairement caractérisée par l’activité et l’expérience et l’audience, qui se mesure en fonction du nombre d’entreprises volontairement adhérentes ou de leurs salariés soumis au régime français de sécurité sociale et selon les niveaux de négociation.

L’article L. 2152-1 précise qu’en sus de ces critères, l’organisation patronale doit notamment, pour être représentative au niveau de la branche professionnelle, disposer d’une implantation territoriale équilibrée au sein de la branche, et doit justifier d’un nombre d’entreprises adhérentes, à jour de leurs cotisations, représentant soit au moins 8 % de l’ensemble des entreprises adhérant à des organisations professionnelles d’employeurs de la branche, soit au moins 8 % des salariés de ces mêmes entreprises.

L’appréciation de ces critères n’a fait l’objet que d’un contentieux mesuré. Certaines décisions rendues en la matière s’emploient cependant à apporter quelques clarifications.

Tel est le cas de l’arrêt du Conseil d’État du 24 avril 2021.

En l’espèce, l’Union nationale des entreprises du paysage (UNEP) avait demandé à la cour administrative d’appel de Paris d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté de la ministre du Travail du 21 décembre 2017 fixant la liste des organisations professionnelles d’employeurs reconnues représentatives « dans la convention collective des entreprises du paysage ». L’UNEP faisait notamment grief à l’arrêté de la ministre du Travail d’avoir reconnu représentative la chambre nationale de l’artisanat des travaux publics et des travaux publics (CNATP) et fixé son poids pour la négociation des accords collectifs à 3,5 % et, par conséquent, limité le poids de l’UNEP à 96,5 %.

La cour administrative d’appel de Paris ayant rejeté la requête de l’UNEP, cette dernière s’est alors pourvue en cassation.

L’appréciation du critère de l’indépendance

L’UNEP soutenait en premier lieu que la décision de la cour administrative d’appel de Paris était insuffisamment motivée sur le respect du...

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Auteur d'origine: Dechriste